éroport de Séville le 30 septembre 2013 (Photo : Cristina Quicler) |
[03/06/2015 15:03:29] Paris (AFP) Le crash de l’A400M en Espagne est intervenu après une perte de puissance de trois des quatre moteurs de l’appareil après le décollage sans qu’aucune autre anomalie ne soit détectée sur l’appareil, a rapporté mercredi Airbus DS sur la base des premiers éléments de l’enquête.
Le constructeur de l’appareil de transport militaire précise que “les autres systèmes de l’avion ont fonctionné normalement”, dans une “note d’information accident” (AIT) transmise aux opérateurs de l’A400M.
Ces éléments sont issus de l’analyse des boîtes noires par la Commission d’enquête technique des accidents espagnole (Citaam), ajoute-t-il en indiquant “qu’il n’y a pas eu d’autre anomalie identifiée durant le vol”.
Selon Airbus DS, la division défense et espace d’Airbus Group, “les moteurs 1, 2 et 3 ont subi un gel de la puissance après le décollage et n’ont pas répondu aux tentatives entreprises par l’équipage pour contrôler normalement la puissance”.
“Le quatrième moteur a répondu normalement” en revanche, explique Airbus DS.
“Quand les pilotes ont placé la manette des gaz sur +flight idle+ (ralenti, NDLR) pour réduire la puissance, celle-ci a effectivement été réduite mais elle est ensuite restée en ralenti sur les trois moteurs affectés durant le reste du vol, en dépit des tentatives de l’équipage pour récupérer de la puissance”, poursuit l’avionneur.
– La seule option : tenter d’atterrir –
En clair, l’avion s’est retrouvé avec un seul moteur en fonctionnement normal après le décollage, une situation d’autant plus difficile à gérer qu’il s’agissait du moteur numéro 4, donc situé en bout d’aile droite.
“Sur un quadrimoteur, il est très compliqué de gérer l’avion avec un seul moteur, en particulier au décollage et avec peu d’altitude”, explique Gérard Legauffre, expert aéronautique indépendant et ancien enquêteur du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) français.
“Un seul moteur au ralenti n’offre pas assez de puissance pour le maintenir en vol” et si on le maintient en pleine puissance, “l’avion risque d’avoir un mouvement de virage par la gauche et de passer sur le dos”, précise-t-il.
Dans ces circonstances, “la seule option est de tenter d’atterrir”, selon lui.
Airbus n’explique pas pourquoi l’avion a subi cette perte de puissance mais souligne simplement que “les investigations continuent”.
Il précise en revanche que ces éléments vont dans le sens de la note d’alerte opérationnelle (AOT) qu’il a transmise aux exploitants de l’appareil le 19 mai dernier.
“Cette perte de puissance est cohérente avec le fait que les trois moteurs en question étaient concernés par les problèmes identifiés” par cette note, relève-t-il.
– Une erreur de production –
L’avionneur leur demandait, afin d'”éviter tout risque potentiel lors des vols à venir”, d’effectuer une inspection des unités de contrôle électronique (ECU) des moteurs. L’ECU est le système de régulation numérique entre le cockpit et les moteurs de l’appareil.
Selon le délégué général pour l’armement Laurent Collet-Billon, “les causes de l’accident pourraient être à chercher dans une modification mal conçue du FADEC (dont l’ECU est une des composantes, ndlr) et, probablement, dans une erreur de production”.
M. Collet-Billon s’exprimait fin mai devant la commission de la défense nationale de l’Assemblée nationale. Il a toutefois relevé que “l’avion qui s’est +crashé+ avait un FADEC du même type que celui développé en Malaisie et en Turquie, donc différent” des 6 A400M déjà livrés à la France, lesquels ont accumulé plus de 10.000 heures de vol”.
“On peut donc dire qu’ils sont sûrs”, a-t-il ajouté à propos des appareils français.
L’avion qui s’est écrasé en Espagne effectuait un vol d’essai avant sa livraison à la Turquie prévue pour juillet.
Hormis la France, qui a décidé de maintenir les vol opérationnels prioritaires de l’A400M, les autres pays clients (dont l’Allemagne et le Royaume-Uni) ont décidé de maintenir leurs appareils au sol en attendant les conclusions de l’enquête espagnole.
Interrogé sur cet accident, le patron de la branche aviation civile d’Airbus, Fabrice Brégier, a reconnu samedi dernier qu'”il y a eu, effectivement, soit une faiblesse dans les procédures de test des avions avant la mise en vol, car il s’agissait du premier vol d’un avion de série, soit un problème qui provenait de la mise en oeuvre de ces procédures”.
La veille, le directeur de la stratégie d’Airbus Group, Marwan Lahoud, avait estimé selon le journal allemand Handelsblatt qu'”il n’y pas de défaut structurel, mais nous avons un sérieux problème de qualité dans l’assemblage final”.