Contre l’extrémisme, muscler la guerre du message sur internet

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écembre 2014 à Berlin (Photo : Jean-Michel Hauteville)

[19/02/2015 07:08:03] Washington (AFP) Lutter contre l?extrémisme nécessite de faire un gros effort pour rattraper l’avance prise par les groupes extrémistes dans l’utilisation d’internet pour séduire et convaincre, ont estimé des intervenants au sommet contre l’extrémisme qui se déroule à Washington.

Pour Sasha Havlicek, présidente du centre de réflexion londonien Institute for Strategic Dialogue (ISD), il faut utiliser les méthodes de marketing en ligne des entreprises pour contrer la propagande du groupe Etat islamique, passé maître dans l’art d’utiliser internet pour cibler et séduire d’éventuelles recrues.

“L’EI a sa direction du marketing et de la marque, où est la nôtre?”, s’est demandé Sasha Havlicek. L’ISD a mené plusieurs expériences avec Google Ideas, Twitter et Facebook pour tenter de croiser le fer idéologique avec les extrémistes, directement auprès des recrues potentielles.

L’ISD a ainsi utilisé les méthodes de marketing viral pour diffuser les vidéos d’Abdullah X, un personnage fictif, qui cherche à contrer le message extrémiste auprès de jeunes musulmans.

“Nous avons inséré la vidéo sur des comptes Twitter extrémistes, posté la vidéo sur les sites extrémistes, l’avons faite ressortir (sur les moteurs de recherche) à chaque fois que les mots-clefs +Syrie+ et +jihad+ étaient tapés”, a expliqué Sasha Havlicek.

“Et en quelques mois, nous sommes passés d’une audience de 50 personnes à 100.000 personnes, dans le groupe cible des personnes cherchant à rejoindre la Syrie pour le jihad”, a-t-elle déclaré.

“Le meilleur indicateur du succès de cette stratégie” est que l’EI a publié “cinq pages de réfutation” des arguments d’Abdullah X, a-t-elle souligné.

L’ISD a aussi expérimenté un projet pilote utilisant Facebook pour “rattraper ceux qui sont au bord” de basculer dans la violence, en proposant un dialogue d’individu à individu à des internautes manifestement intéressés par l?extrémisme.

“Pour l’instant il n’y a que les services de renseignement et les groupes extrémistes qui s’adressent en ligne à ce public”, a-t-elle regretté.

L’étape suivante est de voir “si ce programme peut être automatisé” pour décupler son audience, a-t-elle indiqué.

Pour cela, il faut que les entreprises privées, qui savent déjà parfaitement utiliser ces techniques dans un but commercial, puissent se mettre au service des associations et militants qui cherchent à contrer la propagande de l’EI, a-t-elle indiqué.

– “Amplifier les alternatives positives” –

L’administration Obama est en phase avec ces recommandations de chercher à favoriser, partout, la réponse et la contre-propagande face aux groupes extrémistes.

“Les vidéos de haute qualité, l’utilisation des réseaux sociaux, les comptes Twitter des terroristes sont conçus pour toucher les jeunes en ligne”, a souligné pendant le sommet le président Barack Obama.

“Les communautés doivent prendre l?initiative et se protéger elles-mêmes. C’est vrai en Amérique et c’est vrai ailleurs”, a-t-il souligné.

L’administration Obama a ainsi expliqué qu’elle allait organiser des “séminaires de technologie” réunissant réseaux sociaux, représentants de gouvernement, de la société civile et des religions.

Il s’agit de “développer des contenus numériques qui discréditent les arguments des extrémistes (…) et amplifient les alternatives positives”, a-t-elle expliqué.

Elle va aussi collaborer par exemple avec les Emirats arabes unis pour mettre en place un “centre de communication numérique pour contrer la propagande et les efforts de recrutement de l’EI”, en collaboration avec la société civile et des responsables religieux.

Le département d’Etat va également aider des étudiants du monde entier a développer des contenus numériques contrant l?extrémisme.

Et l’administration a nommé un émissaire spécial à la communication stratégique anti-terroriste au département d’Etat pour “discréditer la propagande terroriste”.