Areva : remuscler la “filière française” pour sortir de l’ornière

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à La Défense, près de Paris (Photo : Eric Piermont)

[04/03/2015 17:23:39] Paris (AFP) Face aux difficultés financières d’Areva, le groupe public comme le gouvernement mettent en avant la nécessité de refonder la “filière française du nucléaire”, comme un moyen de corriger les erreurs du passé et d’assurer plus de succès commerciaux à l’étranger.

Le Premier ministre Manuel Valls a ainsi appelé mercredi Areva et EDF à coopérer “sans réserve” pour “poser les bases de la refondation de cette filière industrielle essentielle pour notre pays”.

“Une étroite collaboration entre les acteurs de l’équipe de France du nucléaire sera déterminante” pour réussir à se développer en Chine, avait estimé un peu plus tôt Philippe Varin, président d’Areva, alors que le groupe venait de confirmer avoir accusé une perte record de près de 5 milliards d’euros l’an dernier.

Le secteur nucléaire français, composé de quelque 2.500 entreprises, au premier rang desquelles Areva, EDF et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), “est un facteur essentiel de la souveraineté et de l’indépendance énergétique de notre pays” et “joue un rôle stratégique pour l’économie française”, avec pas moins de 220.000 salariés, ont aussi souligné dans un communiqué la ministre de l’Energie Ségolène Royal, le ministre de l’Economie Emmanuel Macron et le ministre des FInances Michel Sapin.

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é (Photo : J. Bonnard/S. Ramis/S. Rose)

Mais, ces dernières années, le manque de coopération entre ses principaux acteurs, voire la franche rivalité entre leurs dirigeants, ont coûté cher à la crédibilité de la filière, en particulier sur les appels d’offres à l’étranger.

Récemment, les signes d’une meilleure volonté se multiplient de part et d’autre, sous l’auspice du gouvernement.

Les équipes d’EDF et d’Areva ont, depuis quelques mois, engagé “des chantiers d’amélioration de (leur) efficacité opérationnelle (…) de façon à travailler en meilleure intelligence et à coopérer sans aucune arrière-pensée”, déclarait ainsi récemment Jean-Bernard Lévy, PDG de l’électricien public.

Ils concernent les chantiers en cours (EPR de Flamanville, maintenance du parc nucléaire, etc.), la conception de réacteurs neufs et le cycle du combustible, notamment la conversion d?uranium, a-t-il détaillé.

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à la Hague, photographié le 29 janvier 2015 (Photo : Charly Triballeau)

Le rôle de fournisseur d’Areva, dont EDF est déjà le premier client, devrait notamment être renforcé, estime Lionel Taccoen, expert dans le nucléaire civil et auteur en 2003 du “Pari nucléaire français”.

Alors que l’électricien “bénéficiait d?une certaine liberté pour acheter son combustible (et) ses composants type générateur de vapeur, il va y avoir une amicale pression du gouvernement pour qu?EDF s?approvisionne de plus en plus chez Areva, même si c’est plus cher”, prévoit-il.

– ‘amicale pression’ –

Mais, devant l’ampleur des difficultés financières d’Areva, l’hypothèse d’un rapprochement encore plus étroit entre le groupe, détenu à 87% par des capitaux publics, et EDF, propriété de l’Etat à 84,5%, a gagné du terrain.

Car Areva, dans le rouge depuis quatre années consécutives, ne coupera pas à une recapitalisation pour renflouer ses fonds propres.

Il y a moins d’un mois, le PDG d’EDF affirmait qu’une prise de participation dans des activités d’Areva n’était pas “à l’ordre du jour”. Mais mercredi, M. Macron a estimé que la refonte des relations entre les deux groupes pourrait aller “jusqu’à un rapprochement, y compris capitalistique”, excluant en revanche que l’Etat mette la main à la poche dans l’immédiat.

Et l’hypothèse n’a pas été exclue mercredi par les dirigeants d’Areva, M. Varin disant vouloir explorer “toute option qui fait du sens industriel ou commercial”, tandis que le directeur général Philippe Knoche a reconnu cette éventualité “dans un second temps”, après les discussions sur les aspects opérationnels.

Le suspense ne devrait toutefois pas durer trop longtemps, puisque les dirigeants des deux groupes ont été invités par M. Valls à faire rapidement des propositions, qui seront examinées par le gouvernement “dans les semaines qui viennent”.