Menacé de grèves pour Noël, Amazon ouvre ses portes en Allemagne

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épare des colis au centre de tri de Brieselang, le 11 novembre 2014 en Allemagne (Photo : John MacDougall)

[12/11/2014 12:03:48] Brieselang (Allemagne) (AFP) Embourbé depuis plus d’un an dans un conflit salarial et menacé de nouvelles grèves avant Noël, Amazon a répondu aux critiques en ouvrant tout grand cette semaine les portes d’un de ses sites allemands.

Le géant américain du commerce en ligne, très critiqué en Allemagne, a accueilli la presse sur son site de Brieselang, dernier né de ses neuf centres de tri allemands. Implanté dans une région sinistrée économiquement à 50 kilomètres de Berlin, c’est tout sauf un foyer de contestation sociale.

“C’est une offensive de charme dont Amazon a besoin en ce moment”, réagit pour l’AFP Heiner Reimann, en charge de la distribution chez Verdi, syndicat des services.

L’organisation s’oppose à Amazon depuis le printemps 2013 à coups de grèves à répétition, concentrées sur certains sites du groupe.

Les derniers débrayages ont eu lieu fin octobre, d’autres sont prévus en décembre. La période de Noël est cruciale pour le groupe, qui emploie 9.000 salariés dans le pays, auxquels s’ajoutent chaque fin d’année plus de 10.000 saisonniers.

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êt à être expédié sur un tapis roulant au centre de tri de Brieselang, le 11 novembre 2014 en Allemagne (Photo : John MacDougall)

Les salaires sont au c?ur du conflit. Amazon paie les employés de ses centres entre 9,75 et 10,69 euros bruts de l’heure, selon la convention du secteur logistique. Verdi réclame un alignement sur les règles de la distribution, soit environ deux euros supplémentaires par heure.

“Cette convention recouvre la plupart des tâches chez Amazon – sortir les produits des étagères, emballer les paquets – et Amazon se décrit lui-même comme un commerçant de détail, pas comme un leader mondial de la logistique”, pointe M. Reimann.

“Nous sommes clairement une entreprise de logistique”, rétorque Karsten Müller, ex-militaire trentenaire qui dirige le centre de Brieselang et son millier de salariés, dont une majorité d’intérimaires.

Livres, ordinateurs et aspirateurs s’y côtoient sur plus de 65.000 m2. Destination l’Allemagne et toute l’Europe, notamment la Pologne toute proche.

Verdi est représenté au comité d’entreprise, mais aucune grève n’a jamais eu lieu ici. Les centres de Leipzig (est), Bad Hersfeld (ouest) et quelques autres sont habitués aux pics de protestation.

“Mon salaire est meilleur ici que dans les autres entreprises de logistique où j’ai travaillé”, explique Jamel Ben Ayed, qui s’affaire sur une ligne d’emballage.

Sous contrat saisonnier, ce Tunisien ne voit “pas de raison” de faire grève. A 47 ans, il espère obtenir un CDI après Noël.

– Culture de la performance –

Les contrats à temps plein ouvrent l’accès aux primes, et au bout de deux ans, aux actions Amazon.

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Amazon au centre de tri de Brieselang, le 11 novembre 2014 en Allemagne (Photo : John MacDougall)

Avec ces rémunérations, les salaires du groupe “se situent dans la partie haute du secteur logistique”, souligne Karsten Müller.

“Beaucoup de gens de la région étaient au chômage avant de travailler ici. Faire grève n’est pas pour eux une priorité”, concède un porte-parole d’Amazon.

Les bémols restent courtois sous la lumière des néons. “Amazon est une entreprise américaine, avec une autre culture. Il faut prendre cela en compte”, suggère Karl-Heinz Boettcher, ex-horloger de 60 ans.

Verdi reproche à Amazon une “pression très haute sur la performance” et une “surveillance totale du travail individuel”, explique Heiner Reimann. A Brieselang, les objectifs de production sont fixés pour l’ensemble du site et non pour chaque travailleur, rétorque la direction.

Au-delà de ce conflit, la réputation d’Amazon a été mise à mal ces derniers temps en Allemagne.

L’américain a fait les frais début 2013 d’un reportage de la chaîne publique ARD, dénonçant les agissements d’une société de surveillance employée par Amazon, qui flirtait avec l’extrême-droite. Amazon a résilié son contrat avec ce prestataire.

Le poids écrasant du groupe dans le distribution de livres fait aussi débat dans le monde allemand de l’édition, comme dans de nombreux pays, sur fond de bras de fer sur le prix des e-books, notamment avec le scandinave Bonnier, très implanté en Allemagne.

Ces polémiques ruissellent sur le géant du commerce en ligne. Les Allemands commandent toujours allègrement et le conflit avec Verdi n’aura, comme l’an dernier, “aucun impact sur les livraisons de Noël”, promet Amazon.