La mise à niveau du secteur agricole et l’adoption d’une vraie politique agricole tunisienne sont fortement recommandées en tant mesures préalables à la conclusion d’un accord de libre-échange approfondi (ALECA) entre la Tunisie et l’Union européenne. La Tunisie, qui a abrité du 19 au 23 octobre le round zéro des négociations, a «largement entamé la phase des études» préalables à ses accords et aura besoin de mener d’autres études conformément aux décisions du dernier conseil ministériel tenu sur cette question, a affirmé le secrétaire d’Etat chargé de la Pêche, Youssef Chahed, lors d’un séminaire tenu au Kram, jeudi 29 octobre, sur l’impact de l’ALECA sur le secteur agricole, en marge du Salon international de l’agriculture, du machinisme agricole et de la pêche.
Cette phase précède celle de l’arbitrage, d’où l’importance du débat qui se déroule actuellement, sur ce sujet qui engage l’avenir du pays, a-t-il dit, notant que le partenaire européen doit mettre l’accent en cette étape politique, sur l’intérêt de la conclusion d’un accord entre une vieille démocratie (UE) et une jeune démocratie (la Tunisie).
Pour le secrétaire d’Etat, l’ALECA doit d’abord être soumis au principe de “l’asymétrie” compte tenu de la disparité existant entre les deux parties (Tunisie et l’UE) ainsi qu’à à un deuxième principe découlant du premier à savoir la progressivité ce qui implique une période d’adaptation avec au programme des mesures d’accompagnement pour atténuer l’impact négatif des accords sur certaines activités ainsi que des clauses de sauvegarde. “La Tunisie présentera également une liste de produits sensibles exclus de l’accord”, a-t- encore dit, notant que le gouvernement tunisien est animé d’une forte volonté et de grandes ambitions quant à la conclusion de cet accord dont l’exhaustivité constitue un facteur clé de réussite.
De son côté, le vice-président de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche, Omar Behi, l’ALECA constitue une occasion pour mettre à niveau l’agriculture en Tunisie ce qui nécessite l’engagement de réformes structurelles dans ce domaine. Cependant, ni le plan quinquennal (2016/2020) ni la loi de finances de 2015 ne traduisent une volonté d’engager ces réformes, contrairement aux promesses faites pendant les élections précédentes par tous les candidats, a-t-il dit regretté.
La réforme du secteur agricole doit toucher le volet foncier avec notamment, l’augmentation de la durée du bail agricole de 3 ans actuellement, à 9 ans au moins et la facilitation de l’accès au financement et la réduction du taux de crédit agricole au TMM seulement.
Il a également, recommandé la nécessité d’encourager l’acquisition des terres agricoles, de faciliter les procédures administratives et d’imposer des conditions pour l’accès au métier.
Pour M.Bahi, des arbitrages s’imposent en ce qui concerne la subvention du secteur et l’agriculteur doit être traité en tant qu’acteur économique et non pas en tant que cas social comme c’est le cas actuellement.
Selon Michaela Dodini, chargée du dossier de l’ALECA à la délégation de l’Union européenne à Tunis, les négociations sur l’ALECA constituent un processus qui a commencé depuis deux ans mais dont le calendrier n’a pas encore été fixé. Il ne s’agit pas de négociation économique classique mais vise notamment, le rapprochement réglementaire entre les deux pays, a-t-elle dit, affirmant que l’UE consciente de la sensibilité du secteur, a accepté les principes d’asymétrie et de progressivité.
Elle a ajouté que l’ALECA peut stimuler les reformes structurelles précitées soulignant l’importance des études qui doivent être engagées dans ce domaine notamment en ce qui concerne l’aspect réglementaire. A cet effet, l’UE a mis à la disposition de la Tunisie 300.000 euros et prévoit un budget plus important pour l’année prochaine.
Les négociations ne doivent pas traîner ou s’enliser, il faut aller de l’avant, a-t-elle recommandé.