La justice européenne conforte la BCE dans ses programmes de rachat de dettes

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éenne (Photo : DANIEL ROLAND)

[16/06/2015 12:15:11] Luxembourg (AFP) La justice européenne a conforté mardi la BCE dans son action, en avalisant un programme de rachat de dette contesté par des eurosceptiques allemands, ce qui pourrait décourager de nouvelles plaintes contre la politique monétaire très généreuse de l’institution.

Annoncé en 2012, le programme baptisé Outright Monetary Transactions (OMT) était destiné à éviter une envolée des taux d’emprunt des pays du sud de la zone euro en faisant racheter à la BCE des titres sur le marché. La démarche, jamais mise en oeuvre, “n’excède pas les attributions de la BCE relatives à la politique monétaire et ne viole pas l’interdiction du financement monétaire des Etats membres”, a tranché la Cour européenne de justice.

Plusieurs Allemands avaient contesté devant la Cour constitutionnelle allemande ce programme de rachat d’obligations souveraines, dont la seule annonce couplée à la promesse du président de la BCE, Mario Draghi, de “tout faire” pour empêcher une flambée insoutenable du coût de la dette de certains pays européens, avait suffi à ramener le calme sur les marchés financiers. A ce jour, l’OMT n’a jamais été mis en oeuvre.

En février 2014, la Cour allemande, située à Karlsruhe (ouest), avait penché pour le côté des plaignants, estimant que la BCE avec ce programme outrepassait probablement son mandat, limité au maintien de la stabilité des prix en zone euro. Mais avant de se prononcer définitivement, elle avait requis l’avis de la justice européenne.

Suivant l’avis de l’avocat général donné en janvier, celle-ci est mardi clairement allée dans le sens de la BCE. “Le programme OMT relève de la politique monétaire” et n’est pas “assimilable à une mesure de politique économique”, qui doit rester le fait des gouvernements, a souligné la Cour, qui considère désormais que les actions de la BCE “sont soumises à (son) contrôle juridictionnel”.

Dans une courte réaction, la BCE a “accueilli favorablement la décision de la CEJ”.

Sur un tout autre ton, la fédération des banques privées allemandes a estimé que “ce qui (était) légal n’était pas pour autant forcément sensé économiquement”.

– Vent favorable pour le QE-

Economiste chez ING, Carsten Brzeski a jugé que cette décision, “même si elle était largement attendue”, apportait “un soulagement à la BCE et aux marchés financiers”. Ceux-ci sont très volatils du fait des incertitudes liées au sort de la Grèce.

“La Cour européenne de justice ne met aucune limite à la BCE pour acheter des titres de dette”, relevait Bert Van Roosebeke, du Centre de politique européenne de Fribourg (sud de l’Allemagne).

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ésident de la BCE, le 15 avril 2015 à Francfort (Photo : DANIEL ROLAND)

Pour Johannes Mayrn de chez BayernLB, cela représente même “un vent favorable pour le programme QE”.

Car la BCE est passée entre temps à la vitesse supérieure. Elle a lancé en mars un autre programme de rachat de titres de dette baptisé “QE”. Destiné à redresser les prix en zone euro, ce programme, qui prévoit le rachat de titres de dette publics et privés pour 60 milliards d’euros par mois jusqu’à septembre 2016, a aussi été cible de critiques en Allemagne.

“Le jugement d’aujourd’hui devrait clairement décourager de nouveaux procès contre le QE, même si pas complètement”, considère M. Brzeski. Il estime que la Cour européenne de justice “laisse entrouverte la porte à de nouvelles plaintes”.

Trois industriels allemands comptent ainsi ne pas lâcher. “La plainte constitutionnelle a été envoyée au tribunal le 7 mai et nous n’allons pas la retirer”, a affirmé à l’AFP Christoph Degenhart, professeur de droit constitutionnel à l’Université de Leipzig, chargé de rédiger cette requête contre le QE.

Les regards sont donc de nouveau tournés vers la Cour de Karlsruhe, qui, avant de donner éventuellement suite à cette nouvelle plainte, doit d’abord rendre son verdict définitif concernant l’OMT.

“Même si en théorie, la cour allemande pourrait encore avoir un verdict différent (de la cour européenne), c’est difficile à imaginer dans la réalité”, anticipe M. Brzeski.