«Al Habra». Si, si vous l’avez bien compris, il s’agit bien du terme désignant, dans le dialecte tunisien, la viande rouge de qualité. Pas d’amalgame, il n’y a pas de faute d’orthographe ou d’erreur de frappe et aucune référence au palais mythique de l’Alhambra en Andalousie. Le label fait plutôt référence à un produit tout à fait terrestre que l’on veut de qualité, à prix accessible et bénéficiant de toutes les garanties de la traçabilité pour préserver la santé et l’hygiène des consommateurs.
L’idée de la création d’un projet intégré visant la production et l’exportation des viandes rouges “made in Tunisia“ sous le label «Al Habra» est de Belgacem Khorchani, homme d’affaires tunisien qui s’est construit une solide réputation de développeur de mégaprojets entre l’Allemagne et l’Arabie Saoudite.
En Tunisie les activités de Habra Holding englobent toute la chaîne de valeurs de la filière de la viande rouge, allant de l’élevage du bétail chez des engraisseurs formés à l’école allemande. La capacité d’abattage du Centre d’élevage de Ain Askar atteindra, dans les tous prochains mois, les 1.000 bovins/jour et les 3.600/jour dont 75% de la production (steak haché et viande réfrigérée principalement bovine) sera adressée à l’international et surtout en Arabie Saoudite, partenaire à hauteur de 50% de l’opérateur tunisien. Une viande hallal dont l’engraissement a lieu dans les fermes tunisiennes et l’abattage sur place.
Le processus de transformation, de découpe et d’emballage se fera également dans des unités tunisiennes ainsi que la mise en vente dans des commerces dédiés à Al Habra ou via le réseau de distribution Habra Franchise. «Nous comptons remettre au goût du jour l’une des meilleures qualités de viande qui existe sur place, la race noire de Tibar. Un produit de grande qualité. Il sera labellisé “Al Habra“ et je peux vous promettre que grâce à notre projet, les prix des viandes rouges baisseront dans notre pays. Car nous éviterons tous les intermédiaires partant des éleveurs, arrivant aux abattoirs et passant par nombre de spéculateurs et de trafiquants. Dans nos usines, nous utilisons des technologies de pointe dans tout ce qui se rapporte à la traçabilité des viandes. N’importe quel consommateur final peut, grâce au code à barre, accéder à notre site et savoir à quelle race appartient le bovin ou l’ovin dont il a acheté la viande, la date de son abattage et de sa mise sur le marché. Tout le parcours est défini de A jusqu’à Z. Nous offrons également nos services aux éleveurs qui veulent faire de l’engraissage et nous leur offrons le choix entre nous vendre leur bétail ou le reprendre et le revendre par leurs propres moyens», nous a précisé Belgacem Khorchani.
Les experts qui veillent aussi bien à l’engraissement du bétail qu’à la formation des recrues sont des Allemands. Des recrues qui sont payées, dès signature de contrat et avant le démarrage de leur formation, 570 Dt par mois + 70 Dt pour le transport. Le groupe qui s’est installé pour le moment dans les abattoirs de la Société tunisienne des viandes qu’il a remis à neuf en attendant que les siens soient fins prêts, a également pensé à construire des résidences pour les jeunes formés. «Ils paieront 40 Dt par mois et jouiront de tout le confort nécessaire. Je veux que mes employés soient sécurisés et rassurés quant à leur qualité de vie».
Al Habra Holding pourrait à terme épargner au pays la perte des devises consenties dans l’importation des viandes rouges (Un conteneur coûte dans les 400 mille dinars) mais c’est aussi un créateur potentiel d’emploi puisque des 32 bouchers découpeurs fins prêts aujourd’hui, l’ambition de l’investisseur est d’atteindre les 1.500 d’ici la mi-juin.
Pour intégrer «Al Habra Academy, on n’a pas besoin d’un diplôme ou d’une expérience professionnelle dans le secteur de l’alimentaire ou des métiers de bouche». Pour M. Khorchani, la prise en main de l’employé potentiel se fait dès le premier entretien. Une fois la formation de 6 semaines achevées, il est immédiatement recruté dans le centre d’abattage du Holding ou l’un des points de vente.
«L’efficience et le performance sont nécessaires à une activité comme la nôtre si nous voulons nous faire une réputation à l’international. Je trouve inadmissible que le centre de formation dans la découpe de viande rouge à Fathalla pèche par trop d’improductivité et d’inefficience. Est-il normal que devant un centre de formation financé par l’Etat, vous voyez 20 voitures et seulement 12 diplômés tous les 6 mois?»
Si cela n’est pas du gaspillage, alors quel nom donner à autant de centres sur lesquels les contribuables dépensent beaucoup plus qu’ils n’en gagnent en mains-d’œuvre et même en qualifications et savoir-faire. Le nouveau ministre de la Formation et de l’Emploi devrait sérieusement se pencher sur ce problème structurel.
Dans l’attente, Al Habra Holding préfère jouer cavalier seul et n’aspire même pas au soutien de l’Etat. Son ambition est de devenir le fournisseur de premier plan de la viande bovine de qualité et d’assumer le rôle de leadership dans l’établissement de la référence de qualité pour l’industrie tunisienne du bœuf.