L’exécutif insiste sur la politique de l’offre mais avec des “ajustements”

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économiques de son gouvernement (Photo : LOIC VENANCE)

[08/04/2015 19:10:15] Paris (AFP) L’exécutif a insisté mercredi sur sa stratégie de la politique économique de l’offre, avec un nouveau coup de pouce fiscal pour les entreprises, sans pour autant négliger les proches de Martine Aubry et l’aile gauche du PS, à quelques semaines d’un congrès à haut risque du parti.

“C’est vraiment une réponse, avec les moyens du bord, pour satisfaire une partie de la majorité. Ce que voulaient notamment les aubrystes, c’était faire des dispositifs qui soient plus ciblés sur l’investissement, en reprochant au CICE et au pacte d’être des montants importants absolument pas conditionnés”, souligne à l’AFP une source gouvernementale.

Il s’agit donc de garder le cap sur le fond – avec de nouvelles mesures de soutien aux entreprises pour restaurer leurs marges et la compétitivité, dans la droite ligne des 40 milliards d’euros du pacte de responsabilité. “On accélère”, insiste-t-on à Matignon. Mais avec des “ajustements nécessaires”, selon la formule employée par Manuel Valls en présentant à l’Elysée les nouvelles mesures du gouvernement.

“Le dispositif fiscal est plutôt intéressant parce qu’il est ciblé. Donc c’est une politique de l’offre, mais maîtrisée, parce qu’il faut investir dans des biens industriels et plutôt à destination des PME”, juge Mathieu Plane, économiste à l’OFCE (keynésien).

Avec la mesure principale annoncée – une baisse d’impôt sur les sociétés pour les entreprises qui investiront dans les douze prochains mois, via un mécanisme de “suramortissement”- “vous maîtrisez l’orientation fiscale”, souligne-t-il. Avec le CICE “rien n’empêchait, typiquement, d’utiliser le crédit d’impôt pour verser des dividendes, là ce n’est pas possible directement”, salue l’économiste.

Autre signal majeur vers la gauche: la promesse d’un compte personnel d’activité pour le 1er janvier 2017, qui doit “regrouper” plusieurs dispositifs existants déjà jugés complexes (compte formation, pénibilité, droits au chômage rechargeables, comptes épargne-temps…)

Si les proches de Martine Aubry ne se sont pas précipités pour dire leur satisfaction, l’accueil est plutôt favorable.

“Ce sont des annonces à saluer”, a dit le député de l’Ardèche Olivier Dussopt dans une question à Manuel Valls à l’Assemblée. “Car s’il n’est pas aujourd’hui question de remettre en cause le choix fait en 2012 de soutenir la compétitivité de l’économie, nous entrons dans une période, et nous le savons tous, qui nécessite des mesures en faveur de la croissance de l’emploi et du pouvoir d’achat”, a-t-il dit.

Des députés PS comme Karine Berger (Hautes-Alpes) ont appelé à faire davantage pour l’investissement public – Manuel Valls ayant promis des mesures pour les collectivités locales pour la mi-mai.

– Une ‘étincelle’ –

Les “frondeurs” du PS, qui viennent de s’allier avec les courants de l’aile gauche pour une motion commune en vue du congrès PS de Poitiers début juin, se sont montrés beaucoup plus déçus.

“Décevant et très en-deçà de la main. Rien de concret sur le pouvoir d’achat mais 2,5 milliards de plus pour les patrons”, a tweeté le député parisien Pascal Cherki. Même déception chez Pouria Amirshahi (Français de l’étranger).

Des économistes interrogés par l’AFP soulignaient pour leur part davantage le montant restreint des mesures annoncées -500 millions d’euros annuels, selon Matignon. Et concentraient leurs inquiétudes sur les carnets de commandes des entreprises, malgré la baisse favorable de l’euro sur le marché des changes.

“Cela va dans le bon sens mais ce n’est pas une miette de défiscalisation qui décide une entreprise à investir ou non, ce sont ses perspectives de demande, son carnet de commandes”, souligne Ludovic Subran (Euler Hermes).

“En cumulé, le pacte, le CICE, cette mesure, ça commence à peser, mais il y a des entreprises qui préféreraient aujourd’hui mourir riches plutôt que d’investir”, s’inquiète l’économiste.

“Les montants en jeu ne sont pas énormes: il ne faut pas s’attendre à relancer l’investissement grâce à ça. Mais cela permet de soutenir un secteur industriel qui génère de la compétitivité et qui est plutôt en difficulté”, souligne pour sa part M. Plane.

Alors que le CICE et le pacte de compétitivité avaient comme défaut de prendre du temps à se mettre en place, le gouvernement veut cette fois provoquer rapidement une “étincelle”. Avec le dispositif, les entreprises sont incitées à investir. “Pas dans six mois, aujourd’hui”, a insisté Manuel Valls.