à Davos le 24 janvier 2015 (Photo : Fabrice Coffrini) |
[24/01/2015 15:46:57] Davos (Suisse) (AFP) Elle est la première femme à la tête d’une institution vieille de 325 ans: les Lloyd’s de Londres, monument du secteur des assurances. Inga Beale brille à Davos où l’égalité homme-femme est un sujet qui monte, chaque année.
Mais le mouvement vers la parité ne relève pas que d’un idéal égalitaire ou social, il y a aussi de très claires justifications économiques, a-t-elle expliqué à l’AFP en marge du Forum économique mondial de Davos.
“Les secteurs d’activité où il y a le plus de diversité dans l’encadrement et au conseil d’administration ont de meilleurs résultats”, déclare cette quinquagénaire désignée fin 2013 première femme à diriger les Lloyd’s.
“Il y a toute une population dans laquelle nous devons puiser. Les économistes ont étudié cette population délaissée et estiment que le PIB des Etats-Unis augmenterait de 5 pour cent si elle était employée. Et dans d’autres pays, ce serait encore plus fort”, ajoute-t-elle.
Et elle sourit quand on lui demande si elle a elle-même fait face à des difficultés pour se faire sa place.
Le marché de l’assurance londonien est “complèment déconnecté”, même par rapport à l’environnement déjà très masculin des conseils d’administration de Londres, avec seulement 4% de femmes aux postes de responsabilité, et cela l’entrave, selon elle.
“Quand ils m’ont choisi comme PDG, j’avais probablement toutes les qualités requises: expérience internationale, toujours dans le secteur, j’avais dirigé des entreprises”, explique celle qui est entré dans le secteur des assurances en 1982, et qui a travaillé pour plusieurs grands noms du secteur.
Toutefois, en tant que femme, “vous devez être très déterminée, et pouvoir ignorer certaines choses qui vous arrivent pour continuer”.
Elle reconnait aussi qu’il y a eu “des moments où je me suis demandé: +dois-je la reconnaissance dont je bénéficie à mon travail, ou au fait que je suis une femme ?+”
Avant de tempérer: “Plus vous montez en grade, moins on se pose la question”.
Les femmes ne sont qu’environ 17% des quelque 2.500 leaders qui se réunissent chaque année dans la bourgade suisse de Davos pour étoffer leur réseau et pour parler des grands problèmes du monde.
Le chiffre augmente régulièrement, mais suscite chaque année des critiques.
Pour cette 45e édition, les organisateurs ont organisé un débat inédit sur le “dividende de la diversité”, abordant non seulement les conséquences du sous-emploi des femmes, mais aussi de la place des homosexuels, et transgenres dans le monde des affaires.
Pour Beale, ce qui se passe à Davos “reflète ce qui se passe dans la communauté du +business+”.
Dans un improbable assemblage de grands noms envisageable uniquement dans le maelstrom de Davos, l’actrice Emma Watson, le secrétaire général de l’Onu Ban Ki-moon, le président rwandais Paul Kagame, le patron d’Unilever Pol Polman (entre autres) ont lancé vendredi une nouvelle initiative pour la promotion des femmes dans la vie active.
– Discrimination “inconsciente” –
Chez les Lloyd’s, marché de l’assurance de Londres, Mme Beale a lancé une campagne pour accroître la diversité, une décision évidente pour une telle entreprise, selon elle.
Les Lloyd’s sont en train de croître rapidemment en Chine, Amérique latine et Afrique, et “le meilleur moyen pour bien le faire est de comprendre leur culture, et donc d’embaucher des gens différents”, selon elle.
Mais le plus gros défi est celui de ce qu’elle appelle la discrimination “inconsciente”, et qui fonctionne dans tous les sens.
“Je me souviens, au cours de ma carrière, je me suis retrouvée à la tête d’une équipe largement féminine”, a-t-elle reconnu.
“Je n’avais pas décidé d’embaucher des femmes. C’était inconscient, mais en fait, peut-être que vous finissez par recruter des gens qui vous ressemblent. Quand j’ai réalisé cela, c’était il y a 20 ans, je me suis dit: +Mince ! Je dois embaucher en conscience des gens qui ne sont pas comme moi”.