à Moscou, le 13 octobre 2014 (Photo : Kirill Kudryavtsev) |
[05/11/2014 12:51:15] Moscou (AFP) Le rouble a plongé mercredi à de nouveaux records historiques de faiblesse, la banque centrale ayant prévenu qu’elle limiterait désormais ses interventions destinées à enrayer l’effondrement de la monnaie russe, plombée par la crise ukrainienne.
L’euro est monté jusque 56,36 roubles et le dollar jusque 44,98 roubles en début de séance, des niveaux jamais vus, puis le rouble s’est un peu repris.
La monnaie russe a perdu près du quart de sa valeur depuis le début de l’année sur fond de crise ukrainienne et de sanctions occidentales de plus en plus dures contre l’économie russe, à l’origine de fuites massives de capitaux du pays.
Le phénomène dope l’inflation (déjà à plus de 8%), première préoccupation des ménages touchés de plus en plus durement, sans pour autant affecter la popularité du président Vladimir Poutine (88% d’opinion favorable selon le centre Levada).
Sous pression, la Banque de Russie a opéré des interventions de plusieurs milliards de dollars pour défendre le rouble, tout en affirmant qu’elle continuait de faire évoluer sa politique en direction d’une évolution de plus en plus libre du taux de changes, actuellement encadré.
Mercredi, la banque centrale a annoncé dans un communiqué qu’elle limiterait dorénavant ses interventions à 350 millions de dollars par jour et renonçait ainsi à ses ventes de devises “illimitées” en vue d’éviter “les stratégies spéculatives contre le rouble”. Elle assure cependant qu’elle ira plus loin en cas de “menace pour la stabilité financière”.
A titre de comparaison, ses interventions ont atteint sur la seule journée de jeudi dernier environ 2,5 milliards de dollars.
Malgré le décrochage du rouble après ces annonces, l’économiste Neil Shearing, de Capital Economics, a jugé que cette décision permettait de “réduire le risque que la chute du rouble ne se transforme en crise monétaire s’alimentant elle-même”.
Selon lui, elle répond en partie aux spéculations du marché concernant l’évolution de la politique de la banque centrale vers un taux de changes fixé par le marché.
La Banque de Russie tente de freiner l’hémorragie en resserrant le robinet du crédit et a frappé fort vendredi en relevant de 1,5 point son taux directeur, sans parvenir à enrayer le phénomène.
La plupart des économistes jugeaient une hausse des taux, la quatrième cette année, nécessaire pour signifier aux investisseurs qu’elle ne laissait pas le rouble s’écrouler sans rien faire, alors que le sujet inquiète de plus en plus les ménages.
Cependant, de nombreux experts se montrent sceptiques quant à l’efficacité de telles mesures, expliquant que la situation actuelle n’a pas grand chose à voir avec la politique monétaire mais dépend de la situation géopolitique, c’est à dire des sanctions occidentales et de l’embargo alimentaire décrété par Moscou en réponse.
Ces décisions sont aussi critiquées par certains responsables publics qui craignent qu’en réduisant l’accès au crédit, la banque centrale ne fragilise encore davantage une économie au bord de la récession en raison des sanctions et de la chute des cours du pétrole.
“A moins d’un miracle, nous devons nous attendre à de mauvaises surprises pendant les fêtes”, a estimé mercredi sur son blog l’opposant Alexeï Navalny, prévenant que les sanctions n’affecteraient pas seulement “les amateurs de parmesan ou d’huîtres” sous le coup de l’embargo alimentaire.
“Il faudra bien alors se rendre compte que le nouveau téléphone portable que vous achetez pour votre enfant à l’étranger est vendu en dollars”, a-t-il ajouté.