Le MRJ enfin dévoilé, premier avion civil japonais depuis un demi-siècle

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érienne ANA Shinichiro Ito (d) aux côtés du président de Mitsubishi Aircraft Teruaki Kawai (3e d) et le patron de Mitsubishi Heavy Industries Hideaki Omiya (2e d) pour le lancement du MRJ à Komaki, le 18 octobre 2014 (Photo : Toshifumi Kitamura)

[18/10/2014 15:01:07] KOMAKI (Japon) (AFP) Après maintes péripéties, le Mitsubishi Regional Jet (MRJ) est enfin sorti de l’usine, ouvrant un nouveau chapitre pour l’industrie aéronautique nippone qui n’a pas conçu d’avion civil depuis un demi-siècle.

Il a été dévoilé en grande pompe samedi à Komaki près de Nagoya (centre du Japon), en présence du vice-ministre des Transports Akihiro Nishimura.

Il faudra cependant attendre l’été 2015 pour son premier vol expérimental, et 2017 pour monter à bord, si tout va bien, avec plusieurs années de retard sur le calendrier initial.

Nombre de sièges, type de moteur, matériaux utilisés, ergonomie: Mitsubishi Aircraft, filiale dédiée du groupe d’industries lourdes Mitsubishi Heavy Industries (MHI), a dû revoir sa copie à de nombreuses reprises depuis le lancement du projet en 2008.

Car son expérience récente en la matière était de fait limitée à la fourniture de composants (bien qu’essentiels, comme les ailes) à l’avionneur américain Boeing, et à la fabrication sous licence d’appareils militaires pour l’armée nippone.

“C’est une chose de construire sous licence en se servant de formules toutes prêtes, c’en est une autre de concevoir ex nihilo un avion”, souligne un bon connaisseur du dossier, qui ne souhaite pas être cité.

“Les Japonais se sont mis pendant des années dans la peau du sous-traitant bon élève”, poursuit-il. “Ils savent faire des choses, mais à condition d’être guidés”.

Aérodynamisme, moteur de nouvelle conception, niveau de confort des passagers: le groupe ne tarit pas d’éloges sur son appareil au gabarit moyen (70 à 90 places), pour lequel il nourrit de grands espoirs.

En partie réalisé en matériaux composites, le MRJ, dont le développement a coûté environ 180 milliards de yens (1,3 milliard d’euros), est présenté par ses concepteurs comme l’aéronef techniquement le plus avancé et le plus écologique de sa catégorie.

“Il a par ailleurs une très faible consommation de carburant, ce qui réduit les coûts”, a assuré le patron de Mitsubishi Aircraft, Teruaki Kawai, lors de la cérémonie.

– ‘Résurrection’ –

Très ambitieuse, la firme veut croquer pas moins de la moitié de ce marché des avions régionaux sur les deux prochaines décennies. “Je prétends que nous pouvons en prendre 50%”, a lancé le dirigeant cette semaine dans une interview au Wall Street Journal.

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érienne ANA Shinichiro Ito (d) aux côtés du président de Mitsubishi Aircraft Teruaki Kawai (3e d) et le patron de Mitsubishi Heavy Industries Hideaki Omiya (2e d) pour le lancement du MRJ à Komaki, le 18 octobre 2014 (Photo : Toshifumi Kitamura)

Le secteur, très compétitif, est aujourd’hui dominé par le brésilien Embraer et le canadien Bombardier. Et de nouveaux acteurs frappent à la porte.

Le russe Soukhoï a ainsi mis en service en 2011 le Superjet 100, tandis que la société chinoise Comac (Commercial Aircraft Corporation of China) mise sur l’ARJ21, qui a toutefois subi lui aussi des retards en série.

La tâche s’annonce délicate pour les Japonais qui “vont arriver après, mais je pense que le MRJ trouvera sa place”, estime le même spécialiste.

Pour l’heure, le groupe a reçu des ordres d’achat fermes ou optionnels pour un total de 375 MRJ au prix catalogue de 40 millions de dollars l’unité, dont 25 par la compagnie nippone ANA, 100 par le groupe américain Trans States Holdings, 200 par son compatriote SkyWest, et 50 de diverses autres entreprises.

En outre, Japan Airlines a annoncé fin août avoir signé une lettre d’intention en vue de l’acquisition de 32 exemplaires.

Que le succès commercial soit ou non au rendez-vous, cet aéronef, même s’il n’est pas de taille à rivaliser avec les Beoing et Airbus, marque une renaissance de l’industrie aéronautique de l’archipel, mise au ban après la capitulation en 1945.

“Le made in Japan de l’aviation n’existait plus depuis le YS-11” entré en service en 1962. “La résurrection de l’industrie aéronautique nationale était mon rêve depuis des années, tout comme celui de Mitsubishi Heavy Industries, et je le crois, celui du Japon”, s’est félicité le PDG du groupe, Hideaki Omiya.

L’Etat ne s’y est pas trompé: il a financé à hauteur d’un tiers le consortium qui a donné naissance au MRJ, auquel ont participé de grandes firmes comme Toyota.

Une filiale américaine d’un autre grand nom de l’industrie japonaise, Honda, s’apprête à livrer dans quelques mois son propre avion, beaucoup plus petit cependant (cinq sièges passagers), après un premier vol réussi en juin.