ènes, le 19 juin 2015 (Photo : Aris Messinis) |
[19/06/2015 16:12:11] Athènes (AFP) Les Grecs se prémunissaient vendredi contre la possible instauration d’un contrôle des capitaux en cas d’échec du sommet européen de lundi, mais dans un calme à la hauteur du fatalisme qui règne dans le pays après six ans d’une crise sans précédent.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : ménages et entreprises grecs, inquiets des conséquences de l’arrivée de Syriza au pouvoir, avaient retiré déjà 31,5 milliards d’euros de décembre à avril, et le mouvement se serait accéléré depuis.
Rien que cette semaine, ce sont au moins trois milliards qui seraient partis, selon la presse.
Car chacun redoute que le gouvernement et ses créanciers ne parviennent pas à se mettre d’accord sur les réformes à accomplir pour que ces derniers versent à temps à Athènes les 7,2 milliards d’euros qui lui permettront de rembourser au FMI le 30 juin une échéance d’1,5 milliard d’euros.
Faute de quoi, la Grèce sera en défaut de paiement, avec les conséquences ingérables d’une possible panique bancaire (“bank-run”).
Pour éviter celle-ci, tous les économistes pointent désormais la probabilité de l’annonce sans préavis d’un strict contrôle des mouvements d’argent, comme en mars 2013 chez le voisin chypriote, qui vient à peine d’en sortir.
Cependant, impossible de déceler la moindre frénésie devant les distributeurs de la ville vendredi.
Même si, devant cette succursale de la Banque nationale de Grèce (BNG – une des quatre grandes banques du pays) dans le quartier bourgeois de Kolonaki, on ne parlait que de ça.
“Les gens sont calmes parce que tout est déjà parti!” s’amusait Panos, 23 ans, un livreur.
Pas tout à fait : une retraitée disait être venue retirer le reste de ses économies après avoir attendu trois heures la veille pour un précédent retrait au guichet.
Maria, 39 ans, avait pris “quelques centaines d’euros au cas où il n’y aurait plus d’argent dans les distributeurs”. Mais “sans toucher à son compte d’épargne”.
— “Pain sur le beurre des créanciers —
Nikos, un médecin de 54 ans, était venu là pour prendre “1.000 euros” pour sa mère, “qui s’inquiète en écoutant les informations”.
D’autres considéraient au contraire comme un devoir de n’en rien faire, “un devoir national”, selon une autre cliente âgée d’une trentaine d’années.
Kyriaki, elle, une analyste financière de 31 ans, “ne voulait pas avoir de responsabilité dans la situation”, et n’avait rien retiré, tout en reconnaissant que “si elle avait beaucoup à perdre” dans cette banque, “elle verrait peut-être les choses différemment”.
Comme Athina, qui, titulaire d’un compte à l’étranger, avait résisté jusqu’alors à transférer ses économies, “car on ne peut pas vouloir à la fois que la Grèce sorte de cette crise et contribuer à affaiblir le système”. Mais elle va s’y résoudre avant le 30 juin, “car la situation devient vraiment incertaine”.
Cette succursale refusait néanmoins de délivrer plus de 2.500 euros en liquide à la fois, vendredi, procédure normale en cas de forte affluence, selon deux sources bancaires interrogées par l’AFP, qui n’y voyaient pas un contrôle déguisé.
Parallèlement, Louka Katseli, la présidente de la BNG, a appelé les citoyens grecs “à la responsabilité et à la cohérence” vendredi, rappelant que “chacun de leurs actes”, de retrait notamment, “affecte la globalité” du système.
Les autorités faisaient en sorte également de tuer les rumeurs financières alarmistes, qualifiées d'”inacceptables” par le ministre des Finances Yanis Varoufakis, de “pain sur le beurre des créanciers” par une autre source gouvernementale.
Le ministre en charge des négociations Euclide Tsakalotos a aussi rencontré le gouverneur de la Banque de Grèce Yannis Stournaras, avant un communiqué commun assurant de “la stabilité du système bancaire” grec, recapitalisé en 2013, mais toujours affaibli par un taux élevé de retards de remboursement de ses clients.
La BCE a aussi relevé vendredi, pour la deuxième fois en une semaine — une première depuis février — le plafond de son financement d’urgence (ELA) aux banques grecques. Cette hausse non divulguée serait selon la presse de 3,3 milliards d’euros, de loin la plus forte depuis février.