L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, mercredi en séance plénière, un projet de loi portant sur un mémorandum d’entente d’assistance macro-financière (AMF) et une convention de prêt d’un montant de 300 millions d’Euros (environ 650 millions de dinars) conclue entre la Tunisie et l’Union Européenne (UE).
Cet accord accordé à des conditions avantageuses, soit un faible taux d’intérêt (3%) et une durée de remboursement de 15 ans, s’inscrit dans le cadre du mécanisme d’appui au financement intégral, considéré comme étant l’un des outils de coopération avec l’UE. Il vise à répondre aux besoins exceptionnels de financement extérieur au niveau de la balance des payements au profit des Etats de voisinage de l’UE.
Ce type de financement doit être accompagné d’un programme de réforme économique en accord avec le Fonds monétaire international (FMI) et des avancées dans sa concrétisation. La convention de prêt était accompagnée par la signature, le 29 août 2014, d’un mémorandum d’entente entre la Tunisie et l’UE concernant les dispositions et les réformes qui seront entreprises par la partie tunisienne pour décaisser le prêt précité.
Le déblocage du prêt sera effectué sur trois tranches, d’un montant de 100 millions d’euros chacun avec une période d’espacement d’au moins trois mois. La première était prévue avant fin 2014, la deuxième au cours du premier trimestre de 2015 tandis que la troisième sera décaissée au cours du premier semestre de 2015.
Le déblocage de la première tranche nécessite la signature de tous les contrats et leur entrée en vigueur ainsi qu’une bonne exécution du programme convenu avec le FMI. En ce qui concerne les conditions de décaissement de la deuxième tranche, celles-ci concernent la réalisation de bon nombre d’indicateurs relatifs aux réformes fiscales, au réseau de sécurité sociale, au secteur financier et aux statistiques.
La troisième tranche sera décaissée conformément à certains critères qui exigent la réalisation de certains indicateurs relatifs à la gestion des finances publiques, au réseau de sécurité sociale, aux secteurs financier et commercial.
La mise en place du réseau de sécurité sociale a pour objectif d’instituer des réformes dans le domaine de la subvention en vue d’orienter la compensation vers ceux qui ont en besoin, notamment les catégories sociales vulnérables, et ce, en se basant sur les résultats d’un recensement effectué sur un échantillon de 800 000 familles nécessiteuses bénéficiaires du Programme national d’aide aux familles nécessiteuses(PNAFN), des carnets de soin gratuit et des soins à prix réduits.
Lors du débat sur le projet de loi, le député Mohsen Hassen a pointé du doigt ce qu’il a appelé « des glissements dangereux des finances publiques », consistant notamment en la multiplication par trois des dépenses de subventions depuis la révolution et l’évolution de la masse salariale de 54%, sans omettre l’augmentation du taux de l’endettement extérieur à 52% du PIB.
L’orateur a mis en garde contre les risques de change réel marquant les finances publiques surtout que la structure de la dette du pays est constituée, dans ses deux tiers, de devises. Il a ainsi appelé à l’assainissement du climat des affaires, à la lutte contre la corruption, à la réforme fiscale et à l’allègement de la pression sur la balance des paiements.
Le député Slim Besbès a souligné, de son côté, que ces dettes existaient déjà avant la révolution, en ce sens que le taux de l’endettement était estimé à 41% du PIB en 2010, pour être accompagné après la Révolution, soit en 2011, par un taux de croissance négatif. Il a précisé, dans le même cadre, que le taux de l’endettement a frôlé 46% en 2012 et 2013, avec un taux de croissance positive mais a bondi à 52% en 2014, indiquant que l’année 2017 sera marquée par un niveau record en matière de remboursement des dettes du pays.
Certains députés (Iyad Dahmeni, M’barka Aouaynia, Noômen El Ichi et Ahmed Saïdi ) ont reproché « les conditions astreignantes » de ce crédit, les considérant comme étant « une intrusion dans les affaires intérieurs du pays et une atteinte à sa souveraineté ».
En réponse aux interventions des députés, le ministre du développement, de l’investissement et de la coopération internationale, Yassine Brahim a fait valoir que cet accord de crédit a été conclu en 2013 (gouvernement de Ali Laarayedh), et que « la Tunisie se doit de tenir ses engagements en concrétisation du principe de la continuité de l’Etat ».
Le ministre a affirmé que le gouvernement actuel s’est engagé à présenter aux députés « un document d’orientation basé sur une vision stratégique d’avenir ainsi qu’un plan de développement pour les cinq prochains années », avec des précisions sur les principaux indicateurs macro- économiques et financiers, dont notamment l’endettement. Il convient de rappeler que l’ARP poursuivra, jeudi 05 mars 2015, à 10 heures du matin, le débat sur quatre projets de lois économiques à caractére urgent..