Moez Ben Gharbia, animateur et propriétaire de la chaîne TV «Attassiaa», a créé, ces jours-ci, l’événement avec la publication d’une vidéo dans laquelle il prétend connaître les auteurs des assassinats politiques et des attentats perpétrés dans le pays, en l’occurrence les meurtres de Chokri Belaid, Mohamed Brahmi et Cherni Socrate, mais aussi des décès suspects de Tarek El Mekki et de l’avocat Faouzi Ben M’rad, ainsi que les attentats du Bardo et de Sousse qui ont fait une soixantaine de morts parmi les touristes.
Au regard de l’ampleur du carnage accompli, selon Ben Gharbia, par «une mafia politico-judicio-financière locale et étrangère», ces révélations, pour peu qu’elles soient confirmées, sont très graves et risquent de déstabiliser de nouveau le pays dont la pacification, après les élections démocratiques de 2014, demeure hélas fragile.
Gros plan sur une vidéo qui ne révèle pas tout.
Néanmoins, pour toute personne nantie de bon sens, ces révélations dites «fracassantes» suscitent plusieurs interrogations dont deux me semblent majeures.
Premièrement, si Ben Gharbia connaissait bien les auteurs de ces assassinats et attentats, il y a six mois et plus alors qu’ils datent de deux ans et demi au moins, pourquoi a-t-il attendu tout ce temps et n’a pas pris la peine pour en informer la justice, la police et l’opinion publique? Selon la loi, il serait, dans ces conditions, complice avec cette mafia pour avoir gardé pour lui ces informations.
Deuxièmement, supposons que Ben Gharbia n’ait été informé des forfaits de cette mafia que ces derniers jours, pourquoi sa chaîne Attissiaa n’a pas exploité en exclusivité ces révélations avec lesquelles elle aurait pu battre tous les records d’audimat? Il y a là un comportement bizarre d’un animateur qui a forgé sa carrière sur le buzz et l’ostentatoire. Après tout, quand on est journaliste au sens noble du terme, on dit jamais “je vais révéler“ mais plutôt “je révèle…“.
D’ailleurs, ces révélations sont des non-révélations en ce sens où elles insinuent plus qu’elles n’affirment. Il s’agit plus d’allusions que d’assertions.
Indifférence des familles des martyrs
C’est une des raisons qui expliquent pourquoi les familles des martyrs, particulièrement Besma Khalfaoui Belaid, Mbarka El Brahmi et les Cherni ont réagi froidement à ces révélations et estimé ne pas y trouver matière à exploiter pour les aider à découvrir la vérité. Pour eux, en dépit du buzz qu’elle a créé, cette vidéo n’est ni plus ni moins qu’un pétard mouillé.
Moralité: Moez Ben Gharbia, qui est parvenu à réaliser l’exploit de créer sa propre chaîne Attassiaa (ce qui n’est pas donné à tout le monde), semble avoir raté son coup ou plus exactement sa “mise en scène“. Et s’il décide, comme il l’a déclaré dans la vidéo, de poursuivre ses révélations, il ne peut rendre service qu’à lui-même et libérer sa conscience. Car il fait partie d’une école d’hommes de médias démesurément ambitieux et cupides. D’une école d’audiovisuel acquise au terrorisme et au daechisme. Une école d’animateurs incultes qui ont fait le lit du terrorisme en Tunisie et omis que les médias sont l’oxygène des terroristes. Car handicapés par leur infériorité numérique et par un rapport de force en leur défaveur face aux Etats, ces terroristes y voient un raccourci pour remporter des victoires psychologiques en gérant au mieux les impressions pour mieux influencer le public et le faire adhérer à leurs thèses.
Ces animateurs qui ont fait le lit du terrorisme
Moez Ben Gharbia fait partie de ces animateurs qui ont flirté avec le diable et toutes les mafias. Des animateurs qui avaient, au temps de l’obscurantisme de la Troïka, blanchi djihadisme, daechisme, terrorisme, drogue, prostitution, contrebande…
Est-il nécessaire de rappeler qu’au temps où Moez Ben Gharbia animait à la chaîne Ettounisia il invitait fréquemment, dans l’impunité la plus totale, des salafistes djihadistes dont un avait brandi, au cours de son émission et en présence d’Ali Larayedh, alors ministre de l’Intérieur, son linceul en signe d’appel au sacrifice et au Djihad.
A signaler également cette tribune accordée, à la faveur de son émission, à un daechiste tunisien de retour de Syrie qui avait déclaré en substance que si jamais le djihad était proclamé en Tunisie il s’y engagerait. Le résultat, on le connaît aujourd’hui…
On appelle cela tout simplement flirter avec le diable pendant un moment et par la suite essayer de jouer les Cassandre.
Sans commentaire.
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