éroport Roissy-Charles-de-Gaulle, près de Paris, le 18 août 2014 (Photo : Kenzo Tribouillard) |
[25/03/2015 12:25:12] Paris (AFP) A 24 ans, un avion de ligne moderne s’achemine vers la fin de sa carrière mais ne s’avère pas pour autant dépassé techniquement, car il subit des opérations de maintenance très strictes, selon des experts.
Au lendemain de l’accident dans les Alpes de l’Airbus A320 de la compagnie allemande Germanwings, qui a fait 150 morts, l’âge de l’appareil a été souligné par les observateurs.
L’avion avait en effet été livré en 1991, selon un dirigeant de Germanwings, Thomas Winkelmann, ce qui en ferait l’un des plus anciens A320 en exploitation. Les premiers appareils de ce type ont été réceptionnés en 1988.
Mais l’âge n’est pas en lui-même un critère, les appareils modernes étant “conçus pour voler 30 ou 40 ans”, relève Bertrand Mouly-Aigrot, associé chez Archery Strategy Consulting, et spécialiste des transports aériens.
“Les avions en eux-mêmes peuvent voler 40 ans sans aucun problème tant qu’ils sont bien maintenus. Vingt-cinq ans, ce n’est pas vieux pour un avion”, renchérit Xavier Tytelman, expert en sécurité aérienne.
Certaines compagnies hors Union européenne font voler des appareils flirtant avec les 40 ans, comme Iran Air qui, selon son site internet, opère toujours des Boeing 747-200 acquis à l’époque du Chah, et ce malgré l’embargo américain sur les équipements de haute technologie.
Des Lockheed Tristar, dont les derniers modèles ont été livrés en 1984, sont encore utilisés par des compagnies charter en Asie, et pour l’anecdote, d’antiques Douglas DC-3, produits dans les années 1930-40, opèrent sur des lignes régulières du Grand Nord canadien. Même les deux prestigieux 747 utilisés par la présidence américaine (“Air Force One”) ont aujourd’hui un quart de siècle.
Les 772 appareils de la compagnie aérienne américaine Delta ont 16,9 ans en moyenne, selon son site internet. Parmi ses avions encore en service: 117 MD-88 (24,2 ans d’âge moyen) et 124 Boeing 757-200 (19,8 ans).
A 25 ans, un appareil utilisé sur de grandes lignes se trouve “dans ses dernières années de service commercial”, concède M. Mouly-Aigrot.
– Facteur déterminant: le coût, pas l’âge –
Mais “il n’y a pas véritablement d’obsolescence technique des avions, il y a plutôt une obsolescence économique”, remarque Jean-Paul Troadec, ancien directeur du Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA).
“Si un avion est considéré comme trop vieux pour être exploitable, c’est parce qu’il va avoir une consommation de carburant et des coûts d’entretien qui deviennent supérieurs à ceux des avions les plus récents”, explique-t-il.
Pour des entreprises gérant des flottes de dizaines voire de centaines d’appareils, l’équation des coûts d’exploitation et du prix unitaire des avions peut inciter à passer à une génération moins gourmande en kérosène, notamment vu l’arrivée prochaine de modèles modernisés comme l’Airbus A320neo ou le Boeing 737 MAX.
Vieux ou récents, tous les appareils en service sont néanmoins soumis à des contraintes d’entretien drastiques, rappelle M. Tytelman, avec tous les cinq ans des visites représentant “40.000 heures” de travail.
“L’appareil est quasiment démonté, puis remonté” lors de cette opération appelée “grande visite”, abonde M. Mouly-Aigrot. “Ce sont des opérations de maintenance lourdes, très rigoureuses et détaillées” après lesquelles l’avion pourra repartir “pour une longue période d’exploitation”. Cet entretien doit en outre être validé par les autorités de l’aviation civile, dit-il.
Selon M. Winkelmann de Germanwings, l’avion avait justement subi une grande révision “à l’été 2013”, comme le prévoyaient les livrets d’Airbus.
“Un avion de 24 ans ne peut pas être considéré comme techniquement dépassé”, vu le programme obligatoire d’entretien et d’inspection auquel il est astreint, résume M. Troadec.
Le patron de Lufthansa, Carsten Spohr, a affirmé mercredi que l’avion de sa filiale Germanwings était “techniquement irréprochable” et a qualifié l’accident d'”inexplicable”.