Avec l’émission d’obligations à impact social, les femmes peuvent ne pas être seulement des entrepreneurs de la nécessité, mais des entrepreneurs d’opportunités.
La BAD, dans sa quête de combler le manque de financement des femmes et corriger les inégalités qui les touchent, ne devrait-elle pas avoir un solide pipeline de projets à haut impact social pour l’inclusion du plus grand nombre de femmes dans l’économie? Ne devrait-elle pas aussi recourir davantage à des façons innovantes de financer celles-ci?
Autant de questions qui ont alimenté la table ronde que la Banque a initiée, le 5 mars, dans le cadre des événements précédant la célébration de la Journée internationale de la femme, le 8 mars. Cette table ronde était conjointement organisée par le Complexe des finances et l’Unité de l’Envoyé spécial pour les questions de genre de la BAD.
La rencontre a discuté de l’opportunité émergente de financer des programmes de genre sur le continent à travers l’émission d’une «obligation genre» (en anglais, Gender Bond), à fort impact social. Ce type d’instrument constitue une source innovante de financement ayant le potentiel d’ouvrir de nouvelles sources financières pour les opérations et programmes de la Banque qui débouchent sur des bénéfices sociaux mesurables.
L’émission obligataire genre serait ainsi proposée aux investisseurs publics et privés et contribuerait à mieux structurer l’Agenda du financement des femmes afin qu’elles puissent contribuer efficacement au développement.
Une présentation de Hassatou N’Sele, chef de division, a permis de cerner les contours et retombées de ces obligations. Ces obligations à impact social qui sont une innovation en termes d’investissement auront des retombées aussi bien pour les femmes que pour leur communauté.
En outre, les parties prenantes aux projets peuvent en retirer des bénéfices. D’une part, les projets bénéficient du financement dont ils ont besoin. D’autre part, si les investisseurs privés (branche investissement à impact des grandes banques d’investissement internationales, organisations philanthropiques) supportent la totalité des risques financiers, ils ne sont pas pour autant des philanthropes seulement tournés vers le social, car ils peuvent espérer obtenir une rémunération du crédit, en cas de succès du projet financé. Avec en prime les acquis, en termes d’image, de la coresponsabilité sociale de l’entreprise.
Ce type d’obligations à impact social ou sur le développement amène les secteurs public et privé à travailler ensemble et trouver des solutions pour des questions sociales ou de développement spécifiques.
Au préalable, il s’avèrera nécessaire d’augmenter le portefeuille de projets financés par la BAD et qui, à la base, ciblent le genre. Car, à titre comparatif, la Banque a aujourd’hui très peu de projets dont l’objectif principal est le développement des femmes. La ligne de crédit à l’institution de microfinance “Lift Above Poverty Organisation“ de 12 millions de dollars semble être un des rares projets de la Banque dans ce domaine, alors que la Société financière internationale, avec son programme de «Banking on Women» en direction des femmes possédant une entreprise en Amérique Latine, en Afrique, en Asie de l’Est et Europe de l’Est (portefeuille d’environ 700 millions de dollars) a pu lancer des emprunts obligataires genre sur les marches financiers et démontrer son engagement envers le genre.
A la BAD, le pipeline pourrait s’appuyer sur une transversalité des secteurs (infrastructures, agro-industrie, nouvelles technologies, mines, etc.).
En définitive, la table ronde a eu le mérite de poser les bonnes questions sur: la façon de mieux structurer ces obligations – les retombées sociales à prioriser… L’aboutissement de cette réflexion «en cours et en bonne voie» à la BAD permettrait d’inverser la tendance et faire en sorte que «les femmes ne soient pas des entrepreneurs de la nécessité, mais des entrepreneurs d’opportunités».
Les autres panélistes étaient Stephan Nalletamby, directeur du Département du développement du secteur financier; Désiré Vencatachellum, directeur Département de la mobilisation des ressources et des financements extérieurs (FRMB); et Linet Mitiri, spécialiste en genre. Le modérateur était Basil Jones, assistant auprès de l’économiste en chef.
Une Task Force a été la cheville ouvrière de l’événement. Il s’agit de Josselyne Ahogny (coordinatrice), Serign Cham (FRMB), Leyla Traoré (FFMA), Densil Magume (FNVP) et Kennedy Odondi (SRP).
Source : BAD