Banques : des milliards de provisions pour litiges gâchent les résultats

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Des agences bancaires dans une rue du centre-ville de Rennes le 12 septembre 2011 (Photo : Damien Meyer)

[08/11/2014 22:14:10] Londres (AFP) Et toi, tu vas payer combien? Les résultats des banques se transforment en litanie de provisions enregistrées face à des litiges en cascade, à propos de manipulations du marché des changes, de ventes forcées de produits financiers ou de soupçons d’évasion fiscale.

HSBC, UBS, Deutsche Bank, JPMorgan… les grands noms de la finance ont publié leurs comptes trimestriels ces derniers jours. Au-delà des couplets divers de leurs affaires commerciales, leurs démêlés avec les autorités de régulation sont revenus comme un refrain lancinant.

On ne parle pas ici de menue monnaie: les banques inscrivent dans leurs comptes des dépenses à venir équivalentes à des centaines de millions d’euros, voire davantage, pour éviter des poursuites judiciaires, régler des amendes, indemniser des clients.

Cette multiplication des litiges est liée “à la volonté des autorités d’être un peu plus fermes après les errements du secteur bancaire. Cela passe par la réglementation Bâle III, mais aussi par une attention particulière aux manières de fonctionner au quotidien des banques”, explique Christopher Dembick, économiste chez Saxo Bank.

Parmi ces procédures, l’affaire des manipulations du marché des changes mobilise des enquêteurs de plusieurs pays. Ils soupçonnent une entente illicite entre des cambistes, qui se seraient concertés afin d’influencer en leur faveur le taux de référence quotidien.

Sur ce marché gigantesque – 5.300 milliards de dollars de transactions par jour -, la moindre entorse aux règles de bonne conduite engendre un effet boule de neige financier.

D’après des sources proches du dossier, six banques -les britanniques Barclays, Royal Bank of Scotland (RBS) et HSBC, les américaines Citigroup et JPMorgan et la suisse UBS- négocieraient le montant de leurs pénalités avec les autorités américaines, mais aussi britanniques – en pointe sur ce dossier puisque 40% des échanges de devises transitent par la City de Londres.

L’agence Dow Jones Newswires a affirmé vendredi que ces régulateurs pourraient annoncer simultanément le montant des indemnités imposées aux banques d’ici une à deux semaines.

Les trois britanniques et JPMorgan ont précisé le montant des fonds mis de côté dans cette optique – de 378 millions de dollars pour HSBC à un milliard de dollars pour JPMorgan, qui est de surcroît menacée de poursuites pénales aux Etats-Unis.

– Optimisation fiscale –

Citigroup a réévalué de son côté à la baisse son bénéfice net du troisième trimestre -un rétropédalage plutôt rare- en intégrant de nouvelles provisions de 600 millions de dollars “au sujet de contentieux déjà connus”, sans préciser.

UBS a annoncé pour sa part avoir mis de côté dans le même temps 1,8 milliard de francs suisses (1,5 milliard d’euros) pour couvrir une série de litiges et questions réglementaires, l’Allemand Deutsche Bank faisant de même pour 894 millions d’euros.

Car la liste des problèmes juridiques est loin de se limiter aux irrégularités sur le marché des changes. Le scandale préalable des manipulations du taux interbancaire Libor n’est d’abord pas clos: plusieurs établissements, dont Deutsche Bank, seraient proches d’un compromis au Royaume-Uni pour solder des litiges liés à cette affaire qui a déjà vu sept autres groupes financiers sanctionnés.

Aux États-Unis, ces disputes en pagaille interviennent alors que les banques tournent à peine la page des contentieux liés aux crédits immobiliers “subprime”, qui ont valu par exemple une amende de 13 milliards de dollars à JPMorgan.

Au Royaume-Uni, les établissements traînent comme un boulet la vente forcée d’assurances crédit dites PPI (“Payment Protection Insurance”), une affaire qui a conduit la seule Lloyds à provisionner la somme faramineuse de 11,3 milliards de livres (14,5 milliards d’euros).

Le tout au moment où les administrations fiscales européennes élargissent leurs recherches sur d’éventuels soutiens apportés par de grandes banques internationales à l’optimisation fiscale de clients, via des produits boursiers complexes.

Dans ces conditions, certains banquiers dénoncent un acharnement et M. Dembick remarque qu’il “est plus simple de ponctionner une banque que d’augmenter les impôts, or les finances publiques sont en difficulté dans de nombreux pays”. Il ajoute toutefois que “les banques ont largement les moyens d’encaisser de tels montants, y compris pour les amendes américaines qui sont extrêmement élevées”.

Avec une régulation désormais plus stricte, ces affaires devraient être terminées dans un ou deux ans, prévoit l’expert.