La tension est montée chez Vivendi, lundi 19 octobre, au lendemain de la publication par Le Parisien d’un article faisant état d’une « chute des abonnés » de Canal+ qui, selon le quotidien, « atteint 10 % en septembre ». Le soir même, le groupe de médias a publié un communiqué dénonçant « la propagation de fausses informations » et a demandé une enquête à l’Autorité des marchés financiers (AMF) après avoir vu son cours de Bourse baisser de 2,12 % en clôture de la séance du jour. Vivendi s’apprête ainsi à déposer une plainte pour divulgation d’informations trompeuses.
Selon Vivendi, « ce chiffre est positif ». Mieux, le groupe assure que ses recrutements ont progressé, alors que Le Parisien écrit désormais que c’est « le nombre de nouveaux abonnés [qui] a baissé de 10 % en septembre » – un mois décisif où Canal+ proposait une partie des matchs de la Coupe du monde de rugby et la saison 2 d’une de ses séries phares, Les Revenants.
La concurrence de nouveaux entrants
En France métropolitaine, Canal+ indique compter 43 900 nouveaux abonnés en septembre 2015, contre 36 100 un an plus tôt. Pour autant, Canal+ ne donne pas le volume global de ses abonnés.
Trésor de Canal+, les abonnements font l’objet de toutes les attentions, mais le groupe ne communique pas à leur sujet. On estime que la chaîne en compte environ 9 millions en France, en ajoutant ceux de Canal+ au sens strict, ceux du bouquet CanalSat et ceux de l’offre de vidéo à la demande CanalPlay.
Dans l’Hexagone, la baisse des abonnements à CanalSat a un temps été gommée par la progression des recrutements de CanalPlay. Selon plusieurs sources, ce ne serait plus le cas. BFM-TV a chiffré à 185 000 la baisse des abonnements en 2013 et Le Figaro a récemment évoqué un rythme annuel de 240 000 pour 2015.
Le modèle premium de Canal+, placé en haut de gamme – environ 40 euros par mois pour le bouquet Canal+ et 65 euros en ajoutant CanalSat –, subit la concurrence de nouveaux entrants, comme BeINSports (13 euros par mois) ou Netflix, le service de vidéo à la demande par abonnement, dont la première offre est à 8 euros par mois. BeINSports revendique « autour » de 2,5 millions d’abonnés et on estime à 500 000 le nombre de clients conquis par Netflix en un an.
Lire aussi : Netflix s’installe dans le paysage français
Arrivé à la tête de Vivendi et de Canal+ en juillet, Vincent Bolloré n’a pas caché que l’affaiblissement du modèle historique du groupe le préoccupait. Devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le 24 septembre, il avait même indiqué que Canal+ pourrait devenir déficitaire en 2016, après avoir subi une baisse de son résultat opérationnel en 2014, à 20 millions d’euros (et 583 millions pour l’ensemble du groupe).
Internationalisation croissante
Mais, s’il recule en France, le nombre d’abonnés à Canal+ dans le monde progresse, et il atteindrait près de 6 millions hors de l’Hexagone. Historiquement présent en Pologne et au Vietnam, le groupe se développe fortement sur le continent africain et nourrit des ambitions en Europe du Sud via Telecom Italia, dont Vincent Bolloré détient plus de 19 %. Depuis son arrivée, celui-ci défend l’internationalisation du groupe. Une façon d’assumer que le chiffre d’affaires réalisé en France a vocation sinon à se réduire, du moins à devenir minoritaire dans l’ensemble.
Intitulé « La chute de la maison Canal+ », l’article du Parisien s’arrêtait aussi sur les mauvaises performances des tranches en clair, symbolisées par la relance manquée du « Grand Journal », tombé à moins de 650 000 spectateurs par jour, loin de la formule précédente.
Lire aussi : Canal+ : Vincent Bolloré confirme Maïtena Biraben à la tête du « Grand Journal »
M. Bolloré clame depuis son arrivée que le seul indicateur de résultats qui lui importe est le nombre d’abonnés et il fait comprendre qu’il va réduire le clair sur Canal+, même si le modèle historique de la chaîne repose sur une corrélation entre la puissance des audiences en clair et la vigueur des recrutements. Vivendi semble vouloir privilégier d’autres leviers de recrutement.
AFP