Ajaccio, le 2 septembre 2013 en Corse (Photo : Pascal Pochard Casabianca) |
[09/12/2014 13:11:45] Ajaccio (AFP) Une entreprise solidaire corse, Femu Qui (Faisons ici), qui a permis depuis 22 ans le développement de quelques PME emblématiques, veut relancer l’épargne populaire pour donner un coup de fouet à l’économie insulaire.
“Femu Qui, une entreprise du peuple corse au service du peuple corse”, a titré cette semaine l’hebdomadaire nationaliste Arriti (Debout), pour encourager les particuliers à répondre à une campagne de souscriptions dans cette société de capital risque.
Pour franchir un nouveau palier dans son développement, cette société de quelque 2.000 actionnaires souhaite augmenter son capital en levant 1.820.000 euros.
Elle propose au public jusqu’à la fin de l’année 13.000 actions de 140 euros. Les fonds investis, bloqués durant au moins cinq ans, sont accompagnés d’attractives mesures de défiscalisation.
Ils seront investis à partir de 2015 dans “cinq à huit PME dans un circuit court de financement”, selon le président du directoire de Femu Qui, Jean-François Stefani.
Le capital de la société, qui intervient dans tous les secteurs d’activité économique, avait été porté à 3 millions d’euros en 2001, neuf ans après sa création.
Son inlassable promoteur, Jean-Nicolas Antoniotti, président du conseil de surveillance, aime à rappeler que “l’épargne populaire est l’ADN de Femu Qui”.
“Nous sommes partis d’une démarche militante pour construire une Corse qui entreprend et qui produit, capable de se prendre en main”, dit à l’AFP M. Antoniotti, lui même chef d’une entreprise du bâtiment.
Il rappelle aussi que cette initiative a “servi d’exemple aux fonds d’investissement de proximité (FIP), au plan national français”.
– Scepticisme général –
Femu Qui est née en 1992 dans la mouvance nationaliste, sur le modèle d’une société à capital risque basque, Hemen Erikoa (Faisons ici), pour accompagner au plan économique la renaissance politique et culturelle de la Corse.
1.300 actionnaires avaient alors apporté un capital de 3 millions de francs (457.000 euros). Le Crédit agricole avait rejoint l’initiative.
Le capital était passé en 2001 à 3 millions d’euros avec l’arrivée de 900 nouveaux actionnaires dont la Collectivité territoriale de Corse et la Caisse des dépôts et consignations.
Les 12 millions d’euros investis depuis 1992 ont permis de financer 55 entreprises et d’accompagner un millier d’emplois. La moitié ont été créés dans des secteurs aussi divers que l’aquaculture, le bâtiment, l’agro-alimentaire, l’informatique, l?hôtellerie, l’aéronautique ou les pépinières.
Femu Qui gère actuellement un portefeuille de 38 entreprises.
“Nous n’apportons pas directement d’argent, ce qui est le travail des banquiers mais sommes associés à l’entreprise que nous accompagnons, ce qui nous a permis d’obtenir le label d’entreprise +solidaire+”, souligne M. Antoniotti.
Parmi les plus beaux succès de Femu Qui, la brasserie Pietra créée dans le scepticisme général en 1995 et qui exporte désormais le quart de sa production de bière à la châtaigne.
Les dirigeants de Femu Qui mentionnent aussi les fermes aquacoles Gloria Maris, qui ont racheté des installations en Sardaigne, au Maroc et sur le continent.
Ils évoquent encore la firme aéronautique Performance Composites Méditerranée où 94 emplois ont pu être créés par l’épargne populaire et qui construit dans le village de Tavaco, près d’Ajaccio, des pièces d’avions pour des géants comme Airbus, Dassault, Latécoère et ATR.
Mais, qui dit prise de risque dit aussi échec possible. Ce fut le cas pour un tiers environ des participations engagées depuis 1992. Sur les 204 projets soumis depuis cinq ans, 63 ont été étudiés et 24 seulement soutenus.
L’un des plus retentissants échecs fut celui du Centre des arts du feu destinés à regrouper dans une ancienne usine désaffectée de Francardo (Haute-Corse) des artisans d’art et des artistes dont les productions haut de gamme n’ont pas connu un succès suffisant.
Pour que Femu Qui soit bien, selon la formule du journal Arriti, “l’expression de la Corse qui construit, qui se prend en main, décomplexée et émancipée”, M. Antoniotti insiste sur l’urgence de créer et développer des entreprises de production et de service en renfonçant la qualification et le professionnalisme des jeunes insulaires, et sur le “rôle déterminant” de l’université de Corte.