Prélèvement à la source : le pour et le contre

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étaire du PS Jean-Christophe Cambadélis (g) et le Premier ministre Manuel Valls lors du congrès du Parti socialiste à Poitiers, le 7 juin 2015 (Photo : Jean-Pierre Muller)

[08/06/2015 17:04:47] Paris (AFP) Qui prélève l’impôt, le fisc ou l’entreprise? Comment s’applique le quotient familial? Et la déclaration, disparaît-elle à jamais? Voici à quoi pourrait ressembler en France le prélèvement à la source promis samedi par Manuel Valls.

– Qu’est-ce que c’est?

Le prélèvement à la source consiste à faire collecter l’impôt des ménages en temps réel – c’est-à-dire au moment du versement au contribuable des revenus imposables – et directement par les entreprises ou les caisses de retraite, quand il est aujourd’hui payé, l’année suivante, à l’administration fiscale.

Le collecteur s?appuiera sur la situation de l’employé: est-il marié, combien a-t-il d’enfants, dispose-t-il d’un crédit d’impôt? Niches, quotient familial, conjugalisation seront appliqués de la même façon qu’aujourd’hui.

L’idée n’est pas originale, puisque la quasi-totalité des grands pays industrialisés l’appliquent déjà.

Les entreprises y prélèvent l’impôt à la source et la situation de chaque contribuable est régularisée chaque année par le biais d’une déclaration au fisc. Celui-ci procède alors à des remboursements ou au contraire réclame davantage d’argent si la situation du contribuable a changé.

Le prélèvement à la source est en fait déjà partiellement en vigueur en France, puisque près de la moitié des prélèvements obligatoires – principalement les cotisations sociales et la contribution sociale généralisée (CSG)- sont déjà défalquées des feuilles de paye. La TVA est elle collectée directement lors de l’achat de biens et services.

– Les avantages: un impôt en temps réel, plus “indolore”

Pour un salarié, le système serait “indolore” et bien sûr plus simple, puisque le contribuable n’est plus contraint d’économiser pour verser une grosse somme au fisc. Le système est en outre considéré comme plus rentable pour l?État car il permettrait de limiter les fraudes et le nombre d’agents.

Même s’il est vrai que cette simplicité existe déjà pour 90% des contribuables, qui reçoivent une déclaration préremplie, que le paiement en ligne est déjà de plus en plus répandu et qu’une majorité des contribuables sont mensualisés.

Autre atout, l’impôt ainsi prélevé est en lien direct avec les revenus perçus par le contribuable, sans décalage d’un an. Cela permet donc aux personnes qui voient brutalement baisser leurs revenus (licenciement, départ à la retraite…) de bénéficier immédiatement d’une réduction de leur impôt.

L’impôt à la source entraînerait par ailleurs une plus grande réactivité du système pour appliquer aux contribuables les réformes fiscales.

– Les inconvénients: confidentialité et casse-tête comptable

Le Conseil des prélèvements obligatoires, organe adossé à la Cour des comptes, s’était prononcé plutôt défavorablement au prélèvement à la source dans un rapport publié en 2012.

Selon lui, outre une charge supplémentaire pour les employeurs et caisses de retraite, il peut exister des problèmes de confidentialité car ceux-ci connaîtront la situation particulière et familiale du contribuable.

D’où la crainte que l’employeur ne soit influencé dans sa politique salariale, voire dans sa politique d’emploi. S’y ajoute la crainte de tensions dans l’entreprise. Deux collègues occupant la même fonction pourraient toucher un salaire net différent si leurs taux d’imposition étaient différents.

Le CPO rappelle aussi que le recouvrement de l’impôt dépasse déjà 99% en France et estime que le prélèvement à source pourrait être plus coûteux car l’administration devra assurer le contrôle des entreprises.

Mais le plus gros frein à une telle réforme reste technique: le passage au prélèvement à la source nécessite au moins une année de transition. Le contribuable, redevable de l’impôt dû pour l’année précédente, se verrait aussi ponctionné à la source pour l’année en cours. A moins que l?État ne renonce à une année de prélèvement, ce qui est peu envisageable en période de disette budgétaire.

Enfin, le syndicat Solidaires Finances publiques, farouchement opposé à l’idée d’amorcer une réforme fiscale par ce changement, rappelle que rien ne garantit que les montants prélevés au titre de l’impôt sur le revenu seront “intégralement reversés à l?État lorsqu’on sait par exemple que la TVA collectée par les entreprises n?est déjà pas intégralement reversée”.