Le port commercial de Tokyo, le 26 janvier 2015 (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
[26/01/2015 06:39:50] Tokyo (AFP) Le déficit commercial du Japon a encore atteint un niveau inédit en 2014 pour la troisième année d’affilée, mais la chute des prix du pétrole pourrait mettre fin à cette série négative et contribuer à relancer une économie en mauvaise posture.
Le solde négatif s’est élevé à 12.781 milliards de yens (97 milliards d’euros au taux de change actuel), en hausse de 11,4% par rapport à celui de 2013, selon des statistiques publiées lundi par le ministère des Finances.
L’archipel avait glissé dans le rouge en 2011, pour la première fois en 31 ans, conséquence de l’accident nucléaire de Fukushima qui a entraîné l’arrêt de l’ensemble des réacteurs du pays (48 sans compter les six saccagés de Fukushima Daiichi). D’où un recours accru aux hydrocarbures pour faire tourner les centrales thermiques.
Quatre ans plus tard, les centrales sont toujours au point mort malgré des projets de redémarrage au printemps, et la facture énergétique a de nouveau pesé lourd l’an passé, en étant de surcroît mécaniquement renchérie par la dépréciation du yen.
Le déficit a également été creusé par l’envolée des importations sur les trois premiers mois de 2014 pour répondre à la fièvre consommatrice des Nippons, en amont de l’entrée en vigueur d’une TVA à 8% (contre 5% auparavant) début avril.
Au final, les achats extérieurs ont augmenté en valeur de 5,7% sur l’ensemble de l’année, leur niveau le plus haut depuis le lancement de cette statistique sous cette forme en 1979, dépassant le montant des exportations qui ont pour leur part progressé de 4,8%.
à Tokyo (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
Bonne nouvelle cependant pour la troisième économie mondiale, la dégringolade des cours de l’or noir, tombés au plus bas depuis près de six ans, a récemment allégé la facture.
Après une réduction de près d’un tiers en novembre, le déficit a de nouveau fortement reculé en décembre (-49,5% à 660,7 milliards de yens), à la faveur d’une chute des dépenses pétrolières de 12%.
– Nouvelle chance pour les ‘abenomics’ –
Cette tendance devrait se poursuivre, estime Marcel Thieliant, analyste de Capital Economics. La balance commerciale, mal en point depuis 30 mois consécutifs, “pourrait renouer avec les excédents dans les mois à venir”, au moins de façon temporaire, souligne-t-il dans une note.
Autre élément positif, la vigoureuse reprise des exportations qui ont enchaîné en décembre leur quatrième mois de hausse (+12,9%), avec une mention spéciale pour les marchandises qui ont pris la route des Etats-Unis (+24%).
Les économistes y décèlent les bienfaits de l’affaiblissement du yen, en particulier vis-à-vis du dollar, repli qui renforce la compétitivité à l’étranger des grandes firmes nippones. Certaines, à l’image de Nissan, ont même décidé d’accroître leur production made in Japan pour profiter au maximum de cette évolution des monnaies.
C’est en tout cas un relais de croissance bienvenu pour un archipel touché de plein fouet par la morosité de la demande intérieure à la suite du relèvement de taxe, au point d’être tombé en récession au troisième trimestre.
Prenant acte de ce contexte favorable, la Banque du Japon (BoJ) vient de relever ses prévisions: le produit intérieur brut (PIB) est dorénavant attendu en hausse de 2,1% sur la période d’avril 2015 à mars 2016 (contre 1,5% auparavant).
Voilà qui donnerait raison au Premier ministre conservateur Shinzo Abe, dont la stratégie de relance “abenomics” a pour l’heure déçu les électeurs qui font surtout la moue devant leur bulletin de salaire.
Selon un sondage du groupe Nikkei et de la chaîne TV Tokyo réalisé auprès de plus de 1.000 personnes, 60% des Japonais disent ne pas percevoir les effets de cette politique économique, 21% ressentent même une dégradation de la conjoncture et seulement 15% font état d’une amélioration.
Reconduit au pouvoir en décembre faute d’opposition crédible, le chef du gouvernement a promis d’amplifier sa politique pour étendre à l’ensemble du pays un cercle vertueux. Il a d’ores et déjà validé un plan de relance équivalant à près de 30 milliards d’euros.
La BoJ est de son côté invitée à intensifier ses mesures d’assouplissement monétaire s’il le faut. Son gouverneur l’a redit la semaine dernière: il est prêt à jouer le jeu et les analystes prédisent un nouveau geste conséquent courant 2015.