Travail des cheminots : la grenade de 2015 pour la SNCF

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à Paris, le 24 septembre 2014 (Photo : Eric Piermont)

[20/11/2014 12:35:32] Paris (AFP) La grenade des règles de travail des cheminots (durée, repos …) sera dégoupillée en 2015 mais déjà la pression monte à la SNCF où les syndicats veulent que le privé s’aligne sur les conditions du groupe public, et non l’inverse.

“Tout le monde doit être logé à la même enseigne” lors de l’ouverture totale à la concurrence, en 2019 des lignes nationales, en 2022 du réseau régional, s’accordent à dire les différents acteurs: gouvernement, SNCF, entreprises privées, syndicats.

Mais où poser les curseurs de l’harmonisation? Les appréciations divergent.

A la SNCF, même les syndicats réformistes ont déjà sorti les griffes: “On ne négociera pas sur des règles moins-disantes socialement”, a prévenu Roger Dillenseger (Unsa, deuxième organisation).

Côté patronal, l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP), dont la SNCF est un adhérent de poids, prône une règlementation suffisamment souple pour préserver des “modèles économiques différents”, alors que le transport ferré de voyageurs, concurrencé par d’autres modes de transport, peine à être rentable.

A l’occasion de son regroupement au 1er janvier avec Réseau ferré de France (RFF), la SNCF pousse aussi à un grand toilettage pour réduire ses coûts et améliorer sa compétitivité. Et pense y parvenir en remodelant l’organisation du travail.

La réglementation maison (amplitude des journées, coupures, jours de repos…) est plus stricte que celle des opérateurs privés partis depuis plusieurs années déjà à l’assaut du marché du fret, et pèse sur la productivité du groupe public ferroviaire.

La direction a annoncé aux syndicats une négociation en 2015 sur “l’organisation de la durée du travail”. Et les a prévenus qu’elle sonderait aussi directement sur le sujet les agents et cadres de terrain.

Elle a aussi semé un début d’émoi en affirmant, selon plusieurs syndicats, que l’accord de 1999 sur les 35 heures était juridiquement caduque et devait être rediscuté.

Pour Gilbert Garrel, patron de la CGT-Cheminots (premier syndicat), la direction “ne cache plus que le financement du système ferroviaire comme celui des intérêts de la dette se feront sur le dos des cheminots via l’emploi, les salaires, les conditions de travail, la polyvalence professionnelle, et donc le statut”.

– 30% d’écart dans le fret –

L’harmonisation des règles de travail des 160.000 travailleurs du rail (à plus de 95% à la SNCF) n’entamera pas le statut des cheminots, ont toujours assuré le gouvernement et l’entreprise.

La réforme ferroviaire votée à l’été 2014 donne jusqu’à mi-2016 aux partenaires sociaux pour y parvenir.

Le cadre social, discuté à plusieurs niveaux, doit d’abord être planté par un décret-socle du gouvernement fixant les principales règles, au regard notamment des contraintes de sécurité. Puis complété par une convention collective commune à la branche ferroviaire, et d’éventuels accords d’entreprise.

Au niveau de la branche, le sujet de l’organisation du travail ne sera mis sur la table qu’au deuxième semestre 2015.

Mais une étude commandée par le patronat, dévoilée cette semaine par la publication spécialisée La vie du rail, a déjà jeté un premier pavé dans la mare.

Cette étude, “pas totalement terminée”, doit permettre “d’objectiver les choses”, a expliqué à l’AFP Claude Faucher, délégué général de l’UTP.

Entre public et privé, elle conclut à des écarts “significatifs” pour les personnels roulants du fret, où si la SNCF appliquait les règles du privé, elle pourrait économiser 30% des effectifs. Dans le transport voyageurs, la simulation montre “des écarts moins marqués”, de l’ordre de 18%.

Dans les deux cas, les écarts y sont expliqués notamment par la différence des règles de repos et les 22 jours de RTT dont bénéficient les salariés de la SNCF, et pas les autres.

“On est très attentifs à ce type de parution” et si la SNCF s’appuie dessus pour “remettre en cause les 35 heures, elle trouvera du monde en face”, promet M. Dillenseger (Unsa).

Le sujet, explosif, ressoudera-t-il les syndicats? Depuis la grève de juin menée par la CGT et SUD contre la réforme, le climat est délétère, notamment entre l’Unsa et la CGT. Avec des échanges salés où les accusations d'”affabulateurs” répondent à celles de “collabos”.