Le terrorisme vient de frapper de nouveau. Cette fois-ci de manière spectaculaire, il a touché le centre de la capitale et un lieu de souveraineté nationale, le musée du Bardo. Le bilan est catastrophique. Aux dernières nouvelles, cette attaque aurait fait 22 morts -dont 17 touristes étrangers- et 50 blessés. L’attentat a été sanctionné, heureusement, par l’assassinat des terroristes et la libération des otages.
Cet acte terroriste intervient, à peine un mois après un attentat qui a eu lieu à Kasserine. Quatre jeunes gendarmes ont été abattus lâchement dans un traquenard qui leur était tendu, dans la nuit, à proximité du village Boulaaba par une vingtaine de terroristes qui, après leur sinistre forfait, ont eu le temps de désarmer leurs victimes et de subtiliser leurs portables avant de se volatiliser, sans subir aucune perte.
Tout contribuable tunisien se pose aujourd’hui la question suivante: comment deux terroristes ou trois terroristes ont pu s’introduire, même par effet de surprise, dans l’enceinte du mussée du Bardo et commettre un tel massacre? Comment ces terroristes ont pu être informés de l’arrivage d’un grand nombre de touristes, ce jour-là? Comment, comment, comment…?
Une chose est sûre, le massacre du musée du Bardo aura des conséquences économiques néfaste pour la Tunisie, pendant plusieurs années.
Il prouve de manière éloquente et plus que jamais qu’il existe quelque part des défaillances qui doivent être corrigés et éventuellement sanctionnées avec la plus grande sévérité.
Il y va hélas de notre sécurité d’autant plus qu’il a été précédé par d’autres attentats accomplis dans les mêmes circonstances de relâchement, d’insouciance.
Pour ne citer que celui de Boulaaba à Kasserine, zone réputée pour être très dangereuse et supposée être bien contrôlée par les forces de sécurité (armée + garde nationale), depuis au moins trois ans.
Ces mêmes forces de sécurité l’appellent d’ailleurs «le triangle de la mort» dans la mesure où elle est située au carrefour de Kasserine et des monts Chaambi et Semmama où séjournent depuis trois ans des terroristes relevant de Qatiba Okba Ibn Nefaa.
Les mêmes erreurs se répètent
L’assassinat, qui rappelle étrangement une dizaine d’attentats antérieurs, suscite, encore une fois, moult interrogations sur le rendement de notre système de sécurité, et surtout sur notre aptitude à tirer les enseignements requis.
Le scénario est toujours le même. Des gendarmes, sous-équipés, sous-informés, sous-armés et sous-protégés, sont toujours pris de court par les terroristes. C’est le cas de l’assassinat, le 23 octobre 2013, à Sidi Ali Ben Aoun (gouvernorat de Sidi Bouzid), de six gardes nationaux dont Socrate Cherni. C’est le cas aussi de l’assassinat, le 17 octobre 2013, à Goubellat (gouvernorat de Béja) de deux gendarmes.
Idem pour les attentats ciblant les militaires. La technique est, également, la même. Elle a été utilisée dans les assassinats commis, au mont Chaambi, respectivement le 29 juillet 2013 à Sabaa Diar (8 soldats morts dont au moins cinq égorgés), et le 16 juillet 2014 à Henchir Tella (15 soldats tués en plein mois de Ramadhan).
Chaque fois, les terroristes, bien informés, exploitent un certain «relâchement», voire une certaine légèreté dans la gestion des déplacements des forces de sécurité pour lui infliger de lourdes pertes.
Ce qu’on oublie toutefois, c’est que le système de surveillance est souvent informé de l’imminence de ces attentas. Malheureusement, l’information n’arrive jamais à temps aux troupes et gendarmes sur le terrain. Il y a manifestement un déficit de communication, de coordination et de responsabilité.
Le rendement de notre sytème de sécurité pose problème
Avec les attentats du musée du Bardo et de Boulaaba, les responsabilités doivent être délimitées. Au plan institutionnel, les forces de sécurité et leur rendement doivent être soumis au contrôle de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
Par ailleurs, le terrorisme au mont Chaambi commence à avoir un coût exorbitant. Il importe d’y pallier au plus vite et avec le maximum d’efficacité. Il y va de la crédibilité des forces de sécurité. Il est vrai qu’aucun corps n’était préparé au terrorisme, mais après trois ans de lutte contre ce fléau, il est temps de réaliser des résultats.
Car, l’incompétence, c’est également du terrorisme. Les deux fléaux sont des actes de violence. Tous deux génèrent constamment des victimes. C’est pour dire que beaucoup d’attentats auraient pu être évités.
L’attentat du musée du Bardo aurait pu être évité si les forces de sécurité qui étaient chargées de la surveillance du musée étaient des professionnels et à leur poste. L’attentat de Boulaaba aurait pu être évité si le véhicule qui transportait les quatre gendarmes était blindé ou accompagné par un véhicule d’appui de protection. Après ce dernier attentat, la décision de l’actuel ministre de l’intérieur, Najem Gharsali de doter les gendarmes opérant à Kasserine de véhicules blindés arrive trop tard. Le mal est hélas fait.
Au-delà de ces défaillances, la question qui se pose dès lors est la suivante: si nos forces de sécurité ont du mal à mater des essaims de terroristes sur les hauteurs de Kasserine, que feraient-elles si jamais le pays était attaqué sur tous les fronts?
Autre question qui mérite d’être posée. Jusqu’à quand le gouvernement va continuer à tolérer, dans la cité, ces terroristes qui vivent parmi nous et au nombre desquels ces faux droits-hommistes, les blanchisseurs du terrorisme et bien sûr ces prédicateurs qui appellent tous les jours au Djihad, dans les mosquées.
Si cette incapacité est structurelle, il faut tout simplement y remédier. Faut-il pour cela fermer les frontières avec la Libye et avec l’Algérie? Il y va de la sécurité de tous. Un débat national mérite d’être enclenché à ce sujet.