«La Tunisie doit orienter le budget à partir de 2016 et de manière définitive vers la croissance». C’est ce que conseille Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), au gouvernement tunisien.
Rappelons que Mme Lagarde a effectué, les 8 et 9 septembre 2015, une visite de travail en Tunisie à l’invitation de Habib Essid, chef du gouvernement tunisien.
Selon elle, la réalisation de paliers supérieurs de croissance dans le pays nécessite des actions sur plusieurs fronts.
Primo, il s’agit d’adopter une politique claire pour promouvoir la croissance, tout en préservant les équilibres des finances publiques et d’orienter les dépenses publiques essentiellement vers l’investissement, a précisé la responsable du FMI.
Secundo, Mme Lagarde cite la consolidation de la stabilité du système financier afin de lui permettre de financer toutes les composantes de l’économie tunisienne, à commencer par les petits crédits en passant par ceux destinés à la consommation des ménages et le financement des grands groupes économiques.
Pour la directrice générale du FMI, la mise en oeuvre de ces mesures exige l’instauration d’un climat d’affaires propice à l’investissement. «Les investisseurs, qu’ils soient tunisiens ou étrangers, ne prendraient pas le risque d’investir en Tunisie en l’absence d’un climat qui soit favorable à l’investissement», a-t-elle fait savoir. De ce fait, il faut «simplifier les procédures et de réduire la bureaucratie étouffante susceptible de freiner et d’asphyxier les initiatives économiques», a-t-elle.
Un système moderne de protection sociale
S’agissant du volet social, dont on reproche au fonds sa marginalisation, la première responsable du FMI a mis l’accent sur la nécessité de mettre en place un système de protection sociale moderne et un système fiscal performant et équitable, soulignant que la réussite d’une telle approche reste tributaire «d’une volonté politique dont les autorités tunisiennes ne manquent pas».
Mme Lagarde n’a pas excepté l’administration tunisienne qui, a-t-elle dit, «doit participer à cette approche de réformes, car l’absence d’une contribution de l’administration n’encourage pas les investisseurs».
La Tunisie apte à réussir sa transition économique
La directrice du FMI a souligné son optimisme quant à la capacité de la Tunisie à réussir sa transition économique, malgré la conjoncture économique difficile. «Je pense que malgré les menaces et l’environnement économique difficile, il y a un certain nombre de facteurs qui permettent à la Tunisie, si elle le veut, de transformer son extraordinaire réussite de stabilisation politique en développement économique qui mène à une croissance plus inclusive, solidaire, durable et créatrice d’emplois», a affirmé Mme Lagarde.
Toutefois, elle estime que «beaucoup reste à faire, notamment au niveau des réformes qui doivent être engagées, développées et approfondies parce que le temps presse et la population est impatiente».
S’agissant du taux de croissance, Mme Lagarde estime qu’un certain nombre de facteurs extérieurs peuvent jouer en faveur de la Tunisie, malgré le faible niveau enregistré durant 2015 (autour de 1%), faisant état notamment de la reprise de la croissance dans la zone Euro, principal partenaire de la Tunisie et de la régression des prix des matières premières de manière perceptible en 2016, outre l’éventuelle poursuite de la chute des prix du pétrole.
«Finissions d’abord ce qu’on a commencé avec la Tunisie»
Concernant un éventuel nouveau programme du FMI destiné à la Tunisie, Mme Lagarde est restée floue, se contentant de déclarer dans ce cadre que «le FMI aidera la Tunisie si elle le demande», alors que le pays a officiellement exprimé, au cours de la visite de Mme Lagarde, sa volonté d’obtenir un nouveau crédit pour financer un nombre de réformes, dont le cadre, comme l’a affirmé Chedly Ayari, gouverneur de la BCT, sera le plan quinquennal de développement économique pour la période 2016/2020.
Dans des déclarations aux médias, Ayari a affirmé que la Tunisie aspire à obtenir un nouveau prêt du même montant et aux mêmes modalités que le premier prêt octroyé par le FMI. Toutefois, la responsable du FMI a déclaré «finissons d’abord le travail qu’on a commencé avec la Tunisie», faisant allusion à l’accord de prêt de garantie octroyé par le FMI, signé en juin 2013 et sur la base duquel la Tunisie a bénéficié de 1,7 milliard de dollars US dont 1,15 milliard de dollars ont été décaissés, et ont été consacrés à la consolidation des ressources du budget de l’Etat.
Il est prévu que le conseil d’administration du FMI approuve la sixième revue permettant à la Tunisie d’obtenir une enveloppe de 303,08 millions de dollars US, alors que la dernière tranche (environ 200 millions de dollars) sera décaissée dès le parachèvement de l’accord le 31 décembre 2015. «Si la Tunisie parvient, après le parachèvement de l’actuel prêt de garantie qui vient à échéance à la fin de l’année en cours à adopter un nouveau programme de réformes, le FMI répondra positivement à sa demande», a indiqué Mme Lagarde.
Sur un autre plan, Mme Lagarde, à la tête du FMI depuis juillet 2011, n’a pas démenti la possibilité de présenter sa candidature pour un deuxième mandat lors des élections qui vont se dérouler au milieu de l’année prochaine.