à Ploufragan (Photo : Damien Meyer) |
[26/06/2015 06:38:15] Paris (AFP) Des millions d’appareils électroniques (ordinateurs, électroménager, téléphones etc.) sont vendus en France chaque année, venant remplacer des appareils usagés, dont la collecte et le recyclage peut virer au casse-tête, d’autant que les métaux précieux qu’ils contiennent alimentent des trafics.
En France, la collecte et le traitement des appareils électroniques est organisé pour les particuliers dans le cadre d’une filière réglementée et en 2014 le taux de collecte a atteint “à peine 40%”, note Guillaume Duparay, directeur de la collecte au sein de l’éco-organisme Eco-systèmes, un des principaux acteurs agréés du secteur.
7,5 kg par habitant et par an ont été collectés dans un gisement évalué à 22 kg/hab/an.
Le système fonctionne avec des organismes agréés qui organisent la collecte des déchets et font appel à des professionnels spécialisés pour leur traitement. Pour cela, chaque Français qui achète un appareil électronique paye une éco-participation de quelques centimes.
Mais ce système a ses lacunes. Certains déchets électroniques échappent au circuit, surtout les appareils électroniques usagés des entreprises dont la collecte est moins organisée que celle des particuliers.
Des sociétés de négoce se sont spécialisées dans leur récupération auprès des entreprises en s’engageant à en assurer la gestion et le traitement, conformément à la réglementation.
“En réalité, certaines se contentent d’exporter illégalement ces déchets en Afrique ou en Asie sans aucun traitement”, affirme M. Duparay. Une exportation pourtant interdite par la Convention de Bâle depuis 1989.
Car ces appareils électroniques contiennent des métaux précieux, comme des terres rares, qui peuvent être revendues à prix d’or.
L’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) a par exemple mis au jour en 2010 un trafic organisé par plusieurs sociétés de recyclage qui collectaient à titre gracieux les déchets d’équipements électriques au sein d’administrations et de collectivités, indique à l’AFP la Gendarmerie. Elles les vendaient ensuite à une société néerlandaise non agréée et ils transitaient par la Belgique sous l’appellation de produits d’occasion.
L’Oclaesp a une autre affaire en cours, débutée en 2013 et qui porte déjà sur plus de 3.500 tonnes.
Ce trafic est de plus en plus surveillé par les douanes françaises, notamment au niveau des grands ports, malgré la difficulté à contrôler le volume de marchandises qui y transitent.
“Nous avons réalisé 223 constatations d’infractions”, sur les déchets et matières dangeureuses (incluant les DEEE), affirme Michel Marin, chef de bureau de la politique des contrôles à la direction générale des douanes.
Il recense deux types d’infractions: les déchets ne sont pas déclarés comme tels mais simplement comme appareils d’occasion, ou ils sont carrément cachés dans un chargement.
En novembre 2014 les douanes ont intercepté au port du Havre “des appareils cachés dans un chargement de vélos d’occasion à destination de l’Afrique. Les agents ont saisi 12 tonnes de téléviseurs, ordinateurs et micro-ondes non déclarés”, explique Michel Marin.
– renforcer la coopération européenne –
Consciente de ses dérives, l’Union européenne a renforcé en 2012 la réglementation dans le cadre d’une directive, transposée en France en août 2014.
Désormais, un exportateur à l’obligation de prouver que le produit qu’il transfère hors d’un pays fonctionne encore.
Par ailleurs, les distributeurs ont l’obligation de reprendre gratuitement les appareils électroniques de leurs clients. Les conséquences se font déjà sentir, Eco-systèmes constatant une hausse de la collecte de 18% depuis le début de l’année.
En France, la loi sur la transition énergétique, en cours d’examen au Parlement, prévoit aussi de mieux réglementer les déchets électroniques des entreprises.
Autre axe d’action: le renforcement de la coopération européenne, alors que se tient jusqu’à vendredi au siège d’Interpol à Lyon la conférence finale d’un projet européen visant à améliorer le contrôle du secteur.
Déjà, l’Oclaesp échange régulièrement dans le cadre d’un réseau informel regroupant les autorités environnementales mais aussi les services de police et de douanes de différents pays.
Des opérations communes ont lieu régulièrement sous l’égide d’Interpol, “découlant sur la saisie de plusieurs centaines de tonnes de déchets”, indique la Gendarmerie nationale.
Le projet discuté à Lyon vise aussi à étendre à toute l’UE les bonnes pratiques existant déjà dans certains pays.