êche au sud de Malte, le 26 mai 2010 (Photo : Andreas Solaro) |
[19/11/2014 19:29:02] Paris (AFP) Organiser une pêche qui protège mer et poissons, tout en faisant vivre les pêcheurs: la question a réuni mercredi professionnels et scientifiques à Paris, sur fond de critiques des ONG, en pleine élaboration de la stratégie gouvernementale pour le secteur.
Pêcheurs, mareyeurs, chercheurs, ainsi que représentants de la Commission européenne et de la FAO participaient au forum organisé mercredi et jeudi par France Filière Pêche (FFP), association interprofessionnelle financée par la grande distribution, soit 400 participants au total.
Objectif: “exposer les démarches de progrès engagées, dans une attitude ouverte et constructive”, a expliqué en prologue Gérard Higuinen, président de France Filière Pêche.
La pêche française génère un milliard d’euros de ventes par an, pour 18.000 marins.
“On ne parle pas assez de l’importance économique de la pêche et des efforts faits par les pêcheurs, par exemple sur la restructuration des flottes”, regrette-t-il.
Il y a eu “d’énormes progrès” dans la réduction des surcapacités de pêche en Europe, confirme Marc Taconet, expert statistique de la FAO, branche des Nations unies pour l’alimentation.
Au sein de l’UE, “la majorité des stocks de poissons sont désormais pêchés durablement. En parallèle, les revenus des pêcheurs ont augmenté”, souligne Bernhard Friess, de la direction générale des pêches à la Commission européenne.
Les pêcheurs collaborent désormais avec les scientifiques pour mettre au point des bateaux plus économes en carburant, des chaluts plus sélectifs qui laissent s’échapper les poissons non désirés, et pour évaluer la santé des stocks de poisson.
Des chercheurs embarquent comme observateurs sur des navires de pêche, un geste impensable il y a 20 ans.
Cette amélioration des rapports était “nécessaire, car il faut reconnaître que pendant une période, on a pêché sans savoir ce qui se passait” sous la mer, note François Jacq, PDG de l’Ifremer.
Pour les pêcheurs, confrontés au changement climatique, à la raréfaction de certains stocks et à l’augmentation de la demande mondiale, “jamais les défis n’ont été aussi durs qu’aujourd’hui et nous avons besoin de l’expertise scientifique”, notamment lors des négociations des quotas de pêche, reconnaît Gérard Romiti, président du Comité national des pêches.
– ‘Renard dans le poulailler’ –
Mais avec les écologistes, les relations restent beaucoup plus conflictuelles.
Plusieurs dizaines de représentants d’ONG ont d’ailleurs manifesté en marge du forum pour demander l’interdiction de la pêche en eaux profondes, certains déguisés en poulpes ou en requins, espèces menacées par cette technique selon eux.
Le directeur général du Comité national des pêches, Hubert Carré, s’est dit “contre une interdiction” mais favorable à “un encadrement plus strict”.
“Nous avons la volonté de travailler ensemble”, assure pourtant Denez L’Hostis, président de France Nature Environnement.
Seul environnementaliste présent à la table ronde, il regrette d’être parfois “esseulé” sur des combats qui pourraient être menés de front avec les pêcheurs, comme les problèmes de draguage des ports ou de contamination des poissons par des polluants venant des industries terrestres.
Une main tendue que le représentant des pêcheurs Gérard Romiti hésite à prendre, de crainte de “mettre le renard dans le poulailler”. “Donnez-nous 50% de solutions et 50% de dénonciations”, apostrophe-t-il.
Face à ces interrogations sur la pêche de demain, le secteur surveille de près la répartition des fonds alloués par Bruxelles à la France pour la période 2014-2020, près de 600 millions d’euros.
Après une “année blanche” en 2014, due aux négociations sur la répartition des différentes enveloppes, notamment entre les régions, la mise en oeuvre concrète des financements sera la “priorité des prochaines semaines”, a promis mercredi le secrétaire d’Etat à la Pêche, Alain Vidalies.
Un “chantier lourd”, a-t-il précisé, qui reviendra à “définir la stratégie pour la pêche française et l’aquaculture à l’horizon 2020”, dans un pays qui possède le deuxième domaine maritime du monde mais importe la majorité de sa consommation de produits aquatiques.