Pêche du thon rouge : ONG et pêcheurs suspendus au nouveau quota

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éditerranée (Photo : Eric Cabanis)

[17/11/2014 14:03:46] Gênes (Italie) (AFP) Pris entre enjeux économiques et préservation de la ressource, les pays pêcheurs de thon rouge doivent annoncer lundi un nouveau quota de pêche annuel dans l’Atlantique Est et en Méditerranée du précieux poisson dont les stocks étaient encore au plus bas il y a moins de dix ans.

Réunis à Gênes depuis une semaine, ils ont travaillé sur un projet de recommandation de l’Union européenne, qui propose d’augmenter le strict quota actuel d’environ 20% par an pendant trois ans. L’autorisation passerait de 13.500 tonnes en 2014 à 23.155 en 2017.

La recommandation, amendée jusque tard dimanche soir, promet un suivi scientifique du stock, avec la volonté dans l’immédiat de maintenir un quota “en-deçà du niveau des estimations les plus prudentes”, dit le texte. Ce quota serait revu chaque année, “sur avis du comité scientifique” de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (Cicta).

Au terme d’une semaine de tractations à huis clos, plusieurs centaines de délégués et participants à la réunion de cette organisation inter-gouvernementale se sont retrouvés lundi matin pour débattre à nouveau de cet enjeu. Une séance plénière devait se tenir dans l’après-midi, pour l’annonce d’une décision traditionnellement adoptée par consensus. A moins qu’un Etat ne fasse objection ou demande un vote.

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êche du thon rouge en marge du festival de Cannes, le 15 mai 2010 à Cannes (Photo : Loic Venance)

Car la pression est forte depuis que le comité scientifique de la Cicta a annoncé un retour spectaculaire du thon rouge. Ce poisson a été victime de la surpêche dans les années 1990-2000 avant que l’établissement en 2007 d’un quota et de mesures de régulation draconiennes ne commence à reconstituer le plus gros stock de thon rouge au monde, formé de poissons naviguant entre la Méditerranée et l’Atlantique Est.

Selon cette étude, le stock de reproducteurs était estimé à 585.000 tonnes en 2013 (contre 150.000 en 2008). Les scientifiques, qui ne peuvent cependant préciser s’il est reconstitué ou en passe de l’être, soulignent simplement qu’une hausse “progressive et modérée” du quota ne devrait pas remettre en cause le programme de reconstitution prévu sur 15 ans.

– Nouvelle phase –

“Nous avons été contraints de faire des efforts, et ça a été une bonne chose. Aujourd’hui que le poisson est de retour, il n’y a pas de raison de ne pas améliorer le quota”, estime Bertrand Wendling, de l’organisation de pêcheurs français SaThoAn. Il se dit confiant dans l’adoption de la proposition européenne, tout en prônant le maintien de contrôles, garants d’une protection des pêcheurs contre une concurrence illégale et de prix soutenus.

Les 49 membres de la Cicta (bien 49, UE + 48 pays dont le Japon, les Etats-Unis) devraient aussi se prononcer sur la répartition du quota, relativement stable ces dernières années (59,2% pour l’UE, suivie du Maroc, Japon, Tunisie, Libye). Un autre sujet épineux car plusieurs pays méditerranéens voudraient la voir révisée.

“Pour nous, l’important est la conservation de l’espèce”, commente Sergi Tudela du WWF, qui demande une hausse très graduelle. “20% par an pendant trois ans, c’est 72% sur trois ans, ce n’est ni +progressif+ ni +modéré+”, estime l’ONG Pew Environment.

“C’est une nouvelle phase” qui s’ouvre pour la Cicta, ajoute M. Tudela, qui veut croire que l’organisation ne reviendra pas en arrière, alors que le “thunnus thynnus”, ce géant migrateur à la chair si prisée des Japonais, avait été à deux doigts d’être classé espèce menacée par l’Onu.

Lundi, la Cicta devrait aussi fixer le quota de pêche au thon rouge dans l’ouest de l’Atlantique, limité (1.750 T en 2014) depuis la chute des stocks dès les années 70 et l’adoption en 1998 d’un programme de rétablissement sur 20 ans. Le sujet intéresse notamment les Etats-Unis, le Canada, le Japon.

Les ONG attendent aussi des avancées sur l’espadon, dont la situation “ne va pas dans le bon sens”, selon les scientifiques. Elles demandent à nouveau à la Cicta d’interdire la découpe en mer des ailerons de requins.

La pêche du thon tropical, le plus consommé au monde, est aussi sur la table, les pêcheurs français souhaitant un encadrement des “dispositifs de concentration de poissons”. Une technique qui piège les poissons sans distinction de taille ni d’espèce, très utilisée notamment par les Espagnols.