Parmi les principales orientations du ministère de la Femme, des Personnes âgées et de la Petite enfance, figurent celles de permettre aux femmes d’être plus autonomes sur le plan financier et d’encourager les PME/PMI et l’entrepreneuriat féminin sur tout le territoire national.
Les femmes doivent être plus présentes et plus actives dans la vie économique du pays : «Il est inconcevable que les universitaires tunisiennes dont le nombre dépasse de loin celui de la gente masculine ne puissent pas profiter de leurs études et de leurs compétences pour occuper plus de place sur l’échiquier économique du pays. Cela n’a pas de sens, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour doter les femmes de moyens financiers et des formations nécessaires pour qu’elles se positionnent en tant qu’actrices incontournables dans l’édification de l’avenir économique de la Tunisie. Ceci étant, il faut rappeler que c’est grâce à l’autonomie financière que les femmes pourront se positionner politiquement et accéder aux postes de décision » a déclaré Samira Maraï, ministre de la Femme dans un entretien qui sera diffusé très prochainement sur WMC.
Le ministère est donc décidé à remettre les pendules à l’heure et donner aux femmes tunisiennes qui ont prouvé qu’elles peuvent être les gardiennes d’un temple appelé Tunisie, les moyens de leurs compétences et de leurs ambitions.
Les lois en faveur de l’égalité hommes/femmes ne sont pas appliquées sur terrain
Il y a plus de 6 ans, alors que Faiza Kéfi était présidente de la cour des Comptes, elle avait déclaré que les femmes aux postes décisionnels sont là mais qu’on ne les voyait pas beaucoup « C’est sans doute en raison du caractère même de leur travail ; une femme a été à la tête du Conseil national du marché financier ; une autre a dirigé l’Agence Tunisienne de l’Internet. Le Technopôle de l’Ariana, deux importantes banques nationales, l’Agence de Promotion des Investissements Extérieurs, la Bibliothèque Nationale, les Archives Nationales, l’Institut Supérieur de la Magistrature, de nombreux grands Hôpitaux de la capitale ou régionaux, divers centres de recherches spécialisés pour ne citer que ces institutions sont actuellement conduites par des femmes. Les exemples ne manquent pas… Il est vrai que les femmes manquent souvent de visibilité et que pour beaucoup de décideurs, encore, dirigeant, manager, chef, ne se conjuguent pas au féminin. Le temps et la volonté de changer l’ordre des choses feront tôt ou tard leur œuvre ». A l’époque, Faiza Kéfi ne soupçonnait pas un instant que la chute du régime Ben Ali puisse advenir ou encore que le nouvel ordre des choses post14 janvier puisse menacer les acquis des femmes ou encore les faire reculer.
C’est ce qui rend la tâche de la ministre de la Femme du gouvernement Essid encore plus ardue. Car elle doit non seulement sécuriser le périmètre des acquis des femmes dans notre pays mais les consolider et pourquoi-pas en acquérir de nouveaux.
Entre Loi et réalité, le gap est énorme. Bien que le législateur tunisien a accordé aux femmes les mêmes droits que leurs homologues hommes dans le milieu du travail, ces dernières restent lésées car non seulement elles assument toutes seules les charges familiales concomitamment avec leurs responsabilités professionnelles, mais à compétences égales et parfois supérieures lors du choix d’un haut commis de l’Etat, c’est le mâle qui l’emporte. Va savoir pourquoi…Ou plutôt si, la misogynie n’est pas un mythe dans le pays des droits des femmes, c’est du concret, en témoigne la place accordée aux femmes dans les partis politiques. Nous en avons eu des preuves vivantes durant les dernières élections parlementaires. Rares sont les femmes qui ont été choisies pour conduire les listes électorales. Le pire, c’est que ces pratiques sont assez courantes dans les partis dits « progressistes » et « démocratiques ».
Il faut bousculer les habitudes…
Pour la ministre de la Femme, il va falloir bousculer les habitudes et les décisions politiques doivent pousser vers plus d’avancées pour ce qui est des droits des femmes : « Même si cela risque d’heurter quelques résistances d’ordre culturel. Rappelez-vous Bourguiba, quand il a décidé la promulgation du CSP, il ne s’attendait pas à ce que cela soit accepté dans toutes les régions du pays ou que cela soit adopté sans aucune forme d’opposition, ce fût fait. Nous devons nous aussi oser. Un exemple assez édifiant, celui interdisant aux femmes tunisiennes de se déplacer à l’étranger sans l’autorisation du père ou encore l’impossibilité pour les femmes d’être les tutrices des comptes bancaires de leurs progénitures. C’est inadmissible d’autant plus que dans des pays comme le Maroc ou l’Algérie, ces lois n’existent pas, c’est pour dire que nous avons encore du chemin à parcourir… ».
Aujourd’hui, tout un programme a été mis en place pour affranchir les femmes dans les régions en établissement un plan pour la création de 5000 entreprises féminines sur tout le territoire national et surtout dans les zones rurales. Les femmes peuvent s’adonner à nombre d’activités dont l’agriculture, l’artisanat, les services et pourquoi pas l’industrie. Le ministère est décidé à assurer leurs formations, à les doter de lignes financières avantagées et à les accompagner jusqu’au démarrage effectif du projet avec l’assurance qu’il a été bien mis sur les rails.
Le ministère a également établi un plan pour introduire l’approche genre dans toutes les politiques de l’Etat, les plans et les orientations du gouvernement afin de l’institutionnaliser en l’appliquant au sein de toutes les administrations publiques. Le renforcement de la présence des femmes aux postes de décision est aujourd’hui plus que nécessaire, c’est un droit. La consolidation des droits socioéconomiques des femmes dans les milieux ruraux et citadins avec mise en place des mécanismes pour une économie solidaire, la lutte contre l’analphabétisation rampante des jeunes filles depuis des années surtout dans les régions enclavées ainsi que celle visant à leur permettre de bénéficier de leurs droits à l’éducation, à la santé et au travail sont aujourd’hui des axes prioritaires dans la stratégie 2016/2020 du ministère.
Pour la ministre, ce n’est pas des paroles en l’air, ce sont des actions concrètes qui seront lancées au plus tôt. Quant aux financements et à l’appui politique, ils relèvent de l’acquis assure Samira Maraï « Le Chef du gouvernement nous a assuré de tout son soutien pour que les compétences féminines occupent les postes décisionnels et que les femmes dans les régions de l’intérieur soient dotées des moyens leur permettant d’être plus autonomes économiquement. Quant aux financements, je vais vous donner un seul exemple : j’ai vu suite à ma prise de fonction une délégation de la banque mondiale qui a mis à la disposition du ministère une ligne de financement en faveur des femmes, eh bien figurez-vous que 40% de cette ligne n’ont pas été utilisés. Non je ne pense pas que nous ayons des problèmes de financement ou autres, je pense qu’il nous faut avoir le courage politique et l’audace nécessaires pour bousculer les habitudes et les résistance et donner aux femmes les moyens d’être plus actives dans le développement socioéconomique et la transition politique dans notre pays. Nous y veillerons et pas uniquement par les paroles mais par les actes ».
Qui vivra verra…