Le Japon retrouve des couleurs au 1er trimestre, mais prudence de mise

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à Tokyo, le 18 février 2015 (Photo : Kazuhiro Nogi)

[20/05/2015 05:40:24] Tokyo (AFP) La croissance s’est accélérée au premier trimestre au Japon, qui se relève doucement d’une récession, mais la consommation des ménages reste atone, un défi pour le gouvernement et la Banque du Japon (BoJ) aux prises avec une déflation tenace.

Le produit intérieur brut (PIB) a progressé entre janvier et mars de 0,6% d’un trimestre sur l’autre, après une expansion de 0,3% dans les trois derniers mois de 2014, a annoncé mercredi le gouvernement.

Ce chiffre, supérieur aux attentes des économistes, a agréablement surpris les investisseurs à la Bourse de Tokyo, où l’indice Nikkei gagnait 0,72% à mi-séance.

La bonne surprise est venue des entreprises, dont les investissements non-résidentiels ont basculé dans le vert (+0,4%). Elles ont en outre augmenté leurs stocks, contribuant positivement au PIB. A noter aussi, la bonne forme du marché immobilier.

Les exportations sont restées solides dans un Archipel qui a affiché en mars son premier excédent commercial en trois ans, mais les volumes d’importation se sont élevés à un rythme soutenu, si bien que le commerce extérieur net a freiné la croissance sur la période.

– Un feu de paille ? –

Si certains économistes ont salué “de bons chiffres du PIB”, tous n’étaient pas de cet avis. “L’accélération s’explique essentiellement par le bond constaté au niveau des stocks”, a ainsi estimé Marcel Thieliant, de Capital Economics, qui prédit “un ralentissement” au second trimestre et une croissance “proche de zéro” sur l’ensemble de 2015.

Point noir, la consommation des ménages, fortement ébranlée par une augmentation de la TVA nippone en avril 2014, a encore manqué d’éclat (+0,4%) en ce début d’année.

La faute à des rémunérations qui ont tendance à stagner dans un marché du travail certes quasiment en plein emploi (taux de chômage de 3,4%), mais où la précarité progresse.

Les négociations salariales du printemps ont débouché sur des hausses significatives mais il n’est pas sûr que cette tendance favorable s’étende aux PME ainsi qu’aux zones rurales, avertit Harumi Taguchi, économiste du cabinet IHS.

Un scepticisme partagé par Yasutoshi Nagai, économiste en chef au sein de de la maison de courtage Daiwa Securities, interrogé par l’agence Bloomberg.

Il ne voit pas se dessiner le “cercle vertueux” qu’appellent de leurs voeux le Premier ministre conservateur Shinzo Abe et le gouverneur de la BoJ Haruhiko Kuroda. Et d’évoquer “une reprise qui devrait rester fragile”, assortie d’une inflation anémique.

Plus optimiste, le Fonds monétaire international (FMI) avait relevé mi-avril ses projections et table désormais sur une croissance de 1% en 2015.

En 2014, le Japon avait vu son PIB se contracter de 0,1% (selon les données révisées négativement publiées mercredi), un revers pour le gouvernement, après une croissance de 1,7% en 2012 et de 1,6% en 2013.

– BoJ: statu quo en vue –

Dans ce contexte difficile, l’inflation a marqué le pas. Actuellement proche de zéro, elle pourrait chuter dans les prochains mois, a récemment averti la BoJ, contrainte de revoir sa copie.

Désigné il y a deux ans par Shinzo Abe pour conduire le volet monétaire de sa stratégie de relance, dite des “abenomics”, Haruhiko Kuroda espérait à l’origine atteindre son objectif ultime de hausse des prix de 2% au cours de ce printemps. Mais au vu du retard pris, il vise désormais l’horizon 2016.

Il demeure néanmoins persuadé que l’économie est sur la bonne voie. Il cite inlassablement les profits souvent inédits brandis par les grandes firmes, l’affaiblissement du yen – un atout pour les firmes exportatrices – et le déclin des prix du pétrole, dans un pays très pauvre en ressources naturelles.

Par ailleurs, “l’assouplissement monétaire, de concert avec les mesures du gouvernement, a sensiblement atténué l’état d’esprit déflationniste de la population”, a souligné le gouverneur de la BoJ la semaine dernière en jugeant qu’un nouveau geste n’était “pas nécessaire à l’heure actuelle”.

Les chiffres du PIB l’ont probablement conforté dans cette opinion. “Les statistiques d’aujourd’hui repoussent la probabilité d’un assouplissement à court par la banque centrale”, confirme M. Thieliant, mais elle n’y échappera pas avant la fin de l’année, de l’avis de