L’usine Goodyear sans repreneur : Amiens sous le choc

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usine de pneus de Goodyear Amiens-Nord secoue Amiens (Photo : Martin Bureau)

[28/11/2014 14:54:40] Amiens (AFP) L’échec apparemment sans appel des discussions pour trouver un repreneur partiel à l’usine de pneus de Goodyear Amiens-Nord fermée en janvier a secoué la capitale picarde, dont les élus ont demandé vendredi audience au Premier ministre Manuel Valls.

Tard jeudi, le directeur des ressources humaines de Goodyear Dunlop Tires France de passage à Amiens avait annoncé la mauvaise nouvelle au Courrier Picard: “Je peux affirmer aujourd’hui que toute discussion avec un repreneur potentiel, y compris Titan, est terminée”, avait déclaré Jean-Philippe Cavaillé.

La nouvelle a provoqué un choc à Amiens, affligée d’un taux de chômage de plus de 20% et qui s’inquiètait déjà cette semaine des retombées en termes d’emplois de la réforme territoriale entérinée lundi par l’Assemblée nationale, qui lui fera perdre son statut de capitale régionale au profit de Lille.

Titan, équipementier américain souvent partenaire de Goodyear, s’était pourtant longtemps dit intéressé par la reprise de l’activité pneus agraires du site malgré un premier échec en 2012 en raison de l’opposition du syndicat majoritaire, la CGT.

Au terme de six années de dur conflit entre la direction de Goodyear et les salariés qui suivaient la CGT, l’espoir restait cependant de voir environ 333 emplois sauvés par Titan. Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, s’en était encore fait l’écho au lendemain de la fermeture de l’usine, en janvier.

Et effectivement, “ces derniers mois, on s’est à nouveau approché du groupe Titan pour essayer, une nouvelle et ultime fois, de trouver une solution pour le site d’Amiens-Nord, dans un contexte économique difficile”, mais en vain, a expliqué jeudi le DRH de Goodyear.

La déception est donc grande. Des rumeurs de reprise par Titan avaient recommencé à circuler ces dernière semaines, et la CGT avait même assuré qu’elle ne ferait rien pour la bloquer et que ses délégués ne souhaitaient pas travailler chez l’Américain.

Devant le fiasco final, le successeur de M. Montebourg, le ministre de l’Economie Emmanuel Macron, a fait savoir dans la nuit de jeudi à vendredi qu’il s’était entretenu avec le patron de Titan, Maurice Taylor, et avait convenu avec lui “d?examiner ensemble les obstacles à cette reprise”.

“On ne peut pas racheter Goodyear à cause de vos lois. On doit reprendre au minimum 652 ou 672 ouvriers, c’est impossible. Au maximum, c’est 333 parce qu’après ce n’est pas rentable”, a asséné vendredi le PDG de Titan sur France Info, avant de distiller quelques outrances dont il est coutumier sur “la France (…) devenue un pays communiste”.

M. Macron devait aussi prendre contact vendredi avec les dirigeants de Goodyear, selon son entourage.

Mais à Amiens on ne semblait plus y croire, Goodyear ayant fait état jeudi d’une rupture “définitive” et “irrévocable” des discussions.

Par voie de communiqué puis de conférence de presse, les dirigeants de la ville, repassée à droite aux dernières municipales, ont distribué vendredi les mauvais points aux responsables à leurs yeux de cet “immense gâchis social”, du “jusqu’au boutisme” de la CGT à la “gestion approximative des ressources humaines” chez Goodyear.

La maire UDI d’Amiens, Brigitte Fouré, et le président UMP d?Amiens Métropole, Alain Gest, ont demandé vendredi un “rendez-vous” au Premier ministre Manuel Valls.

Les deux élus souhaitent “être informés par le gouvernement des négociations qu’il est censé avoir eu avec” Goodyear et Titan et ils demanderont à M. Valls “quelles mesures il compte prendre pour la ré-industrialisation du site”.

Mme Fouré et M. Gest ont annoncé une réunion extraordinaire en session commune du conseil municipal d’Amiens et du conseil d’Amiens Métropole le 4 décembre.

Alain Gest a encore ciblé la CGT locale en déplorant qu’un accord de 2012 –550 emplois sauvegardés dans le cadre d’un Plan de départs volontaires– ait finalement capoté. Pour enfoncer le clou, il s’est réjoui en revanche qu’une autre usine amiénoise du groupe, celle de Dunlop, qui avait accepté elle en 2007 un compromis avec la direction, ait son avenir assuré.

La CGT, restée muette dans un premier temps vendredi devant les flèches la visant, a lancé cette année plusieurs procédures judiciaires contre Goodyear: une action prud’homale à Amiens pour invalider le motif de licenciement économique et une action de groupe aux Etats-Unis concernant les maladies professionnelles.