ôt sur le revenu (Photo : Philippe Huguen) |
[20/05/2015 15:39:18] Paris (AFP) Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, que le gouvernement souhaite instaurer, est un système plébiscité dans les pays développés, mais qui n’a pas que des partisans en France.
* Qu’est-ce que c’est?
Le prélèvement à la source consiste à faire collecter l’impôt des ménages en temps réel – c’est-à-dire au moment du versement au contribuable des revenus imposables – et directement par les entreprises ou les caisses de retraite, là où il est aujourd’hui payé l’année suivante, à l’administration fiscale.
L’idée n’est pas originale, puisque la quasi-totalité des grands pays industrialisés l’applique déjà.
Et elle est déjà partiellement en vigueur en France, où près de la moitié des prélèvements obligatoires – principalement les cotisations sociales et la contribution sociale généralisée (CSG)- sont déjà retenus à la source. L’impôt sur le revenu demeure, lui, collecté sur la foi de la déclaration annuelle du contribuable.
La retenue à la source est un serpent de mer: fin 2006, l’ancien ministre de l’Economie Thierry Breton avait proposé sa mise en place pour 2009. Mais n’avait pas été suivi par le gouvernement Fillon arrivé au pouvoir en 2007.
* Un impôt en temps réel, et plus “indolore”
Ce système serait plus simple et “indolore” pour le salarié, ce qui est de nature à favoriser l’acceptabilité de l’impôt. Le contribuable n’est plus contraint d’économiser pour verser une grosse somme au fisc, et il serait plus “rentable” pour l’Etat, en limitant les fraudes et le nombre d’agents.
Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), adossé à la Cour des comptes, avait toutefois relativisé cet argument dans un rapport en 2012, en relevant que 90% des contribuables recevaient une déclaration préremplie, que le paiement en ligne était de plus en plus répandu et qu’une majorité des contribuables étaient mensualisés.
Autre atout, l’impôt ainsi prélevé est en lien direct avec les revenus perçus par le contribuable, sans décalage d’un an. Cela permet donc aux personnes qui voient brutalement baisser leurs revenus (licenciement, départ à la retraite…) de bénéficier immédiatement d’une réduction de leur impôt.
L’impôt à la source entraînerait par ailleurs une plus grande réactivité du système pour traduire chez les contribuables les réformes fiscales.
* Des problèmes de confidentialité, et un casse-tête comptable pour l’Etat
Pour le CPO, un passage au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu présenterait malgré tout en France plus d’inconvénients que d’avantages.
Ce mode de recouvrement pourrait, selon lui, constituer une charge pour les tiers payeurs et soulèverait des problèmes de confidentialité, car ceux-ci devraient connaître la situation particulière et familiale du contribuable pour calculer l’impôt.
D’où la crainte que l’employeur ne soit influencé dans sa politique salariale, voire dans sa politique d’emploi. S’y ajoute la crainte de tensions dans l’entreprise. Deux collègues occupant la même fonction pourraient toucher un salaire net différent si leurs taux d’imposition étaient différents.
Le CPO avait aussi estimé que ce mode de prélèvement n’améliorerait pas non plus le recouvrement de l’impôt, qui dépasse déjà 99% en France. Il pourrait même coûter plus cher car l’administration devrait assurer le contrôle des entreprises.
Certains voient en outre dans la déclaration annuelle un acte civique.
Le passage au prélèvement à la source poserait aussi des problèmes pour gérer la transition la première année. Le contribuable, redevable de l’impôt dû pour l’année précédente, se verrait aussi ponctionné à la source pour l’année en cours. A moins que l’Etat ne renonce à une année de prélèvement…
Enfin le risque de conflit social: le principal syndicat des agents du fisc, Solidaires finances publiques, est vigoureusement opposé au système de retenue à la source qu’il a encore jugé mercredi “complexe et coûteux, tant pour les contribuables que pour les entreprises et l’administration”.
“Comment garantir que les montants collectés par les entreprises soient intégralement reversés à l’Etat lorsqu’on sait par exemple que la TVA collectée par les entreprises n?est déjà pas intégralement reversée?”, se demandait-il récemment.