Tunisie – Economie : Le modèle de développement proposé par Habib Essid est fort intéressant

econoie-radisocopie-680.jpgCeux qui ont réagi à l’allocution télévisée Habib Essid ont été particulièrement virulents. Ils ont tenu à l’endroit du chef du gouvernement un discours réducteur, un discours le moins qu’on puisse dire déplacé en ce sens où le nouveau gouvernement n’a, à son actif, que cent jours de gouvernance. Zoom sur la portée de ces réactions.

Ces réactions négatives sont compréhensibles pour les incultes facebookeurs, voire ces nihilistes, partisans de «l’ici et maintenant», mais elles sont inadmissibles de la part d’économistes et d’experts. Ces derniers ont vu dans ce discours du «populisme», «des professions de foi» et «une aventure périlleuse», s’agissant, notamment de la décision d’augmenter, au nom de la paix sociale, les salaires pendant trois ans.

Pourtant, à regarder de près et abstraction du «constat catastrophique» fait de la situation économique actuelle, du reste fort connue de l’ensemble des Tunisiens, le message du chef du gouvernement est à la fois pragmatique et révolutionnaire.

Pragmatisme

Il est pragmatique à travers au moins quatre décisions: l’engagement à renforcer la sécurité du pays, particulièrement, sur le flanc sud du pays, l’engagement à exécuter les projets de développement bloqués, l’engagement à accélérer la réalisation de tronçons autoroutiers au sud-est (Gabès-Médenine-Ras Jedir, au centre (Sfax-Skhira) et au nord-ouest (Oued Zarga-Bou Salem), l’engagement à instaurer la paix social et à négocier, à cette fin, avec la centrale syndicale (UGTT) des augmentations salariales sur trois ans. En vue de la concrétisation des conventions signées, le démarrage des négociations sur l’augmentation des salaires dans le secteur public pour l’année 2014 et la préparation des négociations sociales pour les deux ou trois années à venir.

Le message du chef du gouvernement est révolutionnaire quand il a annoncé les grandes lignes d’un nouveau modèle de développement à forte valeur ajoutée et en nette rupture avec le passé. Il s’agit d’un modèle qui repose sur l’économie verte, l’économie numérique et l’économie sociale et solidaire.

Un modèle révolutionnaire

Ce modèle tranche avec l’ancien modèle qui gérait le pays comme un butin et consacrait clientélisme, régionalisme et dépendance excessive de l’extérieur, avec comme corollaire peu d’intégration de l’industrie locale. Pis, ce même modèle a conduit à une pollution industrielle multiforme, au gaspillage (compensation), à l’épuisement des ressources non renouvelables (fermeture de mines), et à la destruction de l’environnement. La pollution qui prévaut à Gabès, Gafsa, Sfax, Kasserine, Ben Arous et dans d’autres villes en est une éloquente illustration.

Par contre, le nouveau modèle proposé par Habib Essid va servir en priorité le Tunisien et son environnement. A preuve, les économies qui feront l’ossature du nouvel modèle de développement sont propres et respectueuses de l’être humain et de l’environnement dans lequel il évolue. A titre indicatif, l’économie verte est par essence l’activité économique «qui entraîne une amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux et la pénurie de ressources».

L’économie verte obéit aux règles, aux principes et aux critères du développement soutenable. Il est lié au respect de la nature et cherche à maintenir le capital naturel en équilibre, c’est-à-dire à ne pas consommer plus de ressources que ce que les écosystèmes, la terre, la mer et le soleil peuvent fournir, tout en maintenant les services éco-systémiques équitablement disponibles pour tous et pour les générations futures.

S’agissant de l’économie numérique, à travers son support majeur, les technologies de l’information et de la communication (TIC), elle peut être d’un grand apport pour la compétitivité des entreprises tunisiennes et l’assurance de la transparence à travers la dématérialisation des transactions, y compris les appels d’offres publics (18% du PIB) qui ont été hélas le talon d’Achille des gouvernements tunisiens.

Quant à l’économie sociale ou économie sociale et solidaire (ESS) dont le principe est de concilier l’activité économique et l’utilité sociale, elle favorise le commerce équitable et l’insertion par l’activité économique. Elle permet aux régions marginalisées par l’effet des pratiques gouvernementales aux relents régionalistes de bénéficier d’une discrimination positive et d’avoir la chance de rattraper, un tant soit peu, les progrès enregistrés par les régions du littoral.

C’est pour dire au final qu’il n’y a que des avantages à prendre avec le nouveau projet de modèle de développement proposé par le chef du gouvernement.