Entreprises : cri d’alarme de la police sur les escroqueries aux faux virements

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épression de la grande délinquance financière (OCRGDF), le 18 janvier 2014 à Marseille (Photo : Anne-Christine Poujoulat)

[14/12/2014 09:46:34] Paris (AFP) Arsène Lupin en guise de Père Noël: la police lance un cri d’alarme sur les escroqueries aux faux virements, aux montants astronomiques, dont peuvent être victimes les entreprises à l’approche des fêtes de fin d’année.

“C’est un véritable fléau économique. Il faut être vigilant, la trêve des confiseurs est souvent synonyme de relâchement dans les sociétés et les escrocs en profitent”. Ainsi parle le commissaire Jean-Marc Souvira, patron de l’Office central de répression de la grande délinquance financière (OCRGDF), lanceur d’alerte d’un nouveau style.

Selon lui, les experts en faux ordres de virement sont devenus la bête noire des entreprises pas seulement françaises mais “de langue française” dans toute l’Union européenne (UE).

L’escroquerie n’est pas nouvelle, dit-il, et a souvent lieu le vendredi, veille de week-end où tout se ralentit. La crainte de ce service spécialisé de la police judiciaire (PJ) française est qu’elle soit “encore plus importante” à la faveur de la période des fêtes, où la “vigilance s’estompe parfois”.

Le message n’est pas non plus nouveau mais il y a, selon lui, urgence à le marteler en raison notamment des préjudices subis et des “dommages collatéraux”.

Le principe? Enfantin a priori, mais nécessitant une bonne dose de culot et une connaissance des arcanes des sociétés visées, qu’elles soient du CAC 40 ou plus artisanales.

Il s’agit d’obtenir indûment le versement de fonds en se faisant passer, auprès du comptable par exemple, pour le PDG. En prétextant pour cela l’imminence d’un projet de fusion/acquisition ou, nouvelle et récente méthode, un changement de domiciliation bancaire pour verser le loyer de l’entreprise.

– ‘Escrocs de haut vol’ –

Les montants? Astronomiques: de 400.000 euros pour les plus faibles à 25 millions d’euros, record à ce jour. En trois ans, selon la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), entre 2010 – année d’apparition du phénomène – et 2013, 700 faits ont été recensés en France. Soit 360 entreprises. Préjudice global: 300 millions d’euros.

“Et il y en a qui ne portent pas plainte”, affirme-t-on à l’OCRGDF, “par peur d’une mauvaise publicité”. Sur ces trois années, il y a eu tout de même, selon la PJ, 1.200 plaintes en France.

Comment et où? En passant par une multitude de sociétés écrans et en utilisant la Chine comme lieu de destination finale des virements avant transfert ou décaissement. Et l’Europe de l’Est comme zone de rebond, Pologne, Slovaquie ou Hongrie, Géorgie tout récemment.

Les Arsène Lupin sont souvent des “escrocs de haut vol”, selon l’office de la PJ, et certains ont trempé dans les escroqueries à la taxe carbone (transactions frauduleuses sur les droits d’émissions de CO2). Leur “base de repli” est Israël, pays avec lequel la France n’a pas d’accord bilatéral d’extradition et où sévissent parfois, selon la police française, de véritables “groupes criminels”.

Outre le préjudice financier important à chaque fois, les “dommages collatéraux” sont des licenciements, des salariés abusés par exemple, voire des suicides comme cela été le cas à Lyon.

La PJ dit ne pas avoir connaissance de dépôts de bilan mais a pris son bâton de pèlerin pour “prévenir” les sociétés en liaison avec le Medef – la PJ a effectué 60 interventions dans les entreprises- et les pays concernés.

En novembre, les hautes autorités judiciaires françaises sont ainsi allées organiser la riposte en Chine où, selon une source proche du dossier, un suspect ayant “blanchi” 30 millions d’euros pour le compte d?escrocs a été arrêté il y a peu, dans la région du Wenzhou. Victime: un groupe lyonnais.

Pour l’instant, croit savoir le commissaire Souvira, “c’est localisé dans l’UE, mais ils sont en train de former des escrocs en anglais”. “C’est un phénomène très toxique, il faut trouver des parades”, et d’ajouter: “Nous avons des résultats”.