Des étudiants face à des chefs d’entreprise. Parce que ce genre de rencontres de nature à aider les deux parties à mieux se connaître et, partant, s’apprécier et à faciliter leur convergence et interaction, est malheureusement rare, l’Université La Manouba a décidé d’en organiser une pour, selon le mot de Ouajdi Souilem, vice-président, «renforcer l’ouverture de l’université sur les entreprises, rapprocher leurs points de vue et permettre aux employeurs de connaître les préoccupations et les centres d’intérêt des étudiants».
La rencontre a eu lieu en février dernier entre, d’un côté, des étudiants de l’Institut supérieur des arts multimédias de La Manouba (ISAMM), l’Institut supérieur de documentation de Tunis (ISD) et l’Institut supérieur de comptabilité et d’administration des entreprises (ISCAE), et, de l’autre, trois chefs d’entreprise et pas n’importe lesquels: Abdelwaheb Ben Ayed (président de Poulina Group Holding), Hatem Denguezli (P-DG de Land’Or), et Fateh Belhaj Ali (directeur associé d’Archive Your Docs).
Pour «vendre» leurs étudiants à ces trois représentants du monde de l’entreprise, c’est-à-dire en montrer les capacités, les enseignants de l’ISAMM et de l’ISD ont choisi de donner la parole à quatre parmi leurs meilleurs étudiants qui sont montés sur scène pour parler de leurs motivations, ambitions et projets.
Les managers donnent de leçon de choses entrepreneuriales
Mais, surtout, les étudiants ont, à cette occasion, eu droit à une leçon de choses entrepreneuriales en interrogeant les trois chefs d’entreprise invités sur la manière de concevoir un projet, le concrétiser et le réussir.
Abdelwaheb Ben Ayed: rêver mais ne pas être rêveur…
A tout seigneur tout honneur, c’est Abdelwaheb Ben Ayed qui a été le premier à parler de son parcours. Le témoignage du président de PGH a certainement rassuré ceux –probablement nombreux- parmi les étudiants qui, même arrivés à la fin de leur cursus universitaire, n’ont pas de projets en tête.
M. Ben Ayed a en effet eu la modestie de reconnaître qu’à la fin de ses études il ne savait pas, malgré trois licences en poches, ce qu’il voulait faire dans la vie.
Déçu par un premier job d’ingénieur principal dans le public, le futur patron de PGH envisage un moment d’émigrer au Canada. Mais y renonce après que lui est venue l’idée de se spécialiser dans l’aviculture –dont la Tunisie, privée d’une grande partie de son cheptel par la collectivisation, avait grandement besoin.
Avoir un rêve c’est nécessaire mais guère suffisant. D’abord, il «faut rêver de manière concrète et éviter d’être un rêveur». Ensuite, recommande M. Ayed, il faudrait avoir plusieurs rêves, se limiter «à un seul au début et essayer de se former de manière en rapport avec ce rêve». Notamment en lisant beaucoup.
Le président de PGH a beaucoup lu et a été marqué à vie par un livre: “Le management multiplicateur“ d’Andrew Grove.
Enfin, «il faut transformer (le rêve) en stratégie puis en projet réalisable», et cela nécessite de se transformer en gestionnaire. Et il faut du temps pour cela. Le patron de PGH a mis sept ans pour en arriver à la concrétisation de son projet.
Hatem Denguezli voulait être libre…
Preuve qu’une rencontre peut marquer la vie d’une personne et en déterminer le parcours, Hatem Denguezli l’a été par celle que l’étudiant en médecine vétérinaire a eue à 20 ans avec… Abdelwaheb Ben Ayed.
Etudiant, le patron de Land’Or, mu par «une très grande envie d’être libre», avait une obsession: «ne pas avoir de patron». A vingt-trois ans, lui aussi n’avait pas encore d’idée claire sur ce qu’il voulait faire. Dans un premier temps, il envisage de se lancer dans la charcuterie hallal mais, pour cause de crise de la vache folle, ce sera un «projet mort-né». Finalement, ce sera le fromage.
Mais d’après le patron de Land’Or, «peu importe ce que vous voulez faire», l’essentiel est d’être… heureux. Et on peut l’être en étant en harmonie avec soi et avec les autres.
Fateh Belhaj Ali voulait être son propre patron…
Fateh Belhaj Ali, qui s’est lancé dans l’entrepreneuriat avec deux ingénieurs, rêvait de «gagner de l’argent» en pratiquant sa passion: faire du logiciel. Pour réussir à le faire, le directeur associé d’Archive Your Docs conseille d’«y croire tous les jours» et se poser chaque matin la question de savoir «ce que je dois faire aujourd’hui pour réaliser mon rêve». Car si «les opportunités se présentent à tout le monde, seuls ceux qui y sont préparés» vont pouvoir les saisir..