à La Défense le 2 juin 2015 (Photo : BERTRAND GUAY) |
[04/06/2015 12:35:20] Paris (AFP) La décision de l’État de placer sous l’égide d’EDF la majorité de l’activité réacteurs d’Areva n’est qu’une première étape dans le sauvetage du spécialiste du nucléaire et ne signe pas la fin du calvaire pour le groupe et ses salariés.
En choisissant cette option, l’État veut “donner une stabilité, une pérennité à la filière nucléaire” française, a insisté le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, jeudi matin sur France Info.
Même si Areva va conserver une participation dans les réacteurs, EDF sera donc plus que jamais la tête de pont du nucléaire français, notamment à l’international.
Surtout, l’implication d’EDF, détenu à 84,5% par des capitaux publics, n’exonère pas l’État de renflouer le groupe nucléaire, lui aussi propriété publique à près de 87%.
Mercredi l’Elysée s’est bien gardé de mentionner un quelconque chiffrage, parlant d’une recapitalisation “à la hauteur nécessaire”.
Jeudi matin, la ministre de l’Énergie, Ségolène Royal, a indiqué que le montant sera fixé à l’issue des négociations entre EDF et Areva, qui doivent durer un mois. “Il faut faire l’inventaire de l’ensemble des besoins, des autres ressources financières qui peuvent être mobilisées”, a-t-elle affirmé.
– Ardoise salée –
Combien seront nécessaire ? Un courtier parisien estime les besoins de financements à long terme d’Areva à 7 milliards d’euros.
Selon des informations de presse, EDF a fait une offre “indicative” à 2 milliards d’euros pour devenir majoritaire dans l’activité réacteurs, un montant jugé “faible” par un courtier parisien qui l’évalue plutôt à 4,5 milliards d’euros.
Mais tout dépendra aussi si l’électricien prend à son compte une partie des risques opérationnels des chantiers lancés par Areva. EDF souhaite notamment ne pas avoir à supporter les déboires de l’EPR d’Olkiluoto 3 en Finlande, qui accuse retards et surcoûts et sur lequel plane une procédure d’arbitrage international avec le donneur d’ordre finlandais TVO.
échets nucléaires de La Hague le 4 mars 2009 (Photo : MYCHELE DANIAU) |
Le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, a aussi insisté à plusieurs reprises sur le fait qu’EDF était dans une situation financière “difficile”, et a demandé une hausse des tarifs réglementés d’électricité en France.
Selon des informations de presse, l’électricien aurait demandé une augmentation de 2,5% de ces tarifs en 2015, et les deux années suivantes, en échange de son implication dans la restructuration d’Areva.
Une hausse potentielle qui retomberait donc sur les quelques 28 millions d’abonnés à ces tarifs en France.
“Il n’y a pas de lien entre cette opération et les tarifs de l’électricité”, a toutefois assuré Emmanuel Macron jeudi matin.
En mars, en confirmant sa perte record de 5 milliards d’euros enregistrée en 2014, Areva avait annoncé un plan d’économies de un milliard d’euros d’ici 2017, ainsi que d’importantes cessions d’actifs.
Le montant de la contribution de l?État dépendra donc de tous ces éléments. La France devra aussi obtenir l’aval de la Commission européenne, dans la mesure où le renflouement pourrait être assimilé à une aide d?État.
Quoi qu’il en soit, l’ardoise sera salée.
– Suppressions de postes –
La décision de l?État ne remet par ailleurs nullement en cause l’impact social de la restructuration du groupe nucléaire, qui sera recentré sur la gestion du cycle du combustible nucléaire.
Areva veut supprimer entre 5.000 et 6.000 postes dans le monde pour réduire de 15% ses frais financiers.
Le groupe emploie quelque 44.000 personnes dans le monde, dont 29.000 en France.
Le coordinateur FO d’Areva, José Montès, a estimé que l’annonce de mercredi devrait remettre en cause les 3.000 à 4.000 suppressions d’emplois prévues par Areva dans l’Hexagone.
Les quelque 1.200 salariés employés dans l’entité ingénierie réacteurs d’Areva vont être basculés dans la future filiale commune avec EDF.
“La complexité est surtout humaine et sociale pour faire travailler les équipes ensemble et gérer au mieux les doublons de compétences”, souligne Arnaud Leroi, directeur Energie à Paris du cabinet de conseil Bain & Company.
Areva est actuellement en négociations avec les syndicats autour du volet social de sa restructuration, et l’ensemble de son plan de financement devrait être annoncé fin juillet.