L’adage qui dit: «celui qui a une maison en verre n’a pas intérêt à jeter des pierres sur les gens». Comprendre par-là qu’il faut éviter de critiquer les gens quand on est loin d’être parfait. Cet adage illustre de manière éloquente le bras de fer qui oppose, ces temps-ci, les deux chaînes de télévision privées, en l’occurrence Nessma Tv et Ettounsia, et à travers elles deux candidats à la présidentielle, Béji Caïd Essebsi, président du parti Nidaa Tounès, et Slim Riahi, président de l’Union patriotique libre (UPL).
Gros plan sur une querelle de mauvais aloi.
C’est la chaîne Ettounsia qui a commencé la première. Samir El Wafi, l’animateur de l’émission «pour qui ose seulement», a invité, dans un premier temps, le journaliste Amor Shabou lequel s’est amusé durant plus de deux heures et demi à faire des révélations fracassantes sur l’état de santé précaire du candidat Béji Caïd Essebsi et sur son éventuelle inaptitude à assumer un mandat présidentiel de cinq ans.
Lors de cette émission, Amor Shabou, qui est cofondateur du parti Nidaa Tounès, s’est employé avec un cynisme inouï à «dépecer» le vieux Bajbouj. Le préjudice porté au postulant à la magistrature suprême était énorme. Au grand bonheur de ses concurrents; ce préjudice risque de compromettre, sérieusement, les chances du candidat dans la course pour la présidentielle.
Le même animateur, qui s’est forgé la sinistre réputation de “blanchisseur“ de tous les fléaux que connaît et qu’a connus le pays (terrorisme, Al Qaïda, retour des répugnants RCDistes et destouriens…), invite Slim Riahi qui est en même temps le patron d’Ettounsia Tv. Ce dernier s’est attelé à dénigrer, gratuitement, toute la classe politique, particulièrement ses concurrents. Il a qualifié, entre autres, Nidaa Tounès de «parti jetable».
Idem pour l’invitation lors de la même émission de Kamel Ennabli, candidat indépendant à la présidentielle lequel a mis à profit son passage à Ettounsia Tv pour lancer un appel à Bajbouj pour qu’il se retire de la course pour la présidentielle et se consacre à la consolidation de son parti.
Moralité: la chaîne Ettounsia était devenue une machine anti- Béji Caïd Essebsi. La chétive Haute autorité indépendance pour la communication audiovisuelle (HAICA), institution chargée de réguler, et surtout de moraliser le paysage audiovisuel, a brillé par son immobilisme, laxisme et inefficience.
Une riposte à la mesure du préjudice
Entre temps, l’équipe de Béji Caïd Essebsi n’est pas restée les bras croisés. Le Comité de soutien déclaré ou non déclaré de BCE et dont la chaîne Nessma Tv y figure en bonne place a concocté une nouvelle émission baptisée «Investigations» et a consacré la première édition à Slim Riahi avec un habillage intelligent: les mensonges des politiciens et l’argent sale.
Objectivement, l’émission était fort compromettante pour le président du Club africain. Logiquement, elle a consacré sa fin politique. Appuyée par des témoignages de victimes des fausses promesses de Slim Riahi, l’émission, qui a réalisé un des plus gros audimats, a mis à nu les pratiques mensongères de «l’homme d’affaires» et l’a montré plus «un chasseur de primes et de subventions» qu’un homme politique pouvant tenir les engagements qu’il peut prendre vis-à-vis de son électorat.
Les téléspectateurs ont été ébranlés par les témoignages accablants de citoyens originaires des gouvernorats de Siliana, du Kef, Zaghouan, lesquels ont attesté, images à l’appui, que toutes les promesses d’investissements qui leur ont été faites par Slim Riahi (usine de détergents, complexe agro-industriel, université américaine…), n’étaient que de purs mensonges. Les deux témoignages les plus poignants ont été de toute évidence ceux des parents de la petite Loujaina Zaghouani, cette fillette de quatre ans décédée en raison d’une leucémie et des jeunes disparus à Lampedusa.
Aux premiers, Slim Riahi s’était engagée, lors de la campagne électorale de 2011, à prendre en charge l’hospitalisation en France de Loujaina avant de se rétracter. Quant aux seconds, il avait promis d’affréter un avion pour assurer le retour de leurs enfants disparus en Italie, mais sa promesse n’a pas été tenue.
Lors de cette émission, Slim Riahi était simplement lynché et qualifié de «briseur de rêves» et de «bourreau de l’espoir».
Honnêtement, il faut dire qu’il l’a cherché. Car c’est sa chaîne Ettounsia Tv et ses animateurs qui ont ouvert le feu les premiers. D’où toute la signification de l’adage cité plus haut.
Par delà cette querelle médiatique qui a des relents de règlements de comptes de basse facture digne des pires maffieux politico-financiers, les thèmes qui ont été retenus pour habiller ce bras de fer, en l’occurrence l’état de santé du (probable) futur président de la République, les fausses promesses et le commerce dont font les politiques de la misère des gens intéressent à plus d’un titre les Tunisiens et méritent d’être traitées sereinement dans un meilleur contexte.