éens, se battent pour réorganiser leurs circuits de commercialisation (Photo : Georges Gobet) |
[22/04/2015 13:27:24] Perpignan (AFP) Les producteurs de pommes, déstabilisés par la décision de la Russie d’interdire l’importation de produits européens, se battent pour réorganiser leurs circuits de commercialisation et chercher de nouveaux débouchés, en espérant la fin de l’embargo.
Le 6 août dernier, alors même que la filière européenne de la pomme réunie en Turquie “annonçait une production record pour 2014 de 12 millions de tonnes, nous avons appris l’embargo russe”, raconte Daniel Sauvaitre, président de l’Association française pommes-poires, lors du MedFel, salon des fruits et légumes européens qui se déroule jusqu’à jeudi à Perpignan.
En comptant un million de pommes produites de plus que l’année précédente, plus les 800.000 tonnes de pommes habituellement exportées vers la Russie et les stocks restant de la campagne précédente, “les opérateurs se sont dit qu’on était en surproduction de 2 millions de tonnes de pommes et ont donc consenti des prix faibles”, poursuit-il.
Huit mois plus tard, la situation globale de la pomme européenne n’est pas aussi mauvaise que prévu. En raison de la qualité de la récolte et des bas prix “il y a une satisfaction au niveau des volumes consommés”, mais cela ne doit pas cacher une “ambiance dramatique chez certains producteurs”, souligne M. Sauvaitre.
Car le bilan devrait presque se faire variété par variété.
Ainsi en France, les pommes “pink lady, reine des reinettes, ou canada grises ont fait un bonne campagne car il y a un lien entre le consommateurs et ces variétés”, explique-t-il. Alors que les galas, les goldens ou les grannys pour lesquelles “personne ne maîtrise les différenciations d’origines” car elles sont produites partout à travers le monde, ont fait une mauvaise campagne.
– Pas de raz-de-marée des pommes polonaises –
Par ailleurs, il n’y a pas eu le raz-de-marée attendu de pommes polonaises sur le marché européen.
D’une part, les variétés polonaises “ne sont pas prisées par nos consommateurs”, selon M. Sauvaitre. D’autre part, “les pommes polonaises ont continué à accéder au marché russe au prix de +coûts administratifs élevés+”, manière pudique de parler de la corruption des douaniers, ajoute-t-il.
Mais pour combattre la surproduction qui a touché tous les producteurs, même ceux qui n’exportaient pas vers la Russie, les opérateurs ont dû faire des efforts titanesques car il n’est pas aisé de reporter sa production sur d’autres marchés.
Il faut avoir les moyens logistiques, ainsi qu’un accord phytosanitaire entre les pays exportateurs et importateurs.
“Une négociation phytosanitaire pour l’ouverture d’un marché c’est en moyenne quatre à cinq ans de négociations”, explique Daniel Soares, responsable du marketing international de l’association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (Interfel).
Car depuis la création de l’OMC et la chute progressive des barrières tarifaires dans le monde, certains pays utilisent les mesures de protection sanitaires comme une technique de protectionnisme, avec parfois des critères impossibles à remplir.
“Les pays qui nous imposent ça sont essentiellement en Asie et en Afrique”, indique M. Soares.
“Nous n’avons pas pu exporter vers le Japon car ils nous demandaient d’ébouillanter nos pommes pendant trois heures”, raconte ainsi le directeur du groupe coopératif français BlueWhale, Alain Vialaret.
BlueWhale exporte ses produits, essentiellement des pommes, dans près de 80 pays, et 8% de sa production partait à destination de la Russie.
“Nous avons toujours joué une politique de marque et exporté du haut de gamme. Nous nous sommes donc reportés sur l’Asie, le Moyen Orient, l’Angleterre, l’Espagne et l’Amérique du sud”, explique-t-il.
Un report vers d’autres marchés qui n’est pas donné à tout le monde car “les liens entre clients et consommateurs ne se fait pas en quelques jours et il faut un savoir faire sur l’emballage, la logistique et le marketing”, ajoute M. Vialaret, ce qui n’est pas forcément le cas de la Pologne.
Et tous les producteurs espèrent que l’embargo prévu pour un an sera levé en août prochain.
“En marge de ce qui se passe au niveau politique, nous maintenons le travail sur les dossiers techniques en cours pour être prêts quand le marché russe rouvrira”, indique Eric Guasch, président de l’Association France-Russie pour l’agroalimentaire.