Le pape François aux Philippines, une cyberstar et un label porteur

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à Manille le 16 janvier 2015 (Photo : Giuseppe Cacace)

[16/01/2015 07:56:40] Manille (AFP) Aux Philippines, le pape François est une cyberstar en même temps qu’il est devenu un label porteur pour des entrepreneurs opportunistes.

Des millions de Philippins sont prêts à endurer des foules immenses et un temps d’orage pour se rapprocher du pape lors de sa visite dans l’archipel, mais d’autres ont trouvé plus simple: les réseaux sociaux.

Le souverain pontife a beau avoir 78 ans, c’est l’un des leaders mondiaux les plus en pointe en matière d’internet. Et il fait fureur sur les réseaux sociaux. Des milliers de Philippins lui ont adressé des messages sur son compte Twitter, @Pontifex, ainsi que sur d’autres forums.

“J’ai l’impression de lui parler directement même si je sais que c’est géré par un administrateur”, explique Angelique Mina-Rualo, l’une de ces twitteuses. Cette employée de banque explique avoir survécu au cancer grâce à sa foi. “Parler au pape c’est comme parler directement à Dieu.”

– L’Eglise philippine au diapason –

Le pape argentin a près de 17 millions de “followers” sur Twitter et n’est dépassé que par le président américain Barack Obama.

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ésidentiel à Manille où est reçu le pape François le 16 janvier 2015 (Photo : Giuseppe Cacace)

L’Eglise catholique philippine conservatrice s’est mise au diapason et a créé un site internet ainsi qu’une application gratuite pour smartphone où les 80% de catholiques du pays peuvent envoyer leurs demandes de prières, partager des photographies et écouter de la musique.

Sur le “mur des prières” de l’application téléchargée des milliers de fois, les fidèles demandent au pape son secours pour les aider à guérir, à avoir des enfants, à trouver du travail.

“Pape François, priez pour la santé de ma mère. Elle est en train d’avoir en ce moment même son second accident vasculaire cérébral”, écrit Fleur Escobar.

D’autres félicitent le pape pour son ouverture d’esprit. Joven Santiago espère que François verra aux Philippines “les tables de mahjong des prêtres”, une référence à un jeu prisé où l’argent change de mains, “les mères célibataires qu’ils condamnent et les homosexuels qu’ils jugent”.

En plus d’être une star de l’internet avec des milliers de “selfies” pris par des Philippins en compagnie d’images grandeur nature du chef de l’Eglise catholique, le pape est devenu l’occasion pour des grandes entreprises et des multinationales de faire des affaires.

Sa figure souriante orne des panneaux publicitaires et des publicités dans les journaux pour McDonald’s, Pepsi, Hyundai et une myriade de sociétés du cru.

– ‘100% de bénéfices’ –

Gerald Bautista, spécialiste du marketing, explique qu’aux Philippines, associer un label avec l’image du pape a un effet hypnotique sur le consommateur. “Le pape n’a aucun attribut négatif, c’est 100% de bénéfices en termes de crédibilité et d’intégrité.”

Rustan, grand magasin de luxe, n’a pas hésité à se servir de l’image papale pour vanter des bijoux par exemple, masquant cette promotion par un message de “bienvenue”.

La Conférence des églises catholiques des Philippines s’est déclarée indifférente face à cette situation. Elle a elle-même enrôlé de grandes entreprises comme sponsors officiels de la visite et leurs logos figurent sur les messages de bienvenue qui parsèment Manille.

L’une d’elles, Philippines Long Distance Telephone, la plus grande compagnie de télécommunications du pays, fait valoir que ses motifs sont altruistes puisqu’elle fournit gratuitement des services internet et de téléphonie à ceux qui souhaitent partager des informations sur le pape.

“Il ne s’agit pas pour nous de faire de l’argent. Notre but principal c’est d’aider chaque Philippin à passer un moment avec le pape”, assure un porte-parole Ramon Isberto.

Mais pour Andrea Tornielli, coordinatrice du site Vatican Insider à Rome, le pape ne doit pas être ravi de cette état de fait. “La réalité c’est qu’il aime trop les pauvres, ça serait bien mieux de voir l’argent dépensé en publicités être donné aux pauvres”, dit-elle.

Les entrepreneurs les plus modestes surfent aussi sur la vague et vendent à qui mieux mieux toutes sortes d’objets souvenir.

Les évêques philippins n’ont pas édicté de règles sur le merchandising, pour que les plus pauvres puissent faire un peu d’argent, explique le père Rufino Sescon, du comité d’organisation. Et “si on régulait, on pourrait être nous-mêmes accusés de vouloir faire de l’argent avec le pape”.

Josie Rudavites a vu ses recettes quotidiennes décupler à 3.000 pesos (67 dollars) depuis qu’elle propose dans son minuscule stand des pin’s et des calendriers à l’effigie du pape. “Le pape fait fureur”, dit la vendeuse de 36 ans à l’AFP. D’ordinaire, elle vend des bougies pour les prières dites dans une église toute proche.