C’est clair, les Tunisiens ne célébreront pas dans l’allégresse, cette année, le 59ème anniversaire de l’indépendance. La joie ne sera pas au rendez-vous. Elle laissera, hélas, la place à la consternation et à la tristesse suite au massacre du Bardo qui a fait 23 morts dont 19 touristes et 47 blessés.
Après 59 ans d’indépendance, le Tunisien n’est pas au bout de sa peine. Sa lutte contre les forces du mal, hier les colons, puis Ben Ali et sa bande, et aujourd’hui les terroristes, est loin d’être finie.
Celle qu’il mène contre le terrorisme, depuis le soulèvement du 14 janvier 2011, a été particulièrement coûteuse. Une trentaine d’attentats ont fait une centaine de victimes dont une vingtaine de touristes.
Ce combat contre l’adversité peut même perdurer encore des années avec les futures batailles qu’il aura à mener contre d’autres fléaux tels que la corruption et la contrebande qui gangrènent l’économie du pays et qui nécessitent, pour leur éradication, de longues années.
La République indépendante a résisté aux crises
Néanmoins, en dépit de l’ensemble de ces malheurs et blocages, la Tunisie se porte bien. La République proclamée une année après l’accès à l’indépendance a bien résisté à toutes les tornades.
Est-il besoin de rappeler ici, pour le règne de Bourguiba durant 31 ans, le coup d’Etat avorté en 1962, l’échec de la politique de collectivisation des années soixante, les mouvements sociaux et estudiantins des années soixante-dix avec comme pointe la grève générale de 1978, l’agression armée commanditée, en 1980, par la Libye contre la Tunisie, la révolte du pain en 1984, la banqueroute de 1986, le putsch médical de 1987…
Au temps du règne de Ben Ali, la Tunisie indépendante est parvenue à absorber et à contenir d’importantes crises dont la répression des intégristes au début des années 1990, les attaques de Slimane par des salafistes djihadistes en 2006, la révolte du bassin minier en 2008 et le soulèvement de tout un pays au mois de décembre 2010.
Les mandats des présidents provisoires, Foued Mebazaa et Moncef Marzouki, ont été entachés, marqués par l’émergence du terrorisme, la démocratisation de la corruption et la recrudescence de la contrebande (trafics d’armes et de drogues).
Au cours du règne de la Troïka, la République indépendante a résisté au projet pernicieux des nahdhaouis de l’intégrer dans la mouvance internationale islamiste et de sa déstructuration par l’islam politique prôné par Ennahdha, promu, à l’époque, par un caprice de l’histoire, en parti majoritaire et gouvernant.
A l’origine ,la mégalomanie des dirigeants
La Tunisie indépendante aurait pu faire l’économie de ces crises, faire mieux et réaliser plus de prospérité et de croissance pour les Tunisiens n’eussent été les erreurs et errements des présidents qui se sont succédé à la tête du pays.
Au nombre de ces errances criminelles figurent l’autoritarisme excessif, le régionalisme, la présidence à vie, le clientélisme, le sous-développement aux dépens des libertés et de la démocratie, l’ultralibéralisme, la kleptocratie érigée en système de gouvernance, le populisme de Marzouki, la complicité d’Ennahdha avec les mouvements terroristes (Ansar Chariaa et compagnies…).
L’ensemble de ces errances ont pour dénominateur commun la mégalomanie. Ce désir excessif de puissance et d’enrichissement illicite a spolié le pouvoir du peuple.
Pour une reconquête du pouvoir par le peuple
Conséquence, depuis 1956, et jusqu’à ce jour (l’ère Essebsi comprise), «les Tunisiens ont marché sur leur tête». Autrement dit, ils ont eu à subir le diktat de dirigeants qui ont pensé et agi en leur nom.
Seulement, avec l’esprit de liberté qui souffle sur le pays depuis le 14 janvier 2011, et l’émergence d’une société civile dynamique, les choses ont bel et bien changé. Le Tunisien est devenu plus indépendant et plus exigent.
C’est pourquoi, dorénavant et abstraction faite des difficultés conjoncturelles, il faut cravacher pour gagner la sympathie du Tunisien. Ce n’est qu’une question de temps.
Alors laissons le temps au temps.