implante en Lorraine (Photo : Saul Loeb) |
[23/11/2014 12:01:15] Metz (AFP) Une filière aéronautique en Lorraine? Il y a quelques années encore, l’idée pouvait faire sourire. Mais avec l’arrivée de l’usine Safran-Albany à Commercy (Meuse), qui sera inaugurée lundi par François Hollande, le secteur régional espère monter en puissance.
L’implantation de cette usine d’aubes et carters pour moteurs d’avions nouvelle génération LEAP, qui promet 400 emplois directs d’ici 2018 à Commercy, est “surtout déterminante en termes d’image”, estime Thierry Jean, président d’Aériades, un réseau de sous-traitants, de centres techniques et de recherche dans le secteur aéronautique en Lorraine.
Car la filière aéronautique lorraine “se bat encore pour être visible”, le secteur ayant longtemps évité le Grand Est pour des raisons stratégiques, en raison de sa proximité avec l’Allemagne, l’ennemi héréditaire d’alors, puis de la Guerre froide, rappelle M. Jean.
Mais le secteur a progressivement émergé dans la région à partir des années 1970-80, quand des entreprises métallurgiques et mécaniques locales ont cherché de nouveaux débouchés face au déclin amorcé de la sidérurgie.
Créé en 2003 et membre du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) depuis 2005, Aériades regroupe aujourd’hui une trentaine d’entreprises représentant 2.400 salariés et totalisant un chiffre d’affaires de plus de 300 millions d’euros, dont la moitié dans l’aéronautique, l’aérospatial et la défense.
C’est peu par rapport aux 48 milliards d’euros de chiffre d’affaires du secteur en France en 2013, selon les chiffres du Gifas. Mais les voyants sont au vert pour une croissance accélérée du secteur en Lorraine dans les années à venir, estiment les acteurs de la filière régionale et les élus locaux.
“En 5 ans on a doublé de 8 à 16 le nombre d’entreprises en Lorraine certifiées EN9100”, une norme européenne de référence dans l’aéronautique, cruciale pour obtenir des commandes des grands donneurs d’ordre. “On fait de moins en moins sourire”, se satisfait M. Jean.
– Oublier l’échec du Skylander –
A Commercy, le maire Jérôme Lefèvre (sans étiquette) voit l’arrivée de Safran-Albany comme une “locomotive” et prévoit l’arrivée de sous-traitants dans son sillage. Grâce notamment à cette usine, qui a ouvert ses portes au printemps et qui compte déjà plus de 90 salariés, “Commercy est en plein boom économique”, se félicite-t-il.
Dans le réseau Aériades figurent surtout des PME, mais aussi quelques grandes entreprises comme Leach International Europe, filiale du groupe américain Esterline basée à Sarralbe (Moselle), qui fabrique des installations électriques pour la gamme Airbus notamment, ou encore SLCA, filiale d’Aircelle (groupe Safran) à Florange, qui conçoit et produit des aérostructures composites.
“On a en Lorraine des technologies qui correspondent à la demande du marché, et on est capables d’innover”, assure Didier Pouchèle, directeur de GMT France, basé à Florange, une filiale commerciale, de service et de contrôle du groupe allemand éponyme qui produit des systèmes mécaniques diminuant bruits et vibrations, notamment pour les avions.
La venue d’un grand donneur d’ordres comme Safran-Albany “peut favoriser des contacts et des engagements pour le soutien à l’industrie aéronautique et militaire, car c’est là qu’on péchait un petit peu” dans l’est de la France, estime Xavier Lucas, directeur commercial de Cimulec, un groupe fabriquant en Moselle des circuits imprimés haute technologie, essentiellement pour la défense, avec des clients comme Thales, Dassault ou EADS.
Faute de soutiens industriels et financiers suffisants, le programme Skylander, un avion tout-terrain “made in Lorraine”, avait ainsi été liquidé en 2013.
La région Lorraine, qui avait soutenu le projet à hauteur de 21 millions d’euros, se bat désormais à coups de procédures judiciaires pour retrouver une partie de son argent. Seuls 4 millions d’euros ont été récupérés jusqu’à présent.
Avec Safran-Albany, le président de la région Jean-Pierre Masseret (PS) se montre beaucoup plus confiant car “le moteur d’avion LEAP, c’est 35 à 40 ans de vie”, souligne-t-il.
Pour accompagner cette installation et faciliter un recrutement local, la région Lorraine met en place un centre de compétences aérocomposites à Commercy, “une offre de formation unique en France”, selon M. Masseret.