Moscou a annoncé un accord avec Paris dans l’épineux dossier des navires Mistral au terme de mois de négociations, la Russie devant recevoir, selon la presse russe, près de 1,2 milliard d’euros en dédommagement pour la non-livraison par la France de ces deux navires de guerre.
Le contentieux entre la France et la Russie avait placé la présidence française dans une situation inconfortable, tiraillée entre intérêts économiques et volonté de pousser la Russie à infléchir sa position dans la crise ukrainienne.
«Les négociations sont déjà entièrement achevées, tout a déjà été décidé – et les délais, et la somme», a annoncé le conseiller pour la coopération militaire et technique du président russe, Vladimir Kojine, dans des propos rapportés jeudi soir par l’agence russe Ria Novosti.
«Un accord a été trouvé mais des détails doivent être affinés», a confirmé à l’AFP une source française proche du dossier.
Paris devra rembourser à Moscou 1,16 milliard d’euros, selon un calcul établi par le quotidien russe Kommersant, qui cite également pour l’appuyer plusieurs sources anonymes.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a refusé de commenter ces informations, tout comme la société chargé des exportations d’armes russes Rosoboronexport, et les services du vice-Premier ministre Dmitri Rogozine, en pointe sur les questions militaires.
Le dossier des Mistral – qui empoisonne les relations des deux pays depuis la décision de Paris de lier la livraison des Mistral à une amélioration de la situation en Ukraine – butait depuis plusieurs mois sur la question du montant du remboursement.
Les autorités russes jugeaient jusqu’à présent que la somme suggérée par la France était insuffisante: Paris avait proposé de rembourser 785 millions d’euros d’avances déjà perçues de Moscou, mais la Russie chiffre le préjudice subi à près de 1,163 milliard d’euros.
Moscou met notamment en avant les sommes dépensées pour la formation des 400 marins qui devaient constituer l’équipage, la construction des infrastructures à Vladivostok (Extrême-Orient russe), où devait être basé le premier Mistral, et la fabrication de quatre hélicoptères de combat.
Autre pierre d’achoppement du dossier: la Russie refusait tout accord pour une réexportation des navires avant que l’argent ne soit rendu, selon Kommersant, alors que ce point était essentiel pour Paris.
La France débourse en effet «de 1 à quelques millions d’euros par mois» pour assurer la sécurité et la maintenance (courante ou à l’état neuf) des Mistral, selon Hervé Guillou, PDG du groupe DCNS qui a construit ces porte-hélicoptères.
– Accord signé «d’ici peu» –
Le conseiller du président, Vladimir Kojine, a dit espérer que l’accord sur la résiliation du contrat de vente des Mistral soit signé «d’ici peu».
Le calendrier semble en effet s’accélérer: lundi, le président français François Hollande a déclaré qu’il prendrait «dans les prochaines semaines» sa décision concernant la livraison à la Russie des navires.
Selon Kommersant, l’accord officiel devrait être annoncé dans «les premiers dix jours d’août» par les chefs d’Etat russe et français.
S’il a lieu, l’accord clorait huit mois d’intenses négociations, menées par le vice-Premier ministre russe Dmitri Rogozine et le secrétaire général français pour la défense Louis Gautier.
Elles avaient commencé après la décision prise par Paris fin novembre de reporter «jusqu’à nouvel ordre» la livraison du Vladivostok, alors que les Occidentaux multipliaient les sanctions contre la Russie, qu’ils accusent de soutenir les séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine, ce que Moscou dément.
Le premier des deux Mistral, le Vladivostok, devait être initialement remis à Moscou à la mi-novembre 2014, tandis que le second, le Sébastopol, devait théoriquement être livré à la Russie à l’automne 2015.
Le contrat de leur vente avait été conclu en juin 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy et évalué à près de 1,2 milliard d’euros.
Construits à Saint-Nazaire, dans l’ouest de la France, ces navires de guerre polyvalents peuvent transporter des hélicoptères, des chars ou des chalands de débarquement et accueillir un état-major embarqué ou un hôpital.
AFP