Grèce : la dette colossale, un problème quel que soit le vainqueur des élections

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à Athènes (Photo : Louisa Gouliamaki)

[20/01/2015 12:25:14] Bruxelles (AFP) La nécessaire réduction de la gigantesque dette grecque se posera dans les prochains mois, quel que soit le vainqueur des législatives de dimanche, estiment les analystes, augurant de nouveaux maux de tête pour les Européens.

Une sortie de la Grèce de la zone euro, scénario de nouveau évoqué ces derniers temps, est jugée improbable par la plupart des analystes. Mais au-delà d’une probable prolongation du programme d’aide, se pose la question de la viabilité de la dette, qui a atteint 177,7% du PIB en 2014.

Alexis Tsipras, le leader du parti de la gauche radicale Syriza veut, s’il est élu, en finir avec l’austérité et souhaite une restructuration massive de la dette, ce qui alarme plusieurs capitales européennes.

Athènes vit depuis 2010 sous perfusion de ses créanciers internationaux, qui se sont engagés à lui prêter quelque 240 milliards d’euros en échange d’une austérité drastique. Ce sont les pays de la zone euro qui détiennent de loin la plus grosse part de la dette grecque, soit directement soit à travers le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

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äuble, le 7 novembre 2014 à Bruxelles (Photo : Emmanuel Dunand)

Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a averti à plusieurs reprises que la Grèce devrait respecter ses engagements. Le Premier ministre finlandais, Alexander Stubb, a assuré qu’il opposerait une ferme résistance à toute tentative d’effacement de dette grecque.

Si l’option d’un effacement n’est pour l’instant pas sur la table, beaucoup d’économistes plaident au moins pour un aménagement, car “la dette est si élevée que le futur gouvernement ne sera pas en mesure de continuer à la rembourser”, résume Paul De Grauwe, professeur à la London School of Economics.

– Peu de marge de man?uvre –

La question n’est pas nouvelle. Dès novembre 2012, les ministres des Finances de la zone euro évoquaient des mesures supplémentaires afin “d’assurer une réduction crédible et viable du ratio de la dette grecque” si le pays parvenait à dégager un excédent budgétaire “primaire”, c’est-à-dire hors service de la dette.

C’est ce qui s’est produit en 2014 et devrait se renouveler en 2015, soulignent deux analystes du centre de réflexion européen Bruegel, Zsolt Darvas et Pia Hüttl. Les conditions sont donc réunies.

Mais “il n’y a pas tant de marge de man?uvre que cela” pour renégocier la dette, souligne une source diplomatique européenne. Le FMI, qui compte parmi les créanciers d’Athènes, a reconnu que la viabilité de la dette grecque était une source d'”inquiétude sérieuse”, et exhorté ses partenaires européens à lui “octroyer un allègement supplémentaire”.

Mais l’institution de Washington a toujours exclu d’en faire autant. Sa directrice générale, Christine Lagarde, a été sans équivoque dans une interview accordée lundi à l’Irish Times. “Une dette est une dette, c’est un contrat. Faire défaut, restructurer, changer les termes a des conséquences sur la signature” d’un pays, “et la confiance en cette signature”, a-t-elle mis en garde.

Quant à la Banque centrale européenne qui a racheté de la dette grecque sur le marché, elle ne peut pas intervenir pour des raisons légales, a averti un de ses dirigeants, le français Benoît Coeuré.

Les Européens ont déjà fait beaucoup, rappellent les économistes de Bruegel: réduction des taux d’intérêt, allongement de la maturité des prêts qui dépasse 30 ans en moyenne, reversement à Athènes des profits que la BCE réalise sur la revente des obligations grecques, moratoire de remboursement de 10 ans. Simulations à l’appui, ils jugent possible de ramener la dette grecque aux alentours de 160%. Un niveau qui resterait dangereusement élevé et ne serait pas atteint avant plusieurs décennies.

Sans compter que dans tous les cas de figure, la réduction de la dette “dépendra de la croissance du pays”, souligne la source diplomatique, une croissance elle-même hypothéquée… par le poids du service de la dette.

Pour Paul De Grauwe, refuser d’alléger la dette serait une erreur car cela “condamnera la Grèce a de nombreuses années difficiles et encouragera les mouvements politiques extrémistes”, ce qui “perturbera fortement la zone euro dans son ensemble”.