En Tunisie, un des pays de la Méditerranée les plus exposés aux impacts du dérèglement climatique, les températures vont augmenter de 1,1°C d’ici 2030, selon les projections climatiques 2015 de l’INM (Institut national de la météorologie).
“Ce qui veut dire que les degrés de températures de Tunis (nord-est) seront celles enregistrées actuellement à Gabès au sud du pays”, a expliqué l’experte en gestion des ressources en eaux, Raoudha Gafrej, lors de la conférence-débat tenue au CITET sur le thème “Changements climatiques et développement : enjeux et solutions” en prévision de la Conférence des Parties COP21, prévue fin novembre/début décembre à Paris.
Le petit pays nord-africain, dont la contribution est infime aux émissions de gaz à effet de serre (0,007%), devra faire face également à une baisse de 28% des ressources en eaux en 2030, une diminution de 50% des eaux de surface, une diminution du PIB agricole de 22,5% et non des moindres, une réduction de la production agricole de 52%, en raison de l’intensité et de la succession des années de sécheresse.
Les impacts des changements climatiques se feront sentir également à travers l’augmentation de la salinité des sols, la surexploitation des terres et des pâturages, la baisse de la fertilité des terres, ce qui générerait des risques sur les exportations et mènerait à un “forçage économique sur l’agriculture”.
Même si les effets du changement climatique n’épargneront aucun secteur, pour l’agriculture, un secteur stratégique en Tunisie, le pays payera la facture la plus chère si rien n’est fait pour s’adapter à ce phénomène et atténuer son impact à travers des actions à court, moyen et long terme.
Cependant, les intervenants à la conférence-débat restent optimistes, car des solutions existes que la Tunisie pourrait adoptées pour ne pas aggraver la situation. Il s’agit de transformer les stratégies d’adaptation basées sur la gestion de la crise à court terme en d’autres stratégies de moyen terme, d’encourager les agriculteurs à préserver les écosystèmes, réviser la tarification de l’eau pour mieux gérer les ressources et adapter la carte agricole à la réalité des changements climatiques.
D’après l’experte, il faut aussi prévoir la reconversion des terres agricoles au lieu de laisser les agriculteurs changer chaque fois leurs sites d’exploitation outre l’intégration des changements climatiques dans toutes les stratégies sectorielles de développement.
Dans la contribution nationale à la COP21, la Tunisie a déjà exprimé des besoins en financements de l’ordre de 20 milliards de dollars destinés à s’adapter aux changements climatiques et à en atténuer l’impact, selon le document de l’INDC.
Sa contribution à cet effort est de 10%, le reste pourrait être mobilisé à travers des lignes de crédits avantageux et un accompagnement de la communauté internationale sous plusieurs formes, dont l’assistance technique et le renforcement des capacités institutionnelles.
En plus de ce qui est prévu à plus large échelle pour réduire les impacts des changements climatiques, la Tunisie a besoin, plus que jamais, d’un éveil des consciences car c’est une “responsabilité commune”, que tout le monde doit assumer, d’après certains écologistes présents lors de la conférence.
François Gouyette, ambassadeur de France à Tunis, note que la contribution de la Tunisie aux engagements universels est ambitieuse, estimant que ce pays, doté d’un littoral riche en faune marine et d’un savoir-faire ancestral dans la production de plusieurs produits tels que les olives et les dattes, gagnerait beaucoup à agir pour préserver son “patrimoine vert” et les trésors de tous les Tunisiens, objet de pressions.
“Il faut que les pratiques agricoles évoluent et que la gestion des ressources en eaux soit meilleure. Il faut également lutter contre l’érosion et recourir davantage aux énergies renouvelables. L’engagement ne se limite pas aux Etats, la société civile et les citoyens doivent se mobiliser. Ils peuvent jouer un rôle critique”, a-t-il encore avancé, rappelant que 90 chefs d’Etat et 40.000 participants sont attendus à la conférence de Paris “COP21”.
La conférence-débat sur les changements climatiques est organisée par le ministère de l’Environnement et du Développement durable, l’AFD (Agence française de développement), le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) et l’ambassade de France à Tunis.
La Conférence des Parties COP21 de Paris cible un engagement «universel et juridiquement contraignant» de tous les pays, pour réduire de 2% les émissions de GES, d’ici 2030.