Mais que fait donc Chedly Ayari, ce grand économiste, docteur honoris causa et gouverneur de la BCT aux agents de voyage tunisiens? Est-ce leur perte qu’il cherche? Parce que, si le commencement a été avec les agents de voyage, nous pouvons nous attendre à ce que les exportateurs tunisiens, qui pouvaient garder 100% de leurs comptes professionnels en devises, puissent subir le même sort!
Est-ce une remise en cause de la convertibilité du dinar que nous vivons aujourd’hui, le retour au protectionnisme basique et inutile?
C’est peut-être tout cela à la fois, d’autant plus que suite à des instructions de la BCT, les importateurs des biens de consommation ont fait l’objet d’une mesure émanant du ministère du Commerce et qui consiste à une demande d’autorisation pour effectuer leurs opérations d’import.
Pendant ce temps, c’est le marché parallèle du trafic de devises et le marché financier informel qui se développe, et comme le dit un dicton bien de chez nous, «illi yisrik yighlib illi iyahahi» (Celui qui vole trouve toujours les moyens d’échapper aux mailles des gardiens). Mais les cadres de la Banque centrale s’en foutent royalement, «ce n’est pas leur affaire»! Leur mission est tout juste d’obscurcir les horizons de ceux qui veulent travailler…
Les agents de voyage devraient-ils recourir au marché parallèle pour sauver leur profession, les emplois et honorer leurs engagements avec leurs vis-à-vis à l’étranger? Rappelons à ce propos qu’entre 2008 à 2013, des réunions quadripartites (FTAV, ONTT, MT et BCT) ont permis d’accorder une rallonge au secteur des voyagistes, ce qui a permis aux agences de bénéficier à chaque fois d’extension, portant donc l’enveloppe à 23, 25 et 32 millions de dinars tunisiens en devises, même pas 20 millions de $. Est-ce cela qui va mettre à mal la balance des devises ou creuser le déficit commercial? La BCT aurait dû penser à créer avec le ministère des Finances une police financière pour mettre un terme à tous genres de trafic qui se développe de plus en plus dans le marché parallèle des finances. Mais non, dans notre pays, ce sont toujours les économiquement corrects qui payent les pots cassés et les trafiquants qui échappent à la loi et l’Administration! Avant le 14 janvier, nous étions sous une «dictature». Et aujourd’hui?
Une décision déstabilisante
Depuis janvier 2014, les agences ont été frappées de plein fouet par la baisse du nombre de touristes étrangers. Elles se sont donc retournées vers l’outgoing pour pouvoir survivre. La décision prise par la BCT risque de déstabiliser un grand nombre de voyagistes, et des agences risquent même de disparaître du paysage. La BCT veut-elle en faire un secteur sinistré?
Prenons l’exemple de l’agence Select Travel and Tours, laquelle, en 7 ans d’existence, a permis à des milliers de Tunisiens de partir en vacances en toute dignité, et avec toutes les couvertures nécessaires. Elle a contribué à la naissance et à l’essor d’un nouveau métier, celui de voyagiste, et a travaillé dans la transparence la plus totale, ne suivant que les voies déclarées. Elle a créé de la richesse en s’acquittant des taxes et des impôts et de l’emploi au sein de la société mère mais également auprès du secteur puisqu’elle opère avec 270 agences pour vendre l’outgoing.
Elle a non seulement contribué à l’activité de plus de 200 agences importantes pour le tissu économique mais généré plus de ressources de devises puisque les centrales partenaires achètent auprès d’elle des nuitées d’hôtels et prestations terrestres en Tunisie.
Cette agence et d’autres doivent-elles être pénalisées parce qu’elles ont assuré leur rôle d’acteur économique dans le respect des lois? Le gouverneur de la BCT pourrait-il assumer la responsabilité morale de mettre en péril l’image de la Tunisie auprès des partenaires étrangers les faisant passer pour non solvables? Car à défaut d’accorder la rallonge en devises à ces agences dans les plus brefs délais, eh bien, d’autres sociétés seront poussées à la faillite.
Aucune décision du Premier ministère et pas de CIM!
Pire, la décision de stopper net toute rallonge le 17 septembre a été prise avec effet immédiat sans aucune voie de recours. «Est-ce normal ou acceptable? Nous avons des encours pour des réservations passées mais également des engagements déjà pris allant jusqu’en mars et avril 2015, comment pourrait-on accepter une telle décision unilatérale?. La profession a mis 10 ans -de 1996 à 2006- pour obtenir le droit à cette “enveloppe“ qui était en 2006 de 10 millions de dinars que les agences peuvent utiliser pour que des Tunisiens puissent se rendre à l’étranger en étant couvert à partir à l’étranger».
La question est posée à juste titre par l’une des responsables de cette agence, mais le grand Chedly Ayari n’en a cure, d’un simple trait de plume, il a supprimé cet acquis prenant le risque de massacrer à la tronçonneuse un secteur qui lutte pour sa survie. A-t-il pensé aux représailles des partenaires étrangers des voyagistes tunisiens suite à cette décision et son impact sur le site Tunisie?
Le plus drôle dans tout cela (kothr el Ham Ydhahhek) est qu’en septembre 2014, les professionnels avaient appris par une lettre de la FTAV qu’un CIM de juillet 2014 a porté l’enveloppe accordée aux voyagistes à 20 millions, alors que les professionnels sollicitaient son augmentation pour que, en 2015, on la supprime et on la remplace par une subrogation. Les agences devraient-elles pomper sur les allocations touristiques des clients?
C’est ce qui s’appelle avancer à reculons!
«Il nous a fallu un mois de protestation et une manifestation pour que le ministère et la BCT entendent notre appel pour une rallonge. Suite à cela, des réunions quadripartites ont été tenues où nous avons expliqué notre point de vue. Le ministère du Tourisme et la BCT ont accepté de défendre notre cas dans le cadre d’un CIM qui nous accorderait la rallonge demandée de 5,5 millions de dinars pour couvrir nos encours et dettes déjà contractées et 10 millions de rallonge pour terminer l’année».
Mais depuis, aucune décision du Premier ministère et pas de CIM! Les agences sont en arrêt et feront faillite au train où vont les choses entraînant un chômage qui touchera 1.300 familles concernées ainsi que la baisse des recettes de l’Etat. Entre temps, le secteur parallèle prolifère et personne ne le contrôle. Mais le grand manitou a dit son mot. Que la volonté de Dieu soit faite!