Après l’Irlande, le Portugal allège sa cure d’austérité

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à Lisbonne

[15/10/2014 11:59:27] Lisbonne (AFP) Le Portugal présentera ce mercredi son projet de budget pour 2015, le premier depuis sa sortie de la tutelle de la troïka (UE-FMI-BCE), marqué à l’instar de l’Irlande par l’allègement de l’austérité en vigueur depuis trois ans.

Petite entorse à l’orthodoxie budgétaire, le gouvernement de centre droit a décidé mardi de revoir à la hausse l’objectif de déficit public pour 2015, à 2,7% du PIB, alors qu’il s’était engagé auprès de ses créanciers à le ramener à 2,5%.

“Insister sur un déficit à 2,5% aurait été du fanatisme budgétaire”, a assuré le Premier ministre Pedro Passos Coelho, qui amorce ainsi un virage après avoir longtemps appliqué à la lettre les remèdes de la troïka.

Le Portugal, qui avait échappé à la faillite en 2011 grâce à un plan d’aide international de 78 milliards d’euros, reste toutefois prudent et promet ainsi de passer en dessous de la limite européenne des 3%.

Soucieux de diminuer la pression fiscale pour favoriser la reprise encore fragile de l’économie, le gouvernement a renoncé à imposer de nouvelles ponctions aux Portugais.

“Il serait contreproductif d?augmenter les impôts surtout au moment où il faudrait que l’économie progresse un peu plus”, a commenté M. Passos Coelho lors de l’annonce du nouvel objectif de 2,7%, identique à celui de l’Irlande.

Si le gouvernement compte soulager le fardeau des ménages avec enfants grâce à l’introduction d’un quotient familial, il hésite à réduire la charge des autres contribuables. Ils ne se verront restituer une partie de l’impôt sur le revenu qu’en 2016, et ce seulement en cas d’un surplus des recettes fiscales.

Quant aux entreprises, elles bénéficieront d’une réduction de l’impôt sur les sociétés, qui sera ramené de 23% à 21%, fruit d’un accord conclu fin 2013 entre le gouvernement et le Parti socialiste, principale formation d’opposition.

Jugeant le budget trop sévère malgré la révision à la hausse du déficit public, le PS, désormais emmené par le maire de Lisbonne Antonio Costa, a toutefois d’ores et déjà décidé de voter contre l’ensemble du texte qui devait être présenté à la presse vers 17H00 GMT.

– Avertissement de Bruxelles –

A un an des élections législatives, le gouvernement portugais a préféré laisser légèrement filer le déficit au lieu d’annoncer de nouvelles mesures d’austérité, comme le lui avait encore suggéré mardi la Commission européenne.

Alors que Bruxelles réclamait avec insistance le remplacement rapide des mesures de rigueur invalidées cet été par la Cour constitutionnelle, Pedro Passos Coelho a préféré temporiser avant de faire marche arrière.

Le gouvernement a ainsi abandonné sa réforme des retraites, et une taxe sur les pensions supérieures de 1.000 euros prévue en 2015 ne devrait finalement concerner que les hauts revenus.

Autre geste visant à restituer le pouvoir d’achat, les coupes dans les revenus des fonctionnaires seront réduites de 20%, même si le gel des revalorisations est maintenu.

Les marges de manoeuvre sont cependant plus réduites pour le Portugal que pour l’Irlande, qui vise une croissance de 3,9% l’an prochain. Lisbonne doit se contenter d’une maigre croissance de 1% en 2014, et pour 2015 le gouvernement table sur 1,5%.

“Dans le contexte actuel, il n’y pas beaucoup de marge pour des politiques électoralistes, d’autant que notre dette publique figure parmi les plus élevées d’Europe, à près de 130% du PIB”, a commenté à l’AFP Paula Carvalho, économiste de la banque BPI.

Malgré la baisse spectaculaire de ses taux d’emprunt à l0 ans, désormais autour de 3%, la note de la dette du Portugal n’est toujours pas sortie de la catégorie des investissements à haut risque.

Contrairement aux attentes, l’agence de notation Fitch a maintenu ainsi vendredi cette note à “BB+” avec perspective positive, évoquant le risque d’un “certain dérapage du déficit public” en 2015.