Quatorze ans, déjà! Parti de Porto Allegre au Brésil, le courant de “l’Alter-mondialisme“ s’est révélé à la communauté internationale par la contestation de la globalisation. A l’heure actuelle, ce courant, en plus de la dénonciation de l’ordre libéral, rejette le terrorisme. La question demeure entière: “Un autre monde est-il possible?“
Le Forum Social Mondial (FSM) se réunit à Tunis pour la deuxième fois après son édition du mois de mars 2013. Le FSM existe depuis 2011 et cette fiesta des organisations citoyennes et de la jeunesse engagée prend un format de “Campus international du printemps“. Il est toujours régi par le “Conseil International“ composé d’une quarantaine d’ONG. Ils seraient près de 60.000 participants de plus de 120 nationalités à se réunir à Tunis entretenant un climat d’effervescence intellectuelle typique du manifeste de Porto Allegre. En ajoutant son rejet du terrorisme, le forum reste dans le cadre de sa charte de principes*
La symbolique de Porto Allegre
La capitale brésilienne de l’Etat de Rio Grande Do Sul, a été le berceau du Forum Social Mondial en 2001. Cette métropole brésilienne a été gouvernée à partir de 1988 par des élus municipaux issus du parti des travailleurs pendant 16 années consécutives jusqu’en 2004. Les élus du parti des travailleurs avaient favorisé un climat de démocratie participative avec une structure pyramidale. C’était un écosystème où les citoyens avaient le droit d’intervention directe dans la gestion des affaires de la ville. Ils commandaient à l’allocation des investissements collectifs et supervisaient une justice redistributive. C’était un modèle d’autogestion, propre, qu’on croyait transposable.
Cette ambiance favorisait en plus un débat public autour des questions sociales liées à la mondialisation.
Porto Allegre avait abrité le siège du forum jusqu’en 2004 qui est devenu itinérant, depuis. Il s’est d’ailleurs tenu notamment au Kenya, en Palestine, en Inde et deux fois en Tunisie.
L’esprit du Forum reste donc marqué cette résistance sociale à l’invasion de l’ordre mondial globalisé et aux ravages du développement inégal. Il est vrai que l’idéal défendu par le forum pouvait être compatible avec les revendications de la révolution tunisienne, notamment en matière de dignité, de liberté et de droit au travail.
Mais les suggestions du Forum, en l’absence d’une déclaration finale, étant donné que dans l’esprit des organisateurs le Forum doit rester un espace de débats d’idées et d’élaboration de projets, ont-elles une valeur scientifique? Articuler le système économique autour de l’économie sociale et solidaire est-elle une solution viable?
Le FSM, une grande kermesse
On peut regretter que le FSM n’ait pas accouché d’un Sommet Mondial comme celui qu’organise l’ONU autour des sujets planétaires tel celui de la terre ou de la société de l’information, qui a eu lieu à Tunis (SMSI). On a le sentiment que le FSM est l’inspirateur de grandes idées tel l’abandon de la dette odieuse et, à l’occasion du Sommet de Tunis, l’engagement citoyen international contre le terrorisme. Toutefois, il ne cherche pas à se muer en think tank et s’attache à rester une grande foire aux idées. Il demeure cet exutoire pour les sans-voix qui viennent entretenir une belle utopie, l’espoir d’un autre monde. Ce Chat à ciel ouvert se fait via une ceinture mondiale de libre concertation loin de toute doctrine et loin de la bienpensante. Et de ce fait, il reste un énorme ballon d’oxygène planétaire où la jeunesse vient crier sa colère, son originalité, son excentricité.
Cependant, il faut reconnaître qu’aux deux éditions de Tunis, les autorités politiques ont offert un certain encadrement au Forum. On ne décèle toutefois aucune idée ni de le récupérer ni de le censurer mais une attitude bienveillante. Le FSM devient un parloir familier et c’est tant mieux que les Etats l’entretiennent. C’est à la fois une reconnaissance et une revanche pour le Forum..