Brésil : Rousseff nomme une équipe économique taillée pour l’austérité

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ésidente brésilienne Dilma Rousseff à Brasilia le 20 novembre 2014 (Photo : Evaristo Sa)

[27/11/2014 20:30:37] Brasilia (AFP) La présidente brésilienne Dilma Rousseff a nommé jeudi une nouvelle équipe économique au profil orthodoxe qui s’est engagée à mener une politique de rigueur budgétaire pour enrayer la dérive des finances publiques et regagner les confiance des marchés.

La présidente de gauche du géant émergent d’Amérique latine, réélue de peu à un second mandat le 26 octobre, a nommé au ministère des Finances Joaquim Levy, un économiste rigoureux et apprécié des marchés qui dirigeait depuis 2010 une branche de la banque privée Bradesco.

M. Levy aura la lourde tâche de relancer l’économie en panne du géant émergent d’Amérique latine, qui devrait enregistrer une croissance presque nulle en 2014, alors que l’inflation est sortie des clous, et que les finances publiques se dégradent à vitesse accélérée, faisant peser la menace sérieuse d’une dégradation de la note souveraine du Brésil en 2015 par les agences de notations internationales.

Mme Rousseff a nommé au ministère de la Planification Nelson Barbosa, 45 ans, qui avait été secrétaire exécutif du ministère des Finances de 2011 à 2013.

Elle a reconduit dans ses fonctions le président de la Banque centrale, Alexandre Tombini, 50 ans, en poste depuis 2011, avec l’objectif de ramener l’inflation à 4,5% ces prochaines années, dans le milieu de la fourchette officielle.

Lors d’une conférence de presse commune à Brasilia, ce triumvirat économique a promis de rééquilibrer les finances publiques en taillant dans les dépenses publiques et de lutter activement contre l’inflation.

M. Levy a notamment fixé un objectif d’excédent budgétaire primaire (économie pour le paiement des intérêts de la dette publique) de 1,2% du PIB pour 2015 et à “pas moins de 2%” pour 2016-2017, lors d’une conférence de presse à Brasilia.

“Cet objectif est fondamental” pour relancer la croissance, a-t-il souligne à la veille de la publication des résultats du Produit intérieur brut au troisième trimestre.

Selon la plupart des analystes financiers, le Brésil devrait sortir mollement de la récession technique des six derniers mois (-0,2% au premier trimestre, -0,6% au 2e trimestre).

Les actuels titulaires des Finances, Guido Mantega, et de la Planification Miriam Belchior, resteront en fonction “jusqu’à ce que soit conclue la transition et la formation des nouvelles équipes de leurs successeurs”, selon un communiqué de la présidence.

Selon des informations de presse les nouveaux ministres travailleront au siège de la présidence dans un bureau contigu à celui de Mme Rousseff.

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ésilien Joaquim Levy à Brasilia le 27 novembre 2014 (Photo : Evaristo Sa)

Joaquim Levy a la faveur des marchés brésiliens, qui ont pris en grippe Dilma Rousseff ces derniers mois en raison de ses choix contestés et de son interventionnisme.

Le quotidien Folha de Sao Paulo le décrit comme “accroc au travail et sincère à la limite de la grossièreté” et “aussi buté que Dilma” Rousseff.

M. Levy a occupé par le passé plusieurs fonctions importantes au sein du gouvernement brésilien, oeuvrant activement au renforcement des équilibres macro-économiques.

Il avait été notamment secrétaire au Trésor sous le premier mandat du président Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010), un ancien ouvrier et dirigeant syndical qui avait nommé une équipe économique orthodoxe pour apaiser les craintes des marchés après son élection.

La rigueur budgétaire de M.Levy lui a valu le surnom de “Levy aux mains d’argent”, par comparaison avec le personnage du film “Edward aux mains d’argent” qui est doté de ciseaux à la place des mains.

“C’est un nom excellent. Il est considéré comme austère et rigoureux. Sa nomination envoie le signal de probables ajustements budgétaires”, a commenté pour l’AFP l’économiste de TAG Investimentos, André Leite.

– ‘La CIA au KGB’ –

“Sa trajectoire, y compris au sein du premier gouvernement de Lula inspire beaucoup de confiance”, a abondé Margarita Guitierrez, professeur d’économie à l?université UERJ de Rio.

Après sa réélection, Dilma Rousseff avait promis de “faire les devoirs” en procédant à un ajustement budgétaire jamais évoqué pendant la campagne électorale.

Son adversaire malheureux, le social-démocrate Aecio Neves, qui promettait un “choc de gestion”, a ironisé sur le choix de M. Levy, estimant que cela revenait à nommer “un cadre de la CIA à la tête du KGB”.

Cette nomination fait grincer des dents l’aile gauche du Parti des Travailleurs (PT au pouvoir) et le Mouvemement des Sans Terre (MST), qui dénoncent un retour en arrière et craignent des coupes dans les programmes sociaux.

La nomination de la nouvelle équipe était attendue depuis plusieurs jours et a été retardée, selon la presse, parce que le gouvernement souhaitait auparavant faire voter par le Parlement une mesure controversée revoyant à la baisse son objectif d’excédent budgétaire.