ésentants des industries agroalimentaires le 23 octobre 2014 à Paris (Photo : Patrick Kovarik) |
[24/10/2014 17:01:34] Paris (AFP) Embaucher ou investir, oui; jouer à la guerre des prix ou gâter les actionnaires, non: le gouvernement a rappelé cette semaine aux entreprises les règles du jeu du Crédit d’impôt compétitivité emploi, dont l’efficacité est mise en doute par une partie de la gauche.
Le CICE qui, à plein régime, pèsera 20 milliards d’euros, doit “nécessairement servir à investir et à embaucher, et pas à augmenter les dividendes”, a rappelé le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, vendredi dans un communiqué.
La veille, il avait mis en garde contre la tentation de détourner cette manne pour nourrir la guerre des prix.
“Que dans certains cas, par exemple de concurrence internationale, les entreprises utilisent le CICE pour faire baisser les prix, ce n’est pas une mauvaise chose parce que ça les rend plus compétitives”, a-t-il dit à l’AFP.
“Les choses sont différentes lorsqu’il s’agit d’un secteur non-exportateur, qui fait pression sur les prix d?autres secteurs non-exportateurs : typiquement, les distributeurs de grands groupes et la filière agro-alimentaire. Il s’agit alors d’un dysfonctionnement”, a-t-il estimé.
Le ministre des Finances, Michel Sapin, a enfoncé le clou vendredi lors d’une visite en région parisienne à l’entreprise ATF Gaïa, qui revalorise des équipements informatiques et téléphoniques avec 77 salariés, pour la plupart des travailleurs handicapés.
“Le meilleur moyen de pérenniser le CICE c’est que vous en fassiez le meilleur usage”, a-t-il dit à plusieurs chefs d’entreprises.
“Vous avez vos responsabilités. Personne ne va décider à la place d’un chef d’entreprise, ce n’est pas +Tintin chez les Soviets+”, a encore lancé le ministre.
– “Le CICE ça marche” –
Jeudi, le Premier ministre Manuel Valls a pour sa part martelé que “le CICE ça marche”.
érence de presse le 8 septembre 2014 à Lille (Photo : Philippe Huguen) |
Cette offensive gouvernementale répond à la mise en doute de l’efficacité du CICE par une partie de la gauche, Martine Aubry en tête, alors que la croissance ne redémarre pas en France et que le chômage a atteint un nouveau record en septembre, selon les chiffres parus vendredi.
La maire de Lille, dans une interview au Journal du dimanche, a suggéré de “fusionner le CICE avec le Crédit d’impôt recherche”, une niche fiscale portant sur les dépenses de recherche et les investissement des entreprises.
L’un de ses proches, l’ex-ministre et député PS François Lamy, a lui jugé qu’il faudrait verser le CICE “en fonction des entreprises qui investissent, innovent, font des formations pour leurs salariés, travaillent sur l’avenir, plutôt que d’arroser et finalement avoir peu de résultats”.
Le CICE est calculé en fonction des salaires versés, à condition qu’ils ne dépassent pas 2,5 fois le Smic (c’est-à-dire 3.613,45 euros brut par mois en 2014). Son montant, 4% des rémunérations brutes versées en 2013, passera à 6% l’an prochain.
Pour Eric Heyer, économiste de l’OFCE, centre de recherches marqué à gauche, il était “prévisible” que le CICE, que les entreprises n’ont commencé à toucher que cette année, ne produise pas immédiatement d’effets spectaculaires: “une mesure sur les entreprises met toujours plus de temps à agir qu’une mesure sur les ménages”.
M. Heyer juge toutefois que le dispositif aurait pu être mieux calibré: “il aurait fallu tout cibler sur les plus bas salaires” pour susciter des embauches massives et par ailleurs cibler les dépenses d’investissement, en s’inspirant du CIR.
– Limiter la casse sociale –
Pour Olivier Passet, économiste de la société Xerfi, dans la phase de ralentissement brusque que connaît la zone euro, le CICE “se transforme en amortisseur de salaires, en instrument de défense” et permet “de limiter énormément la casse” sociale, mais perd de vue son objectif de compétitivité.
“Cela permet à l’industrie française d’amortir mieux que l’industrie allemande”, juge-t-il.
ée Nationale le 22 octobre 2014 (Photo : Eric Feferberg) |
Un autre reproche fait au CICE est que cette gigantesque niche fiscale rend encore un peu plus complexe la structure des prélèvements obligatoires sur les entreprises.
Début octobre, un rapport parlementaire estimait qu’une “réflexion devrait être engagée” pour le transformer en allègement de charges pur et simple.
“C’est une perspective possible”, a dit vendredi M. Sapin, qui a toutefois estimé que dans un futur proche il fallait plutôt “de la stabilité”.