Aux Etats-Unis, pour espionner leur enfant, les parents puisent dans les nouvelles technologies (Photo : Jean-Sebastien Evrard) |
[12/02/2015 11:32:16] San Francisco (AFP) Les parents américains n’ont peut-être pas les moyens de l’Agence nationale de sécurité (NSA) mais quand il s’agit de surveiller leurs enfants, il leur est assez facile de les pister grâce au téléphone portable.
Désormais, il existe une offre florissante de gadgets de surveillance pour les parents stressés qui veulent garder un oeil sur leurs enfants, qu’ils fassent un excès de vitesse dans la voiture de maman ou qu’ils envoient des SMS à l’heure où ils devraient dormir.
On trouve des clés magnétiques, des montres ou encore des bracelets avec des capacités de géolocalisation. Des bracelets de chevilles pour suivre les humeurs de bébé. Ou même des lits connectés capables de moucharder si l’ado n’a pas éteint à temps sa lumière le soir.
Bonne nouvelle pour les parents, la plupart de ces dispositifs –en particulier ceux permettant de surveiller les enfants plus âgés– sont partie intégrante des téléphones portables auxquels les adolescents sont accros.
“Les parents veulent garder la maîtrise de la situation; c’est un moyen pour eux de se sentir bien”, explique le professeur en criminologie Sameer Hinduja, codirecteur du Centre de recherche américain sur la cyber-intimidation.
A sa petite fille de 6 ans, Frank Lee, responsable marketing chez LG, a offert un bracelet en plastique rose pour pouvoir la géolocaliser à tout moment.
Ce petit bijou agrémenté d’étoiles roses permet notamment d’émettre des appels vers des numéros préprogrammés ou de vérifier si l’enfant se trouve bien là où il doit être.
“Au début, elle nous appelait sans cesse”, se souvient-il. “Je lui ai dit de me prévenir quand elle ne voudrait plus le porter, mais elle ne veut même plus l’enlever pour que je le recharge”.
Pour les parents plus inquiets ou qui ont du mal à communiquer avec leurs adolescents, il existe des moyens plus discrets: des applications installées à l’insu des utilisateurs sur les tablettes et les téléphones permettent par exemple d’accéder aux photos prises, aux messages tapés, à l’historique des recherches sur internet et bien plus encore, selon Sameer Hinduja.
Dans certains cas, les parents peuvent délimiter des périmètres électroniques pour recevoir des alertes à chaque fois que leurs enfants en sortent.
– L’éducation d’abord, la technologie ensuite –
“On a même entendu parler de parents qui placent des puces sur eux”, a déploré Robert Lowery du Centre national américain pour les enfants disparus ou maltraités (NCME). “Ce genre de comportement est choquant. Nous ne prônons pas cela”.
Cet ancien policier préfère promouvoir des solutions utilisant des médias sociaux –notamment Facebook– avec l’envoi d’alertes ciblées en cas de disparition, qui offrent un gain considérable de temps pour localiser les enfants.
Mais selon le professeur Hinduja, certains mouchards sont des moyens contreproductifs pour les parents qui cherchent à reconstruire les ponts de communication avec leurs enfants.
“Si les parents espionnent leurs enfants, cela coupe toute possibilité de communication, qu’ils ont sûrement mis longtemps à construire”, a-t-il dit.
Il recommande ainsi l’utilisation le plus tard possible de ces outils, et uniquement si l’enfant a démontré qu’il n’était pas digne de confiance.
“Cela revient à pirater la vie de vos enfants. Les gens ne devraient pas croire qu’il existe un gadget pour leur permettre de restaurer la confiance avec leurs enfants, ni qu’il y a un logiciel capable de faire d’eux de meilleurs parents, car il n’y en a pas”, a martelé ce spécialiste.
Plutôt que d’utiliser ces nouvelles technologies, qui partent bien souvent d’une bonne intention, Robert Lowery du NCME suggère aux parents d’inculquer à leurs enfants du bon sens et de leur apprendre à faire face aux situations dangereuses.
“Comme frapper ou crier si quelqu’un tente de les enlever”, dit M. Lowery. “Les nouvelles technologies, elles, n’empêcheront pas cela, elles vous indiqueront juste où l’enfant est emmené”.