Silencieux depuis de longs mois et l’entrée en crise profonde de Syphax Airlines –dont la cotation à la Bourse des Valeurs Mobilières de Tunis (BVMT) a été, en conséquence, suspendue le 18 novembre 2014-, Mohamed Frikha, fondateur –et ex-président directeur général- de la dernière compagnie aérienne à avoir vu le jour en Tunisie –en 2011- a enfin parlé pour dire ce qu’il a sur le cœur. Il l’a fait le 26 juin dernier, lors de l’audition de Sarra Rejeb, nouveau président directeur général de Tunisair, par la Commission des finances de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
Prenant la parole lors du débat ayant suivi la présentation de Mme Rejeb, M. Frikha a parlé d’une voix rendue tremblante par l’émotion, pour «dire quelques vérités sur les trois années écoulées» depuis la création de Syphax Airlines.
Allant droit au but, le fondateur de cette compagnie lance d’entrée de jeu que «si le problème de Tunisair c’est Syphax Airlines, je suis prêt à le dissoudre». Mais précise aussitôt que selon lui les problèmes de la compagnie nationale de transport «sont autres».
Reprenant le film des évènements depuis le début, l’ex-PDG rappelle qu’il a créé Syphax Airlines «pour Sfax, afin d’en faire fonctionner l’aéroport et pour la Tunisie, comme exemple d’investissement à un moment où le pays était confronté à une situation très difficile».
Quatre ans après, «Syphax Airlines est en crise», admet M. Frikha, et «Tunisair en est la cause», accuse-t-il. Et l’ancien patron de la compagnie aérienne privée et actuel député à l’ARP sous la bannière d’Ennahdha, d’égrener quelques-unes des épreuves qu’elle a eu à affronter et des bâtons qu’on lui a mis dans les roues.
«Le premier vol de Syphax Airlines a été bloquée par Tunisair Handling», la filiale de Tunisair en charge de l’activité au sol. Ensuite, un avion de Syphax Airlines a eu droit à un accueil très particulier en arrivant le 29 avril 2011 à Tunis. «La police et les gens de Tunisair étaient présents et on a empêché les voyageurs de descendre», accuse M. Frikha.
Ensuite, Syphax Airlines a voulu, pour devenir autonome et éviter ce genre de problèmes, se doter d’une entité s’occupant de handling. «Le ministère du Transport a refusé notre demande parce que Tunisair s’y était opposée». Idem pour la maintenance.
Enfin, «à la demande du chef du gouvernement, nous avons pris des dispositions pour assurer la Omra. Nous avons investi notamment pour ouvrir une agence en Arabie Saoudite. Mais l’opération n’a pas eu lieu parce que –encore une fois- Tunisair Handling s’y est opposée», se plaint M. Frikha.
«Cela fait trois ans que nous souffrons», résume le fondateur de Syphax Airlines. Qui souligne que sa compagnie aérienne se débat dans «une grande crise». Et que si elle devait y succomber, «c’est le pays qui perdrait».
Mais s’il accuse, encore une fois, Tunisair d’être à l’origine des maux de Syphax Airlines, Mohamed Frikha n’en appelle moins à aider la compagnie aérienne nationale à résoudre ses propres problèmes. En précisant au passage que «c’est le syndicat qui est en train de faire couler» cette société.
Répondant à son confrère, Sarra Rejeb se dit touchée. «Vous avez lancé là un cri du cœur et je suis prête à voir avec vous ce qu’on pourrait faire pour régler ces problèmes», lance la P-DG à l’adresse de M. Frikha.
Lui aussi sensible aux difficultés de son collègue à l’ARP et fondateur de Syphax Airlines, le député Mohsen Hassen (Union Patriotique Libre) lui a proposé de soumettre un dossier résumant toutes les péripéties de cette affaire à la Commission des finances pour qu’elle étudie ce que l’ARP pourrait faire pour l’aider. «Pas en tant que député mais comme investisseur dont le pays a besoin», précise-t-il.